Chapitre 25D: juillet - septembre 1775

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Ayant de nouveau considéré à quel point il me manquait, je lui répondais, triste.

Mon cher Mathurin,

Léon-Paul marche depuis six mois environ, je ne vous remercierais jamais assez de vous impliquer dans la vie de votre fils, qui avait des étoiles plein les yeux lorsqu'il découvrait sa draisienne, depuis il fait des tours et des tours dans le village, les autres enfants sont jaloux, je le sais, mais j'aime tant mon petit rouquin… Il est si beau notre enfant, du haut de ses deux ans, il parle désormais, et je tente de lui retirer ses langes, c'est un peu compliqué je vous l'accorde. J'attends un enfant pour le mois de février, mon petit Simon est mort le vingt juillet d'une forte fièvre, j'en suis perturbée, mais mon époux est catastrophé, il se demande s'il pourra avoir un vrai héritier, car figurez-vous qu'il ne veut pas de Léon – Paul comme son successeur. Je ne sais quels motifs l'encourage à ne pas vouloir de lui, mais je n'aime pas ces mots, en tant qu'aîné, j'espère de tout mon cœur qu'il accédera à l'héritage. Imaginez un aîné qui n'a pas le droit à l'argent de son père ! Il m'a menacé, alors que je n'y suis pour rien, de partir si le prochain enfant était une fille, je pense qu'il ne partirait pas, ou plutôt il me convaincrait d'avoir un autre enfant, bien sûr, comme il dit toujours '' je ne vous force pas'', non il ne me force pas, il m'incite fortement avec pression, c'est sûr que c'est subtil. Comment vous portez – vous ? L'épouse de Jules est -elle toujours en bonne santé ? Je la savais fragile, n’est-elle pas abîmée par ces deux grossesses rapprochées ?

Sur ces mots je vous dis à bientôt,

Louise.

Chère Louise,

Depuis le temps, je suppose que votre santé et celle du petit rouquin n'a pas changé ? Concernant Sophie, j'ai pris après beaucoup de réflexion la décision de la répudier, elle est vraiment terrible, mais je modérerais mes propos auprès de la famille, pour ne pas lui donner un handicap pour la suite, elle a gagné si elle espérait me faire craquer, mais je crains qu'elle ne reste désormais célibataire. La réaction de ses parents fut d'abord une indignation, puis avec mon argumentation ils me crurent, et nous allâmes ensemble rompre le contrat à l'église. J'épouserais donc en janvier Augustine, sa sœur, qui est plus mature, dont la petite fille d'un an, Madeleine, me paraît très mignonne. Rassurez-vous Louise, ce n'est pas un mariage d'amour, elle ne m'aime pas, mais juste des fiançailles pour l'aider elle et moi. D'après ce que je sais, Augustine a vingt – cinq ans, beaucoup plus adulte donc que sa sœur, elle était mariée depuis deux ans à un homme récemment décédé d'un accident de voiture. Son père a accepté de me donner sa main si j’assurais à Madeleine et Augustine une vie confortable, ce qui me paraît évident.

Mathurin

J'étais inquiète pour ce nouveau mariage, et si Mathurin avait répudié Sophie en sachant Augustine veuve, parce qu’il l'aimait ? Je me faisais beaucoup d'histoires, parce que j'avais peur de perdre avec la distance mon amour et le père de mon enfant. Le perdre aurait été pour moi l'effondrement d'un monde, rien n'aurait pu être pire pour moi.

Enfin en juillet, Léon- Paul se fit punir par Léon, car il ressassait avec trop d'insistance la mort de Simon, alors qu'il réclamait juste de savoir où était son frère. Je lui expliquais plus tard qu'il était malade et que l'on l'avait mis dans la terre, mais que Dieu l'avait pris sous sa protection.

En août, peu de temps après la rentrée des élèves, Gustavine rentra un soir et pour la première fois depuis son arrivée dans l'école en pleurant. Elle m'expliqua indignée que la bonne sœur l'avait punie avec ses amies car elle avait voulu poser une question à sa camarade, qui avait répondu trop fort. Sa punition était tout de même exagérée. Copier cent lignes '' je ne dois pas parler pendant la leçon sans demander la parole, en dérangeant mes camarades qui étudient et écoutent notre sœur chargée par Dieu et si bonne qui nous permet de suivre des études''. Elle se mit donc au travail durant deux bonnes heures, avec application sur la table du salon. Léon se fâcha le soir quand il apprenait ce que l'on reprochait à sa fille, selon lui Gustavine avait tort et ne devait en aucun cas contredire ce que la sœur lui disait. Sa camarade avait reçu la même sanction, une fille qu'elle n'aimait pas, qui n'avait d'après Gustavine que des défauts. Léon était de mauvaise foi et énervé en ce moment, je ne sais pas si c'était les grandes chaleurs qui faisait cela, mais il me tapait sur les nerfs!

Le mois d'août fut enjolivé par un progrès de Léon – Paul, qui acceptait, je ne sais pas pourquoi subitement, que je lui retire les langes et que je l'assieds sur le pot, même si je n'avais pas à le vider ensuite, puisqu'il préférait prendre son imagier, encore un de mes cadeaux, et le commenter à haute voix. ‘’ Un petit lapin, un petit chat, un petit oiseau… '' me laisser lui remettre un linge, et le salir tout de suite après. Il se moquait de moi, mais il était tellement mignon…

A la maison, nous étions sept, mon mari, moi, Gustavine, Caroline, Michel, Malou, Léon – Paul et bientôt un nouveau bébé. Les gens me prenait pour la mère de Gustavine, je savais que je faisais vieille avec mes cheveux blancs que je ne pouvais plus arracher tant ils devenaient nombreux, mais ces remarques me blessaient un peu. Devant le miroir, je voyais chaque matin une jeune femme vieillissante et abîmée.

J'étais débordée non seulement des tâches ménagères mais aussi des questions des cinq enfants, curieux, il y avait un peu de '' Pourquoi on existe ? ; de '' Pourquoi le ciel est bleu ?'' beaucoup de '' Quand vous étiez petite comment vous vous appeliez ? ; '' Pourquoi on est en 1775 et pas en dix – mille ?'' ; (Léon – Paul était venu me voir quand je cuisinais, les mains derrière le dos, il m'avait posé la question avant de repartir en courant sans même avoir eu sa réponse) ; '' Il habite où Dieu ?'', ''C'est quand que le petit frère il va sortir du ventre à maman?"

Toutes ces questions finissaient souvent en je ne sais pas Léon – Paul / Malou/ Caroline ou ce que je préférais : ''Vous m'en posez des questions, allez - donc voir dehors si Le Seigneur a les réponses.''

Malou fêta ses cinq ans le treize septembre, je lui rappelais qu'elle s'appelait Marie–Louise, ce prénom que nous avions oublié, que sa maman qui lui avait donné. Sur ses dessins, elle écrivait toujours son nom, Marie – Louise Meursault, puisqu'elle portait toujours le nom de famille de son père, dont je lui rappelais de temps en temps l'existence.

—''Non il n'est pas mort Malou, il vit toujours à Paris avec votre frère aîné Auguste, que je vous emmènerais voir un jour.

Malou avait certifiée à ses amies la mort de son père. D'une certaine façon, elle avait raison, dans sa vie, il était mort, puisqu'elle ne le voyait plus depuis le décès de sa mère, soit presque deux ans. Seigneur, je n’y croyais pas, cela faisait presque deux années que j'apprenais à vivre sans ma raison de vivre.

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