28- L'ouverture du Dernier Cercle (2/2)

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Après l'intervention de MAGIE, le DC est pris d'assaut. À toutes les entrées, se forment de longues files d'attentes. Nous nous dirigeons vers une large ouverture qui semble s’ouvrir sur les entrailles souterraines du monstre. Dans une semi-obscurité piquée de petites lumières dessinant notre trajectoire, nous descendons dans les sous-sols. Nous arrivons dans un hangar immense, où des voiturettes comme la nôtre sont alignées à perte de vue.

Une fois dehors, Edan prend la tête et nous mène à un ascenseur. Il s’approche d’un écran qui scanne ses yeux et l’engin entame son ascension. Arrivés à destination, nous débouchons à l’intérieur du DC, notre position nous offre une époustouflante vue panoramique. D’innombrables rangées de sièges descendent vers un dôme opaque aux proportions phénoménales en de multiples ellipses.

  • En dessous, est dissimulé le décor de la première épreuve, tenu secret jusqu’à la dernière minute. Je n’ai pas le temps de contempler ce spectacle qu’Edan entame la descente des escaliers qui nous font face. Il est arrêté par une rambarde. On ne distingue rien de ce qui se trouve en dessous. Il pose son doigt sur un petit carré que je n'avais pas vu. Quelques secondes après, un grand cube métallisé apparaît en face de nous, la rambarde coulisse et la paroi du cube s’escamote laissant apparaître cinq sièges. Éberlué, je suis les autres qui prennent place. Une fois la paroi refermée, Edan fait apparaître un holoécran devant nous sur lequel le plan du DC s’affiche instantanément.
  • Nous devrions rester ici, au centre, et utiliser le bras articulé pour nous placer en surplomb de l’arène, qu’en pensez-vous ? dit-il, en se tournant vers Maya.
  • Oh, je n’y connais rien, faites au mieux, répond-elle avec un petit rire .
  • C’est quoi cette histoire de bras articulé ? demandé-je tout bas à Christo.
  • C’est pour permettre de positionner le cube, me chuchote-il.

Sa réponse ne m'éclaire pas plus. Tandis que je balaie du regard notre environnement, notre loge se met en mouvement.

D’accord, notre loge se déplace grâce à un bras articulé, mais pour aller où ? m’interrogé-je, en me penchant en avant pour avoir une idée de notre destination.

À ma grande surprise, alors qu’il ne m’adresse quasiment jamais la parole depuis notre arrivée à Bulle G et qu’il est à la manoeuvre, Edan me répond.

  • Nous sommes dans une loge mobile. Comme tu peux le voir, elle est cubique. Elle est composée d’un polymère très résistant, de la même famille que celui des combinaisons que nous utilisions pour aller au Dehors. Ces loges, comme leurs noms l’indiquent, peuvent se déplacer. Elles sont posées sur un rail qui leur permet de circuler sur toute la circonférence de l’arène. Elles peuvent également être positionnées au dessus de celle-ci, à une distance raisonnable, à l’aide d’un bras articulé qui s’accroche aux parois…
  • Mais… Cela ne gêne pas les combattants et les spectateurs dans les gradins, demandé-je, imaginant difficilement une dizaine de cubes obstruant la vue.
  • Le polymère dont je t’ai parlé permet de se rendre invisible. Ainsi les spectateurs ne voient pas les parois et nous non plus.
  • Nous sommes comme suspendus dans le vide, alors ?
  • Exactement. D’autre part, j’ai l’intention d’incliner la loge vers l’avant afin d’avoir une meilleure vision de l’arène et elle se repositionnera automatiquement en fonction des évènements. Il faudra s’équiper.

Sans plus d’explications, il se tourne vers Maya.

  • Ici, nous serons bien, n’est-ce pas ?
  • C’est parfait, lui répond Maya.

Les regarder discuter d’un air précieux de la meilleure place pour assister à un massacre éveille en moi une fureur meurtrière. Ma place n’est pas ici, dans ce Cube. J’en ai assez, je suis coincé ici pour rien alors que là-bas, aux abords de B2, Ana, Isa, Téodime et les enfants sont sûrement en danger voire pire.

Je veux que ça s’arrête. Pourquoi dois-je aussi assister à la mort gratuite et inutile d’autres êtres humains ?

D’autres cubes se déplacent et les gradins se remplissent jusqu’à devenir une nappe humaine grouillante et vibrante. Soudain, m’arrachant à mes sombres pensées, une voix masculine et enjouée tonne et rebondit partout dans l’enceinte.

  • Bienvenue à Tous ! Comme chaque année, voici enfin venu Le Mois tant attendu dans les quatre Consortiums. Sans plus attendre, je passe la parole au Super Gouverneur d’América !

Des applaudissements nourris saluent cette annonce.

  • Chers compatriotes, chers citoyens des quatre Consortiums, au nom de tous les Bullites d’América, je vous souhaite la bienvenue sous notre Bulle G et dans notre Dernier Cercle ! Nous sommes heureux de vous retrouver et impatients de partager avec vous les festivités à venir.

Une salve d'applaudissements lui répond tandis qu'il conclut d'une voix de stentor.

  • Maintenant, place au Spectacle !

À ces mots, une clameur immense envahit le Dernier Cercle, à en faire trembler les parois de notre Cube. J’en accueille la fin avec soulagement tandis que le commentateur prend la suite du dirigeant.

  • Découvrons, sans plus attendre, le portrait des quatre équipes qui vont s’affronter cette année. »

Un silence attentif s'installe. Un grand écran se matérialise et le film commence. Habillée d’une musique martiale, une voix masculine brosse brièvement le portrait et le parcours de chaque combattant sous les acclamations mais aussi les huées du public, qui exprime bruyamment ses préférences.

Je découvre les trente-deux combattants. Je n’entends que des bribes et arrive parfois à saisir le prénom de l’un deux. De toute façon, j’aurais été bien incapable de les retenir tous. Alors, je me concentre sur les images de ceux qui m'interpellent.

La présentation débute avec l’équipe d’Océanie composée essentiellement d'individus à la charpente large et solide. Un seul personnage détonne. Il est tout juste plus grand qu’un enfant de dix ans, Sa peau, sa chevelure sombre et la furtivité de ses déplacements lui confèrent une présence évanescente et malsaine.

Vient ensuite la présentation de l'équipe Europe. La carrure des combattants est moins impressionnante. Cependant, ils ont tous des physiques athlétiques. Un jeune homme élancé du nom de William semble faire l’unanimité dans le public. Blond aux yeux verts, ses lèvres pulpeuses semblant perpétuellement esquisser un sourire, il présente une élégance naturelle dans les combats et a créé des liens déjà forts avec le peuple d’Europe, au vu des images et des élans d’affection jaillissant des gradins.

  • Il est sacrément racé, celui-ci, murmure Edan.

Dans la même équipe, une jeune femme à la longue chevelure rousse, grande et fine comme une liane, attire tout au contraire, une pluie nourrie de huées. Je comprends qu’elle a tué un des chouchous des spectateurs. Elle fait preuve d’une détente incroyable lui permettant pourtant un style spectaculaire à base d’acrobaties surprenantes. Cela dit, l’énergie qu’elle dépense doit être énorme. Ash secouerait certainement une tête navrée en voyant cela. Il m’a enseigné que l’économie d’énergie et l’art du mouvement juste, sont l’alpha et l’oméga des bons combattants. Le reste, c’est de la déco, disait-il, jolie et inutile. Cette jeune femme s’appelle Ella, je crois.

Dans l’équipe América, je remarque Martin, un homme à la musculature aussi impressionnante que les jumeaux d’Océanie, mais qui semble davantage être le fruit d’un travail acharné qu’un don de la nature. Il arbore, dans le petit film, un sourire beaucoup trop confiant pour être honnête. Le suivant, Diego, possède un physique plus proche de la norme, un brun de taille moyenne et à la peau mate. Son visage affiche un air tendre vite détrompé quand il passe à l’action. J’admire ses gestes rapides et fluides. Un sérieux candidat, je pense.

La première à être mise à l’honneur dans l’équipe du Consortium Chine est Feng, une femme petite aux yeux noirs et audacieux. Ses cheveux rebelles, tant bien que mal disciplinés en queue de cheval, lui balaient le visage à chaque mouvement. Elle aussi, montre une rapidité et une agilité extraordinaire mais aucune fioriture ne vient contrarier sa danse martiale. Sa façon de se mouvoir, son regard acéré, tout son être dit ce qu’elle est, à qui sait l’entendre : une authentique guerrière. Enfin, le dernier à être présenter est un homme, aux yeux bridés, comme Feng. Il dénote par sa chevelure parsemée et blanche. Les extraits de ses combats mettent en exergue sa capacité exceptionnelle à encaisser les coups ainsi que ses qualités de stratège. Son sens de l’esquive est prodigieux et ses attaques, rares mais déterminantes presque à chaque fois, expliquent sa présence dans le DC. Cet homme expérimenté se prénomme Yugo.

Après les dernières notes de musique, un silence fébrile et électrique s’installe dans la gigantesque enceinte. L’opacité qui recouvre la Bulle au-dessus de l’arène se désagrège lentement, ou peut-être est-ce la bulle elle-même, je l’ignore. Notre placement est idéal pour découvrir ce qu’elle cache. Dans une poignée de secondes, nous saurons.

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