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  Xaan et sa partenaire sortirent vainqueurs de l’univers maîtrisé de justesse. Sa coéquipière l’avait retardé en se faisant bêtement prendre dans un piège, pourtant évident. Quand il y repensait, l’assassin avait envie de l’étriper et de la pendre à un arbre.

Lorsque Talin les téléporta hors du ravin où ils étaient arrivés, ils se retrouvèrent à l’orée d’une forêt sombre et brumeuse qu’ils durent traverser. En chemin, ils tombèrent dans une vaste clairière où ils eurent le plaisir de retrouver quelques couleurs dans ce monde en noir et blanc, ainsi qu’un portail de transport. L'assassin sentit tout de suite l'arnaque. Sa partenaire pas du tout. Elle fonça sur l’illusion tandis que le jeune homme prenait ses précautions sans avoir le temps de la prévenir. Il resta donc à l‘abri des arbres, à l’affût. Mégane traversa le portail et se retrouva piégée au même titre que les candidats précédents. Xaan resta à couvert et attendit que les auteurs de ce piège sortent de leur cachette.

  Quatre hommes s'étaient alliés. Talin aurait facilement pu s'en débarrasser. Deux avaient des allures de barbares, vêtus de manteaux en peau de bêtes, les deux autres semblaient tout droit sortis d'une cour royale xylienne. Le plus petit répondait aux ordres du plus fardé.

 « Hé ! Hé ! Hé ! ricana le premier barbare en entrant dans le champ de vision de Xaan. Tu en veux des imbéciles sans cervelles ! Mok ! Regarde-moi ça ! Quelle belle brochette d’idiots !

 — Gudh ! Je crois qu’a un problème, répondit le second barbare visiblement un peu lent d’esprit. Je crois qu’en manque un, Gudh.

 — Vous n’êtes donc pas capable de faire les choses correctement ? Notre alliance ne tient plus, vous n‘aurez pas votre argent ! Montä ! Nous partons.

 — Oui, Monsieur le Comte.

   Les deux brutes ne furent pas d’accord avec la rupture du contrat et une dispute éclata. Le gentilhomme et son moucheron de valet se rapprochèrent à reculons des arbres où se tenait Talin. Les barbares les effrayaient en les poussant dans la gueule du loup.

  L'assassin attendit le bon moment pour frapper. L’arme au poing, il assomma le noble avec un grand coup de garde, et son serviteur juste après avec un méchant coup de coude. Pour les deux brutes, ce fut plus problématique. Question de taille. Les deux barbares étaient vraiment grands et larges, et loin d’être patauds malgré les apparences. L’un sortit un gourdin, l’autre une arbalète primitive. Xaan fut aussitôt sur le qui-vive.

 « Vise le cœur, Mok, on n’a pas de temps à perdre.

 — Mais, Gudh, je crois qu’a pas droit de tuer, Gudh.»

   Là résidait le problème pour tous les trois. Talin se redressa pour paraitre moins inquiétant et demanda simplement aux barbares :

 « Qui maintient le faux portail allumé ?

 — C’est nous ! » répondirent-ils en chœur, prêts à en découdre.

   Un miroitement éphémère attira son regard quand ils se mirent en position de défense. Talin entrevit les médaillons que portaient les deux brutes. Des pierres bleu marine les sertissaient. L'assassin percevait l'essence magique des cristaux. Était-ce la réserve énergétique de leurs sorts ? Les deux brutes n'avaient pas l'air rodés aux sortilèges complexes.

   Sans s’appesantir sur d’autres hypothèses, Xaan se téléporta devant le dénommé Gudh et brisa le médaillon d’un coup de lame bien placé avant de battre en retraite par une nouvelle téléportation. Aussitôt l’illusion disparut et les candidats emprisonnés apparurent. Enfermés dans des bulles individuelles de la même couleur que les médaillons, ils criaient à l’aide ou reposaient inertes au fond de leur cellule. Avaient-ils manqué d’air ? Xaan se demanda si c’était le sort qui attendait sa partenaire, non sans un certain petit plaisir sadique.

   Xaan revint brusquement à la réalité quand le gourdin lui frôla le crâne. Il esquiva le coup uniquement grâce à ses réflexes. Devenu méfiant quant à la rapidité de ses adversaires, Talin se téléporta dans le sous-bois feuillu au moment où la flèche de l’arbalétrier allait lui transpercer la poitrine. Celle-ci se ficha dans le gourdin de Gudh qui ne manqua pas de crier sur son partenaire. L'assassin apprit ainsi qu'ils étaient frères et décida de leur poser quelques questions, tout en se déplaçant aléatoirement par téléportation pour les déboussoler. Ils y répondirent en cherchant à se repérer avec la voix de leur adversaire. Le gain de temps permit à Xaan d'élaborer une stratégie, tout en apprenant à cerner le caractère des deux barbares. Talin se téléporta une dernière fois juste sous le nez des frères Quichekov -sérieusement, qui osait porter un nom pareil- et leur fit la proposition suivante :

 « Si vous relâchez ma partenaire, nous pourrons franchir le vrai portail tous les quatre et gagner la partie. Qu'est-ce que vous en pensez ? »

  Cela valait la peine d’essayer. Ils n'avaient pas l'air si stupides. Enfin, devant leurs regards interrogateurs, Xaan s’expliqua :

 « Il vous suffit de libérer ma partenaire et on aura pile le nombre de personnes pour terminer l’épreuve. Vous pouvez même passer le portail en premier. Il n'y a aucun problème. Alors ? »

  Mok et Gudh se regardèrent un moment. Ils hochèrent la tête après un petit conciliabule à mi-voix et les trois hommes s’approchèrent des cages. Celui qui avait son médaillon intact passa la main au-dessus et la bulle de Mégane disparut. Elle chut lamentablement et s'écrasa comme une poupée de chiffon. Talin l’aida à se relever et le trajet jusqu'au vrai portail commença.

   À leur sortie de l’univers, Maître Raphaël vint les féliciter et les libérer. Ainsi, l’assassin put faire son rapport à Hevlaska qui le félicita à sa façon.

  « Ce n'est pas vraiment ce que j'avais imaginé, mais pas mal. »