Chapitre 5 : Milady, ou comment une référence à Star Wars peut vous tirer d'affaires...

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Le problème avec les scientifiques russes, c'est qu'on ne sait jamais quelle est la part de vérité et quelle est la part de vodka…

C'est la première pensée qui m'est venue à l'esprit quand j'ai repris connaissance. Et celle-ci l'a immédiatement suivie :

Damned, je commence à penser comme Pépé José !

Mais bon, j'ai l'excuse d'avoir été chloroformée à l'improviste…

Alors que je tente de récupérer un maximum de mes capacités mentales, j'ouvre prudemment un œil… pour le refermer aussitôt, aveuglée par un trop fort éclairage. Mais cela a au moins le mérite de confirmer le fait que j'avais bel et bien été enlevée, et non que je m'étais endormie d'ennui en compagnie de Pépé José et de Jean-Charles… En effet, mon grand père ne gaspillerait jamais son précieux héritage dans sa facture l'électricité. Aussi éclaire-t-il son appartement avec des ampoules basse consommation à peu près aussi efficace que des lampes de poche. Un éclairage aussi violent ne peut pas provenir de chez lui. Et je doute sincèrement que Jean-Charles m'apprécie suffisamment pour m'offrir le gîte. Surtout sans me demander mon avis, et en me transportant là bas pendant mon (lourd) sommeil. Quant à Antarès, s'il avait voulu m'enlever pour quelque raison, il avait eu toute une journée pour le faire… Ainsi, tel Sherlock Holmes, j'ai éliminé l'impossible, et ce qui reste, même l'improbable, doit être la vérité. Je me trouve donc aux mains de personnes louches (et travaillant probablement pour les exobiologistes russes) qui m'ont enlevée alors que j'allais prendre ma douche ! Elémentaire.

Ma pauvre Hélène, tu as un don pour attirer les emmerdes…

Ça me fait un point commun avec d'Artagnan ! rétorqué-je à mon autre moi-même

Cette pensée me motive à rouvrir un œil. Et, comme je l'aurais fait un lundi matin à la rentrée de trop courtes vacances, je fais un effort surhumain pour battre des paupières jusqu'à ce que je m'habitue à la lumière. Je balaye enfin la pièce du regard. La première chose que je remarque est le plafond, pierreux et voûté comme celui d'une vieille cave à vin. Mais les néons qui y sont accrochés font très anachroniques… De toute manière je n'aime pas les plafonds voûtés. Sauf quand ils se trouvent à trente mètres au dessus de ma tête comme dans les cathédrales.

Oui, je suis légèrement claustrophobe. Mais je me soigne.

Je me détourne donc du plafond pour me concentrer sur les murs. Ils sont également faits de grosses pierres irrégulières et encombrés d'appareils bardés de loupiotes clignotantes et d'écrans remplis de chiffres qui bougent en permanence. Tout cela me fait penser que je me trouve dans une fusion entre un bloc opératoire et la salle de contrôle d'une base de lancement de missiles nucléaires soviétiques. Mais attention, si cela m'évoque l'URSS, ce n'est pas à cause d'un odieux préjugé digne de Pépé José. C'est juste que l'unique autre salle de commande de lancement nucléaire que j'ai vu pour de vrai (l'Etoile Noire dans Star Wars, ça ne compte pas), c'était au musée de la Guerre Froide de Moscou, aménagé dans l'ancien bunker de Staline. Et comme ici, il y avait plein de serrures sur des tableaux de bord à déverrouiller avant de bombarder (virtuellement) les Etats Unis. Mais une fois de plus, la vieille porte en bois encastrée dans le mur en face de moi, casse un peu cette ambiance des "moments chauds de la Guerre Froide". Je suis donc bien chez une bande de scientifiques fous russes…

De plus je constate que des appareils médicaux sortent toutes sortes de fils et de tubes de divers aspects et dont certains convergent vers ma personne. J'essaye de me redresser pour mieux voir mais mes bras sont bloqués. Après plusieurs tentatives infructueuses, je m'aperçois que mes poignets sont solidement sanglés au bord de ce qui semble être un lit d'hôpital. Une brève vérification m'indique qu'il en est de même pour mes chevilles… Et pire que tout : je porte une espèce de blouse verdâtre du plus mauvais effet. Après avoir dressé mentalement la liste de tous les jurons que je connais (en français et en sicilien), je m'efforce de retrouver mon sang froid afin d'analyser au mieux la situation.

J'essaye de reconnaître au mieux les appareils médicaux. Malheureusement, ma seule expérience en la matière se limite à la série Dr House que j'avais suivi un jour distraitement, faute de mieux… En me tordant le cou, je vois que ma poitrine dénudée est bardée d'électrodes et que j'ai des pansements au creux des coudes. Je dois aussi avoir quelque chose sur la tête, aux vues de l'électroencéphalogramme qui s'affiche à ma droite. J'en déduis que la plupart des appareils auxquels je suis branchée ne sont que des instruments de mesure. Il n'est pas encore venu à l'esprit de mes ravisseurs de m'injecter des substances pas nettes pour mieux pouvoir me disséquer ensuite.

Ce qui est plutôt une bonne nouvelle. Ils doivent être en train d'analyser mon sang à l'heure actuelle… Mais au fait, quelle heure est-il ? Depuis combien de temps suis-je ici ? Pépé José et Jean-Charles ont-ils des chances de me sortir de là ? Et Antarès ? Après tout c'est un peu de sa faute si je suis là ! Mais il ignore sans doute ce que je suis devenue…

Non. Il vaut mieux ne compter sur personne et faire comme si j'étais seule au monde. Je ne peux pas me permettre d'attendre que l'on vienne me sauver sans rien faire telle une vulgaire demoiselle en détresse. Je refuse d'être Mary-Jane, la copine de Spiderman, qui ne semble exister que pour hurler et sa faire sauver à plusieurs reprises ! Je suis Milady prisonnière dans le château de Lord de Winter et j'en sortirai avec la seule ressource de mon jeu d'actrice ! Bon, mon objectif n'est pas de faire tuer Buckingham au passage, mais faire manger à mes ravisseurs leurs os du carpe par ordre alphabétique me paraît une bonne alternative…

Mais avant cela, tout comédien a besoin d'un public. Je m'efforce donc de faire venir quelqu'un en hurlant :

  • J'AI FAIM ! (Ce qui n'est que pure vérité.)

Je réitère mes appels durant une dizaine de minutes, pendant lesquelles les chiffres que j'ai identifiés comme représentant ma fréquence cardiaque doublent leur valeur. Si bien que je ne sais pas si ce sont mes cris où l'accélération de mes battements de cœur qui ont fait réagir Tretyakov qui déboule dans la pièce aussi rapidement que la lourde porte en bois le permet.

  • Ah, vous êtes réveillée, articule-t-il avec un fort accent
  • Et vous, vous êtes observateur, répliqué-je

Ignorant ma remarque, il fait le tour de tous les appareils de la pièce.

  • J'ai faim, répété-je alors qu'il s'apprête à sortir
  • Pardon ? Je ne comprends pas bien votre langue.

Je décide de laisser la parole à mon estomac qui choisi ce moment pour émettre un gargouillement éloquent. Une lueur de compréhension traverse les yeux gris de Tretyakov.

  • Je reviens, lâche-t-il en claquant la porte

Bon, voilà qui n'est pas trop mal pour un début. J'espère n'avoir affaire qu'à lui à l'avenir : il est légèrement plus sympathique que sa collègue Shapoklyak. Reste à cerner le bonhomme pour voir ce que je peux en faire… Mais je réfléchis toujours mieux le ventre plein. D'ailleurs le voilà qui revient avec un bol et une cuillère à soupe.

  • Ah, super ! Merci, lancé-je avec mon plus aimable sourire.

Je croise mentalement les doigts pour qu'il me détache au moins les mains pour que je puisse manger toute seule… Mais au lieu de ça il appuie sur un bouton hors de mon champ de vision, ce qui a pour effet de redresser la moitié supérieure de mon lit. Puis il tend vers moi sa cuillère pleine d'une substance blanchâtre qui pue l'oignon trop cuit. Je fais un terrible effort de volonté pour ne pas grimacer et rejeter la tête du côté opposé, comme je le faisais lorsque j'étais toute petite et que j'avais un appétit capricieux. Si cette étrange soupe est sans doute infecte, j'ai trop faim pour m'en rendre compte. Malgré tout, mon amour-propre en prend un sacré coup. Je ne supporterai pas ça longtemps.

J'essaye donc de le faire parler, histoire de dégager un trait de caractère, une conviction, un centre d'intérêt.

  • Qu'est ce que je fais ici ? Je croyais que vous étudiiez les extra-terrestres…

Tretyakov me regarde sans que son visage ne trahisse la moindre émotion. Sans me démonter, je poursuis :

  • Je ne suis pas une extra-terrestre moi !
  • Non, admet-il à regret
  • Alors qu'est ce que je fais ici ?
  • Vous avez eu un contact… heu… physique avec un extra-terrestre.

J'adore la manière dont il roule les R en prononçant le mot "extra-terrestre" ! Mon nouveau défi est de le lui faire dire un maximum de fois !

  • Ah bon ? Qu'est ce qui vous fait dire ça ? demandé-je le plus candidement du monde.
  • Il y avait des … traces d'ADN extra-terrestre sur votre peau.

Je fais de mon mieux pour prendre un air incrédule.

  • Mais je ne vois pas du tout comment…
  • L'extra-terrestre que nous recherchons est capable de…de métamorphose.
  • Vous voulez dire qu'il peut-être n'importe qui ? m'exclamé-je en écarquillant les yeux de "peur".

A chacune de mes réactions, Tretyakov jette un discret coup d'œil à l'électroencéphalogramme en face de lui. Il vérifie que je ne lui mens pas ? On peut coupler un détecteur de mensonge à ce type d'appareil ? Si oui, me voilà mal barrée. Mais bon, d'après ce qu'en disent les films d'espionnage, ils ne sont pas fiables à 100%. Reste à savoir si je peux tromper la machine en même temps que l'homme. Pour l'instant, impossible de savoir s'il me croit ou pas : son visage est fermé comme une huitre avariée !

Tu peux le faire Hélène !

Une fois le bol de soupe vidé, Tretyakov sort un carnet et un stylo de la poche de sa blouse et de met à y griffonner rapidement. A défaut de pouvoir lire ses notes (pour des questions d'angle de vue et d'illisibilité du cyrillique manuscrit), je regarde la couverture du carnet par en dessous. Elle est noire et porte en grosses lettres blanches la mention "HAN SHOT FIRST". J'ai déjà lu ça quelque part… Le Han en question ne peut-être que Han Solo, le célèbre contrebandier de la saga Star Wars. C'est peut-être le nom d'une dynastie chinoise mais cette seconde hypothèse me paraît hautement improbable. Soudain c'est le déclic. "Han shot first" ! Bien sûr ! L'un des premiers débats qui a démontré à quel point les fans de Star Wars peuvent être extrêmes !

Attendez, j'explique.

Ce débat intense a démarré au moment où George Lucas s'est mis à mettre à jour les effets spéciaux de ses films au fur et à mesure des avancées technologiques dans le domaine. Il en a profité pour rajouter quelques détails que les fans s'amusaient à traquer.

George Lucas a donc ainsi rajouté un plan au début de l'épisode IV, lorsque Luke et Obi-Wan s'apprêtent à rencontrer Han Solo. On voit ce dernier en train de se disputer avec un collègue à la peau verte nommé Greedo. Le ton monte et chacun saisit son arme mais Solo est plus rapide et fait exploser son camarade. La modification apportée par Lucas est un plan très bref durant lequel Solo évite le tir de Greedo par un mouvement de translation assez étrange, et riposte immédiatement après. George Lucas a justifié cet ajout "pour que le spectateur comprenne bien que Han Solo n'avait d'autre choix que de tirer". Et là, des fans ont hurlé au scandale, au prétexte que cela enlevait de l'ambigüité au personnage du contrebandier. Le débat de "Han shot first" était né. Ce qui a persuadé George Lucas de faire une nouvelle modification. Dans la version définitive, le contre-champ où Solo riposte est quasi subliminal (18 images seulement) et fait presque penser à une erreur de montage…

Bref, tout ça pour dire que quelqu'un prenant part à ce débat concernant moins d'une seconde d'un film de deux heures, n'est pas seulement un fan de Star Wars. C'est un fan HARDCORE de Star Wars. A la limite du fanatisme religieux. Et Tretyakov est l'un d'entre eux.

Je me mords l'intérieur de la joue pour ne pas ricaner. Maintenant je sais exactement comment je peux sortir de cet endroit. J'ai une pensée de remerciement pour mon parrain programmeur qui, pour ainsi dire, était un geek avant que ça ne devienne à la mode. C'est lui qui m'a initiée depuis mon plus jeune âge à l'informatique et à la culture qui va avec.

Grazzi tonton Philippe, t'es le meilleure !

Pendant mes réflexions fulgurantes, Tretyakov semble faire quelques réglages sur les appareils de type "lancement nucléaire".

  • Qu'est ce que vous faites ?

Comme je m'y attendais, Tretyakov ne répond pas. Je porte alors ma première attaque :

  • I've got a bad feeling about this… lâché-je laconiquement

Tretyakov se fige. Et pour cause : je viens de lui sortir une réplique culte qui revient dans tous les films (et même parfois plusieurs fois par film) de la saga. C'est à la fois un running gag et un moyen de reconnaissance entre fans. L'exobiologiste me fixe, incrédule.

  • Pardon ?
  • Non rien... je pensais qu'un chasseur d'alien comme vous serait capable de reconnaitre une référence toute bête à Star Wars, dis-je en exagérant ma déception.
  • Votre manque de foi me consterne.

Je souris. Nous avons eu quelques problèmes de communications jusqu'ici, mais là, nous parlons la même langue. Il me rend mon sourire. Parfait. Il se rapproche de moi. Son sourire se fait joueur.

  • Quel est le nom de sith du… comte Dooku ?

Damned voilà qu'il essaye de me poser une colle… Il est en train de tester mon degré de "fangirlisme" ? Absurde.

  • Vous me sous-estimez, Tretyakov… C'est vexant.
  • Répondez.
  • Darth Tyranus, dis-je distraitement.

L'exobiologiste a l'air rassuré. Je laisse échapper un petit rire amusé.

  • Bon, à mon tour.
  • Je vous écoute.
  • Quels sont les derniers mots de maitre Yoda ?

Tretyakov marque un temps de réflexion avant de répondre :

  • "There is another Skywalker".
  • Bien joué.

C'est gagné, je l'ai dans la poche. En l'espace de vingt minutes. Milady n'a qu'à en prendre de la graine. Il est temps de lui porter le coup de grâce.

  • Vivement la sortie de l'épisode VII, n'est ce pas ?
  • Oui. Les teasers sont très prometteurs… Sourit-il, complice.

J'ai presque mal pour lui… Mais je me rappelle que je suis sanglée à un lit, à moitié nue et bardée de capteurs dans une cave reconvertie en laboratoire à cause de lui. Mes scrupules disparaissent.

  • Je suppose que vous avez fait des recherches sur mon compte ?
  • Oui.
  • Donc vous devez être au courant que j'ai une tante qui est comptable au CNC.

Tretyakov ne répond pas. Mais son silence est éloquent.

  • Et vous savez quel est l'avantage de travailler au Centre National du Cinéma ? C'est de pouvoir voir les films qui vont sortir avant tout le monde. Il y en a même qui sont payés pour ça.
  • Ne me dis pas que…
  • Si. J'ai vu l'épisode VII. Et je n'ai besoin que de trois mots pour vous spoiler le twist principal du film. Vous pouvez tenter tout ce que vous voulez pour me faire taire, j'aurais le temps de prononcer ces trois mots. Ce sont des mots relativement courts.
  • Vous…vous bluffez !
  • Vous voulez une preuve du contraire ?

Je fais mine d'articuler des mots silencieusement.

  • Non ! s'exclame-t-il, une lueur de panique dans le regard
  • Parfait. A présent, regardez bien ma main.

J'effectue alors un léger mouvement de la main. Le mouvement que font les Jedi pour convaincre les esprits faibles de se plier à leur volonté.

  • Vous allez me détacher et me faire sortir d'ici sans donner l'alerte.

Tretyakov se sent obligé de répéter, comme dans les films.

  • Je vais vous détacher et vous faire sortir d'ici sans donner l'alerte.

Je fais signe à l'exobiologiste de s'exécuter. Je laisse éclater mon sentiment de triomphe au grand jour. Il me conduit de mauvaise grâce dans une enfilade de couloirs au plafond bas. J'essaie de mémoriser le trajet, au cas où... sans grand succès. A l'instar de ma mère, qui est capable de se perdre dans le quartier de son cabinet, je n'ai pas vraiment le sens de l'orientation.

EnfinTretyakov déverrouille une porte grillagée donnant sur l'extérieur. C'est la nuit noire mais je sens des effluves marines. Je me prépare à piquer un sprint.

  • Gunya ! Ti chto delayech ? glapit une voix féminine derrière nous.

Je fais volte face. C'est Shapoklyak. Je sens qu'elle sera bien moins facile à manipuler.

  • Nat, posluchaï... tente Tretyakov

Shapoklyak a un sifflement de mépris et pointe un pistolet vers nous. Enfin, vers moi, sans doute. Je suis un peu myope.

  • Retournez dans votre chambre, Schiapparelli. Nous sommes sur l'île d'Aix. Vous n'irez pas loin, si vous tentez de fuir.

Et merde.

L'île d'Aix, dernière demeure de Napoléon avant son départ pour Sainte-Hélène (rien à voir avec moi). L'île d'Aix, ce petit pâté de sable entre l'île de Ré et le Fort-Boyard, petit coin de paradis sans voitures ni motos… A peine un kilomètre de long et une centaine de mètres de large...Bref, j'en ai pour minimum deux heures de nage avant de rejoindre le continent. Et je ne sais nager qu'avec des palmes. Autrement, je suis aussi agile dans l'eau qu'un phoque sur la terre ferme. De toute manière, vu la période de l'année, je serais morte de froid avant d'avoir pu parcourir une centaine de mètres. Je serre les pans de ma blouse contre moi.

  • I am lost. I must die, déclaré-je d'une voix atone

Tretyakov fronce les sourcils.

  • Ce n'est pas dans Star Wars ça…
  • Non, c'est dans les Trois Mousquetaires. Inculte.

Il me regarde sans comprendre. J'en profite pour lui envoyer un violent coup de pied à l'entrejambe. L'exobiologiste s'écroule, je le pousse vers sa collègue. Je pars en courant et me mets plus ou moins à couvert dans les buissons. Un coup de feu retentit, je l'entend ricocher sur la paroi de fer. Je me remet à courir Les graviers et les branchettes au sol me déchirent les pieds, mais je n'y prête pas attention. J'ai l'impression d'être le héros de piège de cristal... Je panique un peu à l'idée que les Russes retrouvent ma trace grâce à mon sang répandu, comme les terroristes dans le film. Mais, heureusement, il fait nuit.

Bon, cet île est minuscule. En longeant la côte, je tomberai tôt ou tard sur un port. Là je me planquerai à la capitainerie et j'y attendrai le prochain départ de bateau pour le continent. Voilà qui me paraît être un bon plan. Mais je suis obligée de l'accélérer en entendant des coups de feu dans mon dos. Je jette un bref regard par-dessus mon épaule. Shapoklyak est sur mes talons. Et à mon avis, la seule chose qui me maintient en vie est qu'elle ne sait pas tirer…

  • Vous visez comme un stormtrooper ! lancé-je joyeusement.

Je me concentre de nouveau sur mon chemin, mais pas assez vite pour éviter le colosse devant moi. Je le heurte de plein fouet, manquant de m'assommer. Je me relève en titubant et essaye de le contourner, mais il me retient de sa poigne de fer.

  • Lâchez moi espèce de… protesté-je en le frappant de mes petits poings
  • Hélène enfin…

Je lève les yeux vers lui. C'est le Terminator.

  • Antarès ! Comme je suis contente de te revoir !
  • Moi de même. Mais je suggère un autre endroit pour fêter nos retrouvailles.
  • Tout à fait d'accord.

Antarès me prend par un bras et m'entraine vers l'eau.

  • Surtout ne me lâche pas, ordonne-t-il avant de placer mes bras autour de son torse.

Je serre mon ami extra-terrestre de toutes mes forces et me laisse entrainer dans l'océan glacé.

Les coups de feu reprennent de plus belle. Shapolkyak a dû se remettre de sa surprise. Mais au même moment, le diamètre du torse d'Antarès se modifie dans mes bras, me contraignant à resserrer mon étreinte. Ses vêtements se déchirent et sa peau se couvre d'écailles. Nouveaux coups de feu.Antarès plonge, je bois la tasse. Je lutte pour sortir la tête de l'eau et ne pas mourir de froid. Chaque respiration me demande une concentration intense. Tout mon être se mobilise pour survivre. Mes muscles se tétanisent autour du corps glissant d'Antarès, mes poumons crachent le feu, mon coeur cogne comme un fou dans ma poitrine et dans mes tempes.

Après une durée indéterminable, nous nous échouons sur la terre ferme. Je ne sais pas où, si ce n'est sur une plage. Je tente de retrouver mon souffle et de sentir de nouveau mes mains et mes pieds. Et enfin je me permets de me retourner sur les précédents évènements. Les deux dernières journées ont été longues et assez traumatisantes pour quelqu'un de normalement constitué. Je n'ai tenu le coup uniquement parce que j'étais plongée dans une rêverie éveillée.

Mais maintenant que ma montée d'adrénaline est terminée, la réalité me tombe dessus et j'éclate en de violents sanglots la tête dans le sable.

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