Départ

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Le mercredi suivant, mon patron qui semblait tout juste arriver avec son pardessus toujours sur lui, reçut la visite du président. Dans son style oratoire puissant, tant et si bien qu’il paraissait parler tout seul, il avait commencé par évoquer la dernière réunion du conseil d’administration, les plans pour le futur et sondé l’atmosphère de la rédaction. Puis, vint le moment de vérité, sans toutefois interrompre le flot soutenu de ses paroles.

Il était question d’un certain tire-au-flanc au départ précipité :

« Au fait, Garry a pris deux semaines de vacances ! Donc, tu comprends, Nick, tu vas devoir le remplacer pendant ce temps ! Je sais que tu en es capable ! Ce n’est pas comme si Baumann était vraiment journaliste, à vrai dire ! Mais même lui tu peux le gérer, déjà que tu t’en sors très bien avec sa femme !

— Moi ?

— Sans parler que tu es plus qualifié qu’eux et même mieux reconnu par les lecteurs, y compris chez la concurrence ! Tu n’en feras qu’une bouchée, fais-moi confiance ! J’ai un don pour découvrir les perles rares, après tout ! Si tu as des problèmes avec leurs patrons, tu sais comment faire ! Ce n'est pas plus compliqué qu'avec les hommes politiques !

— Moi…

— S’il y a quelque chose d’urgent, ne t’inquiète pas, j’appelle Garry et on règle ça ! Je ne pense pas qu’on aura besoin de le faire, mais on ne sait jamais ! Tu ne devrais pas avoir trop de mal même si c’est le cas ! Il t’a déjà envoyé les copies des dossiers et de tout ce qu’il faut ! Tu peux commencer maintenant !

— Moi !

— Ce n’est que pour deux semaines ! Bon, j’y vais, réunion avec les actionnaires, tu sais comment c’est ! »

Sans laisser sa chance au journaliste de légende, le président Williams quitta les lieux d’un pas rapide et décidé qui n’était pas sans rappeler la vigueur de sa voix. Depuis l’endroit stratégique où Aurore et moi nous nous trouvions, chacune à notre bureau, j’avais pu entendre l’échange à sens unique des deux responsables du journal. La contrepartie à cela était que nous étions bien trop vulnérables au champ de vision de mon patron.

Celui-ci, à peine nous avait-il remarquées, nous avait rejointes :

« Aurore…

— Non, répliqua-t-elle sèchement.

— Aurore, insista-t-il surpris par la réponse abrupte.

— Non négociable. Je ne ferai pas le travail de Garry toute seule. »

Devant le refus déterminé de l’impassible beauté, les yeux du patron glissèrent doucement sur moi. Après un instant de réflexion, il ajouta : « D’accord. Et si nous étions trois ? Toi, Eleanor et moi ? » Aurore accepta la proposition non sans l’accueillir avec froideur. J’interprétai son air détaché comme un avertissement pour les deux semaines à venir et anticipai la séance de travail intense avec eux. Mon cœur balançait entre la tranquillité d’être en petit groupe et l’excitation de les voir tous les deux ensemble. Peut-être que le mystère de leur relation me serait révélé à cette occasion ?

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