Au nom du ciel [9/9]

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  La Sainte reprit possession de son enveloppe charnelle après une nouvelle vision. Depuis qu’elle s’était nourrie des figues d’Ion, elle voyait plus loin et plus souvent ; c’est-à-dire qu’elle percevait la destinée de personnes qu’elle ne touchait pas, qu’elle ne connaissait pas et qui vivaient à des milliers de kilomètres de Naguilé.

  Comme ces visions se produisaient n’importe quand, Astralia prit l’habitude de ne plus quitter le pavillon. C’était plus sûr étant donné que durant celles-ci, son corps ne lui répondait plus. Le plus souvent, elle se réveillait au sol. Au bout de deux jours, elle était couverte de bleus. Ces derniers disparaissaient rapidement si elle se nourrissait convenablement mais elle préférait éviter de maltraiter son corps. Ainsi, Astralia demanda aux prêtres de Taïdane de faire pousser des figuiers d’Ion dans la cour. Il lui suffisait alors d’en cueillir dès qu’elle en avait besoin.

   Les choses étaient plus simples ainsi. C’était rassurant, même si tout le monde semblait attendre qu’elle fasse des miracles. Ce qui n’était pas prévu au programme. Elle était toujours dans l’attente du signe dont elle ignorait la nature, et qui la conduirait à prendre la route pour une destination, qu’elle ignorait également.

   Revenant à ses visions, Astralia remarqua qu’elles concernaient principalement sept personnes. Elle entreprit donc de noter et classifier tout ce qu’elle voyait afin de s’y retrouver plus facilement. Elle data chaque événement perçu et décrivit chaque individu au centre de celui-ci. Elle n’avait pas encore saisi l’identité de chacun mais cela ne saurait tarder au rythme de ses visions. Cela n’était pas toujours agréable à voir. Certains vivaient des choses effroyables. Guerres, deuils, séparation, sacrifice... Cette fois-ci, cela concernait la fillette aux cheveux bleus. La jeune fermière vivait dans un vallon non loin de la frontière aptane avec ses parents adoptifs. Sa vie n'était pas en danger mais son existence connaîtrait un bouleversement important suite à un enchaînement d’événements dont la cause était encore inconnue à la Sainte.

  Il y avait encore tant de choses qu’elle ignorait. Ce n’était pas faute d’en apprendre toujours plus avec Fonaï. Astralia ferma le carnet après avoir noté tout ce qu'elle pouvait puis elle se rallongea sur l’autel-lit. Les jours lui paraissaient de plus en plus longs. Les nombreuses visions la fatiguaient. Elle connaissait si peu de répit que c’en était exténuant.

 « Et ce n’est que le début ! lui zozota Fonaï en venant se poser tout près de sa main. Attends un peu que les Descendants s’éveillent sans que tu les aies rejoints. Ce ne sera pas beau à voir.

 — Je te remercie pour tes encouragements. C’est très délicat de ta part.

 — Autant que tu le saches. Ça va empirer jusqu’à ce que tu accomplisses la première partie de ta mission.

 — Comment ça : la première partie ?

 — Tu es une Sainte et une descendante de lignée divine. Ne crois pas que tu feras seulement la moitié du travail ! Une fois que tu auras rassemblé tous tes compagnons, tu te battras au même rang qu’eux. D’ailleurs, je me demande si tu seras toujours une Sainte. J’ai hâte de le savoir. Pas toi?»

  Astralia le dévisagea avant de secouer la tête. Elle se sentait partagée par cette nouvelle, entre le soulagement de ne porter cette charge qu’un temps et la peur de recevoir une responsabilité encore plus importante.

  Pour échapper à ses questionnements, Astralia ferma les yeux et se laissa aspirer par les énergies qui l’entouraient pour se fondre en elles et avoir un aperçu de tout ce qu’il se passait au Panthéon. Cette capacité était plutôt amusante quand on se focalisait sur certaines personnes. Même si cela avait tendance à lui donner la nausée quand elle revenait à elle.

  Fonaï retomba inerte quand Jorangu pénétra dans le pavillon. Il venait quotidiennement visiter sa fille sans grand résultat. La plupart du temps, Astralia n’était plus vraiment présente et Jorangu repartait plus désespéré que rassuré de son retour des Jardins Célestes. Le vieil homme faisait presque de la peine à Fonaï. Il croyait encore que sa fille était humaine. Il avait bon espoir que les dieux se soient trompés et lui rendraient sa Lysa. S’il savait ! À la place d’Astralia, Fonaï aurait déjà avoué au vieil homme que ce qu’il restait d’humain en elle était mort quand elle avait été convoquée par la Déesse-Lune. Mais il ne lui appartenait pas de le faire.

  Après réflexion, Fonaï se dit qu’Astralia n’en avait peut-être pas encore pleinement conscience. Voire pas conscience du tout. Espérons qu’elle l’apprenne rapidement.

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