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Elle a fini sa journée et a embrassé les deux vieux sur les deux joues avant de partir. Elle a un peu mal au dos, pas vraiment, juste un peu. Une vague douleur que quelques étirements pourront facilement évacuer. Elle va rentrer à la belle cabane, près de la rivière. Il sera déjà là, dans son vieux fauteuil, avec sa bière et son journal. Il ne la regardera pas, ne la saluera pas. Elle non plus. Elle préparera le repas. En chantonnant. Quand ce sera prêt, plutôt que de l’appeler, elle agitera la grosse cloche accrochée sur le porche de l’abri, pas bien loin de lui. Il arrivera sans un mot et ils mangeront. En silence. Il terminera le premier (il dévore), attendra qu’elle ait fini, en la regardant, se lèvera, ramassera les assiettes et les lavera à l’eau froide dans la bassine en plastique vert avant de retourner s’asseoir dans le fauteuil en osier avec les coussins fleuris qu’elle a cousus. Elle attendra encore un peu seule à table, finira son verre de vin, puis se roulera une cigarette avec du tabac sans additif et ira la fumer debout face à la rivière. Elle écoutera le glouglou imperturbable, les oiseaux qui chantent et le reste du silence.

Elle est heureuse en couple. Absolument. Tout est bien dans sa vie actuelle : un boulot simple, une histoire d’amour simple, une routine apaisante. Elle se tournera à droite pour contempler le coucher de soleil, chaque soir différent. Aujourd’hui, il offre une élégance discrète, pas d’explosions exubérantes de rouges et or, juste le ciel marine très foncé décoré de légères banderoles bleu tendre et rose osé. Ce n’est pas mièvre, c’est délicat.

Elle ira au lit avant lui, comme d’habitude. Il la rejoindra peut-être, la touchera peut-être, elle verra. Elle s’étire et pense à demain, le matin chez la pauvre Madame Faure, l’après-midi chez les agités de Gerdin. Elle pense à son prochain pique-nique, elle a envie de se râper des betteraves avec les carottes, elle adore le mélange des deux goûts, y ajouter le jus de citron, l’huile d’olive et l’ail généreux. Elle pense encore à Madame Faure, la pauvre, elle a promis de lui prêter un livre drôle pour la distraire, elle pense au mot « drôle », puis au mot « livre », connaît-elle seulement un livre drôle ? Pourquoi a-t-elle dit une telle ânerie ? Elle s’endort.

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