20. Bataille final

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Depuis hier après-midi, Kolrarid n’avait pas bougé de son appartement. Quand Ethan lui avait balancé tout ce qu’il lui avait dit en pleine gueule, c’était comme si le temps s’était arrêté pour le démon. Depuis, il n’avait pas réussi à bouger. Se retrouvant simplement à terre, dans son salon, comme si ses forces l’avaient abandonnée. Se rappelant seulement que les larmes coulaient et que son cœur était si douloureux que respirer était devenu une torture. C’était comme si l’eau bénite était à nouveau dans ses veines, ayant atteint l’organe vital pour le faire enfin s’ébranler et abandonner.

Il n’était que plus bas que terre. Il avait tout raté. Avait-il mérité ses châtiments ? Ethan disait-il vrai ? Aurait-il pu réellement empêcher ses anges guerriers de l’emmener ? Pourtant, dans ses souvenirs lointains, le démon s’était battu bec et ongles, mais ses adversaires avaient été les plus forts. Il s’était alors retrouvé prisonnier de la personne qu’il détestait le plus. Ténébrays, qui l’avait petit à petit brisé. Pourtant, son esprit n’avait toujours été que tourné vers Camille. Il n’avait rien lâché mentalement.

Malgré tout, entendre ça… D’Ethan, qui n’était, qu’un agrégat de l’homme qu’il avait aimé… Faisait terriblement mal…

C’est alors que quelqu’un frappa à sa porte. Il n’y prêta pas attention. Il n’était clairement pas en état de recevoir qui que ce soit. Même Ethan… Sauf que la personne derrière la porte continua à tambouriner, comme si sa vie en dépendait.

— Bordel, mais laissez-moi !!… Hurla alors le démon, complètement avachi au sol.

— C’est Jack ! L’ami d’Ethan ! Ouvrez-moi ! Il est arrivé quelque chose !!

Alerté par le ton paniqué du garçon, Kolrarid se leva pour aller lui ouvrir. Comment ça, arrivé quelque chose ? Sans lui laisser le temps de parler, Jack entra en trombe dans l’appartement pour s’asseoir sur le canapé. Il avait les larmes aux yeux et était blanc comme un linge.

— Je suis venu le voir et… euh… Dans sa chambre… Il n’y était pas… À part des vêtements déchirés… Du sang… Et ça…

La voix de Jack tremblait tellement… Tout comme ses mains. Kolrarid s’assit près de lui pour lui frotter le dos. Il était devenu bien plus alerte en comprenant ce qu’il essayait d’expliquer. Ethan avait disparu. C’était grave. C’est alors que son ami sortit de sa poche… Une plume noire.

Ce fut le choc pour Kolrarid. Une plume noire… Un ange déchu ? C’était quoi ce bordel ? Il n’y comprenait rien. Alors, il la prit délicatement des mains de l’humain.

— Il m’a dit qu’un ange aux ailes noires le menaçait s’il ne te brisait pas le cœur.

— D’accord… Je comprends mieux ses dires d’hier… Mais… vu sa disparition, ses actions n’ont pas dû satisfaire le déchu…

— Déchu ? C’est un ange déchu alors ?…

— Oui… Comme Camille avait fini par le devenir… En me côtoyant.

Ses souvenirs concernant le noircissement des ailes de son aimé lui revinrent. Cela avait été violent et à la fois tendre…

— Rassure-toi Jack. Ethan n’est pas mort, ce qui est un bon point… annonça Kol' le ton un peu froid.

— Quoi ? Mais comment tu peux le savoir ?! s’énerva-t-il.

— Parce que je suis lié à Camille. Je l’aurais senti dans l’instant qu’il avait été complètement tué.

Cette phrase sembla achever Jack qui accepta sans broncher ses dires. Après tout… Il voulait tout faire pour retrouver son ami.

— Bon, je vais faire mes petites recherches. Toi, va gérer sa mère, par contre, j’aurais sûrement besoin de ton aide plus tard.

Après ça, il quitta directement l’appartement pour aller trouver des contacts. Il avait besoin d’un coup de main. Il avait du flair, mais ne pouvait pas pister l’odeur d’un ange déchu. Celle-ci était particulière, ce n’était pas celle de Camille, il le savait, mais devait tout faire pour retrouver Ethan. Même altérer son corps si besoin.

Alors il parcourut la ville pour trouver les démons qu’il avait dans ses contacts depuis son évasion de l’Enfer. Il avait réussi à trouver des démons qui comme lui étaient contre Lucifer et surtout Ténébrays. Cette petite population bien cachée comprenant aussi d’autres démons en disgrâce l’aidait souvent. Se rendant dans un égout de la ville pour tomber sur une sorte de petite ville souterraine, il arriva dans un petit sas qui lui permit d’être dans une sorte d’antichambre, avec une femme devant lui, derrière une table. Une femme très fine à la peau noire, aux cheveux et aux yeux blancs. Il sortit la plume, pour la déposer devant elle.

— Alors Kolra' chérit… On ne dit plus bonjour ?

— Astrid, je n’ai pas le temps. Vraiment…

— Bien… Oh ? Une plume de déchue… Tu voudrais le pister ? Il t’a volé quelque chose ?

La main du démon tremblant d’énervement. Son tatouage bougeait sous son pull.

— Ouais… On peut dire ça… Utilise ton pouvoir sur moi.

— Tu sais bien ce que ça va impliquer… Un coût élevé. Tu n’auras plus aucun odorat après ta chasse…

— M’en fiche putain !… S’énerva le brun, sur le point d’exploser.

— Oh… Je vois, c’est de ce Camille dont il est question ? Tu l’as enfin retrouvé ?

— O.… oui…

La démone esquissa un sourire satisfait. Elle se leva, pour prendre la plume entre ses mains. La réduisant en poussière, pour venir souffler la poussière de plume dans le nez et au visage de Kol', alors que ses yeux blancs se mirent à scintiller. Le démon tomba au sol en gémissant de douleur. Le pouvoir d’Astrid était la modification des êtres. Que ce soit des démons, des anges, ou des humains. Mais jamais sans contrepartie.

Une fois la douleur de passer, Kolrarid se releva. Ses yeux rouge luisant et son regard étaient durs. La seule odeur environnante qu’il percevait était alors celle de la plume qui emplissait son nez.

Sans remercier Astrid, il sortit de l’égout, pour finalement rejoindre Jack devant chez la mère d’Ethan. L’humain ayant réussi à convaincre la dame de ne pas appeler la police. Tant mieux, si les humains s’en mêlaient, ça allait être une véritable hécatombe. Car le démon était bien parti pour arracher les ailes de ce petit déchu de merde.

Il finit en voiture avec l’humain, pour partir à la recherche de leur ami commun. Parcourant presque toute la ville pour finalement trouver l’endroit ou l’odeur était la plus forte. Ils étaient arrivés dans un coin de la ville un peu abandonnée, du côté d’un terrain appartenant à la SNCF, ou ils entreposaient les wagons en retraite. Il y avait des rails rouillés à perte de vue, tout comme d’innombrables wagons de différentes époques.

— Bon, reste ici au volant.

— Quoi ?! Non ! Je viens avec toi ! s’énerva Jack.

— Non. Tu n’as pas besoin de voir ça, et s’il faut partir en catastrophe avec Ethan, tu seras prêt.

En vérité, Jack savait que le démon avait raison, mais l’inquiétude était grande. Alors finalement Kolrarid partit seul, pour arriver devant un wagon qui sentait le plus fort. Il y entra, ayant bien écouté, il n’y avait pas l’air d’avoir les traces de ce d’échu. Alors il marcha entre les sièges, pour finir par entendre quelqu’un frapper à la porte des toilettes. L’ouvrant, il tomba soulagé sur Ethan, qui semblait attaché par les mains à la barre en métal qui permettait les clients de la rame de se lever. Il avait les larmes aux yeux et ceux-ci étaient rouges.

— Kolrarid ! Tu es là !… Finis par dire l’intéressé totalement paniqué.

— Tout va bien ? Il ne t’a rien fait ?

— Je… Je ne sais pas trop… Enfin, non rien. Il m’a juste attaché pour que je ne m’enfuie pas…

Avec lenteur et douceur, le démon défit les liens avec application. Celui-ci vint instantanément se blottir contre lui, les larmes aux yeux.

— Je suis désolé !… Tellement désolé !… Mais il disait qu’il tuerait ma mère et Jack si…

Kolrarid posa une main dans son dos pour le rassurer.

— Ne t’en fais pas, je sais. Jack m’a tout expliqué… ponctua-t-il en lui souriant tendrement, entre amour et tristesse ?

Le démon essayait de ne pas trop montrer son attachement pour lui, car il ne savait pas si tout ça était réel. Si Ethan allait quand même s’attacher à lui plus tard, ou non… Autant ne pas se bercer d’illusions maintenant, car il avait besoin de toutes ses forces. D’ailleurs, le garçon le fixa d’un air presque inquiet.

— Tes yeux… Ils…

— Oui, c’est normal. C’est parce que j’utilise un pouvoir particulier…

— Ah oui ?… Lequel ?

— On a modifié mon odorat pour pouvoir pister l’odeur du déchu…

Ethan analysa la nouvelle, mais il avait l’air un peu perdu. Sauf qu’un rire sadique se fit entendre. Kolrarid se retourna, pour voir au bout du wagon côté sortie, l’ange déchu lui barrer la route. C’est alors qu’il le reconnut instantanément…

— Boris… Pourquoi je n’y avais pas pensé… avoua-t-il à demi-mots.

— Parce que tu es aveuglé par l’amour… Et la haine, mon cher Kol »…

— Qui est-ce ? Vous vous connaissez ? demanda alors Ethan.

Kolrarid le fit doucement s’asseoir sur un siège pour le faire sortir du placard servant de sanitaire à ce vieux wagon. Il avait l’air mauvais et la colère montait en lui au fur et à mesure.

— Oui… C’est un espion de Lucifer qui est en place au Paradis… Je le voyais souvent pendant ma captivité en Enfer… C’est Lucifer qui t’envoie, pas vrai ?

— Oh que oui ! Et il s’amuse drôlement de jouer avec tes sentiments mon cher Kolrarid… Il veut te voir souffrir, s’y souffrir que tu reviennes à lui en rampant…

Le démon aux yeux rouges reprit Ethan par la main, pour l’amener près de lui. L’embrassant alors avec passion, une larme perlant sur sa joue.

— Quand je t’aurais lancé… Cours… Cours sans te retourner jusqu’à l’entrée du cimetière. Jack t’attend. Et partez.

— Mais… murmura-t-il ?

Sans prévenir, il lança le garçon à travers une fenêtre ouverte du wagon, alors qu’il faisait face à l’ange. Son tatouage s’anima d’un coup pour venir s’étaler sur tout son corps et sa transformation s’opéra. Ce n’était pas optimal. Car sa tête touchait presque le plafond et que les sièges le gênaient énormément. Il ne savait pas s’il allait réussir à le tuer et lui arracher ses petites ailes, mais il allait tenter le tout pour le tout. S’élançant en courant et en grognant, pour abattre ses poings sur la poitrine de l’ange.

La bataille s’engagea alors qu’Ethan atterrit au sol en gémissant de douleur. Baissant la tête en entendant le vacarme provenant de son ancienne geôle. Se tâtant pour confirmer qu’il n’était pas blessé, il se mit à courir pour rejoindre Jack, qui s’apprêtait à démarrer la voiture.

— Non attends ! Attendons un peu ! S’il te plaît…

Son ami abdiqua, trop heureux de retrouver Ethan en un seul morceau. Alors que dans le wagon, le combat s’annonçait victorieux, sauf que le démon savait potentiellement qu’il n’y survivrait pas.

Au bout de bien vingt minutes de combat acharné et le wagon presque dévasté, Kolrarid arriva à se glisser dans le dos du d’échu pour attraper une première aile, l’arrachant avec ses crocs. Puis la seconde, dans un hurlement de Boris. Victorieux, il se laissa tomber à genoux pour finir par se relever, pour s’en aller d’ici et retrouver Ethan. Il voulait absolument savoir s’il avait pu s’enfuir. Mais malheureusement, Boris n’était pas mort. Il tira un jet de lumière en plein dans le dos du démon qui tomba au sol en crachant du sang, alors que le déchu tomba en poussière, succombant à ses blessures.

Lui était au sol, sous sa forme humaine, le plancher se recouvrant de son sang petit à petit. Il le savait. Il avait su qu’il allait mourir par ce combat. Sans jamais pouvoir retrouver pleinement Camille. Pourtant, il se consola du fait qu’il avait pu passer du temps avec Ethan et qu’il avait malgré tout retrouvé le nouveau cycle de l’ange qu’il avait aimé comme un fou. Pour qui il avait tout tenté, tout fait, pour arriver à l’aimer sans barrière aucune ?

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