4 – En elle était sa vie

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Une plaine démesurée s’étalait sous mes yeux, un calme désarmant, antagoniste parfait du concert dissonant vrillant précédemment mes sens, s’y abattant avec force. Aussi désuète pouvait-elle être, une pierre se dressait au loin. Sur celle-ci, la raison de ma déchéance, l’échéance de ma déraison.

Je m’approchais d’elle. Dans son regard combattaient surprise et peur. Dans un instant, la curiosité parait l’effroi et fonçait droit sur moi. Couvé de son attention je me senti vivre à nouveau. Tout me revint alors comme des souvenirs lointains partagés, alors que seulement tant fantasmés. La tendresse de ses paroles m’effleurait quand elle respirait. La douceur de ses doigts m’étreignait quand elle soupirait.

Oh que j’avais tord ! Pire douleur que sa méconnaissance existait donc ! Quelle affliction de n’être qu’à quelques pas sans pouvoir succomber instantanément. Si souffrant je fut après ma chute, l’envol de mon amour me consumait si lentement l’âme que j’en sentais chaque fibre se déchirer lentement sous sa chaleur ardente. Ses yeux d’ambres me jugeaient si sévèrement de son incompréhension et tout mon corps était contraint d’un frémissement d’effroi.

Qu’avais-je osé ? Envahir son monde sous prétexte de mon propre égoïsme ? De quel droit ? De celui du Divin, dont j’avais abjuré par faiblesse ?

Une telle désolation s’emparait de moi que tout mon être vibrait d’un profond chagrin causé par ma seule faute. Celle de n’avoir considéré que mon avarice, à défaut du bonheur de la personne que je prétendais tant chérir.

Une colère personnelle, interne, tournée contre ma seule nature, grondait et grandissait dans mon ventre. Amertume, frustration, violence, haine s’y déchaînaient. Tant de ressentiments, alors encore totalement inconnus, prenaient en possession la moindre parcelle de mon âme. Un voile sombre descendait sur mes iris, recouvrant mes pupilles d’un flou m’entraînant toujours un peu plus dans les méandres de mon désespoir.

Une chaleur s’éveillait alors dans mon bras, persuadant de justesse mon esprit de ne pas s’abîmer davantage. Lui permettant de retrouver la surface, quelques secondes. Mon souffle se perdit. J’étais incapable de réagir, d’interpréter les évènements qui se déroulaient devant moi. Il me sembla tout d’abord que le temps perdit sa fluidité habituelle. Mon regard fut alors happé par un mouvement d’une couleur orangée, m’apportant une vive émotion de chaleur, de réconfort, de confiance. Je baissais les yeux et trouvais instantanément les siens, subtilement dorés, légèrement incandescents terriblement envoûtants. Ses ailes nous enveloppèrent, leurs pointes se posant où jadis se naissaient les miennes. Sa main, responsable de la douce chaleur salvatrice, remonta lentement et trouva une place comme prédestinée sur mon épaule. Avant que je n’esquisse la moindre initiative, mon corps, encore douloureusement contraint par le supplice précédent, rompit son silence et réagit à l’aventure que lui proposait la créature qu’il avait tant désiré. Ma main vint alors doucement se poser sur sa joue dont j’avais rêvé d’innombrables fois la douceur. Le contact, alliance tendre d’électricité et de fraîcheur, m’enleva un hoquet, malicieusement acceuilli par le sourire de ma partenaire. Mon esprit ne fonctionnait plus, Imbibé des passions, des désirs et des d’attentes que je réfrénait depuis une éternité. Sans défense aucune, je me laissait aller à ce bien-être indescriptible qui s’emparait peu à peu de moi. Imperceptiblement, interminablement, ses lèvres approchèrent les miennes. Soucieux de ne pas gâcher la magie du moment, je ne put pourtant me résoudre à attendre plus longtemps. Nous visages s’effleurèrent.

Nos bouches se rencontrèrent et se donnèrent timidement l’une à l’autre. Nos âmes s’abandonnèrent et se perdirent dans un infini euphorique, dans une grâce mystérieuse et sublime d’un baiser vécu par des natures contraires. Une caresse d’extrême douceur m’étreignit tandis qu’un frémissement parcouru sa peau pourtant si chaude. Son enivrant parfum fut telle une aubade au désir dont je ne saurait me défaire. Sensuellement, lentement, je m’aventurais vers son cou afin de me délecter de la suave saveur. Je me nichais en son creux et sa tête s’inclinait en arrière. Ses joues du rouge prenaient la couleur tandis que j’y déposais d’imperceptibles baisers. Attentifs à l’autre, nos corps tendus, prêts à céder à un nombre incalculable de douceurs, nos souffles se calèrent à l’unisson de notre passion, vers un amour intemporel, entre plusieurs mondes, dont on fera le nôtre.

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