Chapitre 46G: Théodée ⚠

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Le cocher arrêta son cheval sur une route pavée et légèrement pentue bordée de maisons mitoyennes, et nous n'eûmes qu'à la traverser pour pénétrer dans une ruelle sombre et accéder à l'entrée de leur logement, au fond de l'impasse. Je laissais mon fils frapper deux coups contre la porte de bois, et nous dûmes attendre longtemps avant qu'une bonne habillée de blanc et de noir ne vienne nous ouvrir.

—''Monsieur, madame, qui dois – je annoncer?

—''Léon – Paul et Louise Aubejoux je vous prie.

La domestique prévenait le propriétaire de notre arrivée, et nous entendîmes les pas rapides de monsieur Guedon dans les escaliers. Il serrait chaleureusement la main de mon fils et s'inclinait devant moi, non pas par quelconque soumission, mais par respect. J'éternuais et nous entendîmes des cris de bébé venant d'en haut.

—''Oh... Veuillez – m'excusez.

Sans avoir l'air d'entendre mes confusions, il nous conduisit à l'étage. Un grand palier desservait quatre pièces. Nous suivîmes monsieur Guedon jusqu'à la chambre conjugale, où la jeune mère allaitait son nouveau – né, assise dans un grand fauteuil. En nous voyant, elle arracha l'enfant de son téton qu'elle cacha bien vite en reboutonnant sa robe. Le bébé se remettait alors à pleurer, et elle le berçait en venant nous saluer.

—''Bonjour docteur Aubejoux. Veuillez m'excusez, se tournait t-elle vers moi, votre prénom ?

—''Louise.

Pendant que nous continuâmes la visite, je la sentais hésitante. Elle profita d'un instant de blanc pour demander à Léon – Paul.

—''Pourriez – vous examiner mon fils ?

—''C'est que je n'ai pas apporté mon matériel... Regrettait t-il

— '' Ça ne fait rien. Suivez – moi.

Elle le conduisit dans la chambre où je les suivais. Théotiste allongeait son nouveau – né sur le lit, et elle le déshabillait de ses langes. Le docteur observait et examinait le petit bout de chair noir qui dépassait encore du nombril, en s'exclamant.

—''Il faut nettoyer le cordon tous les jours, à l'eau clair.

La jeune maman hochait la tête.

—''Quel âge a t-il ? Demandais – je devant ce tout – petit gigotant

—''Neuf jours. Je suis sortie de couches hier.

Léon – Paul continuait son examen de l'enfant, avant de s'arrêter.

—''Oh mais ce n'est pas joli ça... Je n'avais pas vu.

—''Oui, c'est pour ça que je vous ai demandé de l'examiner. Vous croyez que c'est grave ?

Henri s'était approché, il se tenait debout contre le cadre de la porte, observant le médecin.

Je m'adressais à lui.

—''N'avez – vous pas un autre enfant ?

—''Si, mais elle dort. Que se passe t-il docteur?

—''Votre fils à un sérieux problème d'intimité.

On tenait les jambes du nouveau – né écartées pour que son père puisse voir. Le capuchon était gonflé et violet.

—''Pleure t-il lorsqu'il fait ses mictions ?

—''Oui, énormément. Mais c'est de ma faute...

Léon – Paul la regardait avec insistance pour en savoir plus.

—''La sage – femme m'a montré comment rabattre son capuchon pour nettoyer en dessous. Ce matin, pendant son bain, j'ai essayé seule pour la première fois, mais n'y arrivant pas, j'ai un peu trop forcé. Son intimité s'est soulevée et il a hurlé. Depuis, c'est gonflé et j'ai l'impression qu'il souffre terriblement. Surtout lorsqu'il urine.

—''Ne vous inquiétez pas, un enfant de cet âge ne ressent pas encore la douleur. En revanche, si vous devez avoir d'autres grossesses, changez en, car n'importe quelle praticienne ayant un minimum d'instruction saurait qu'on ne rabat pas le capuchon des nouveaux – nés mâles.

Les deux médecins se grattaient la tête, ne sachant pas trop quoi faire pour soigner cet enfant. En entendant les gazouillis désespérés de sa fille depuis une autre pièce, Théotiste nous le laissait un instant. Cinq minutes plus tard, elle nous présenta dans ses bras son aînée de treize mois.

—''Voici Henriette.

Nous embrassâmes la petite fille aux boucles châtains et aux joues chaudes avant que sa mère ne la confie aux bons soins de la domestique. Léon – Paul palpa, tâta et se tourna vers son collègue en soupirant.

—''Le risque, si on ne fait rien, c'est la gangrène.

Monsieur Guedon regardait Léon – Paul non plus comme un médecin, mais avec des yeux inquiets de père. Son épouse, assise sur le lit, caressait doucement le ventre du bébé, le regard suspendu à ceux des deux hommes. Les yeux de mon fils passaient rapidement de l'enfant aux parents et il déclarait:

—''La seule solution envisageable serait de l'opérer.

Théotiste regarda son mari, avant d'adresser sa confiance au jeune homme.

—''Faites docteur. Sauvez mon fils.

Monsieur Aubejoux et monsieur Guedon partirent s'isoler dans le couloir pour discuter sans inquiéter la mère. Au bout de dix minutes, pendant que le docteur Guedon descendait, Léon – Paul s'asseyait au bord du lit près de Théotiste, visiblement très inquiète.

—''Je vous préviens que ce sera pour moi difficile d'opérer un si petit enfant, mais nous avons discuté avec votre mari, qui se sent incapable de tenter cela sur son fils en sachant que toute manière si rien n'est fait, il est condamné à court terme. Souhaitez – vous assister à l'intervention ?

—''Je vais rester près de lui pour le rassurer et le calmer.

—''D'accord. En attendant, il faudrait qu'il urine pour éviter une catastrophe pendant l'opération. Pouvez – vous vous en occuper ?

Le médecin s'en alla et la jeune femme se tourna vers moi en souriant.

—''Savez – vous comment l'on fait uriner un bébé ?

Nous lui massâmes le ventre, et Théotiste lui donna à plusieurs reprises son sein.

—''Allez bonhomme, on fait pipi.

Un quart d'heure plus tard, le petit garçon se mettait à pleurer, devenant rouge. Il effectua avec difficulté ce que nous attendions de lui.

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