Chapitre 10D: mars 1761

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Camille m'envoya une lettre, en mars. Depuis le temps, j'eu un pincement au coeur tant cela me rappela à quel point elle me manquait.

Chère Louise,

Ne revenons pas sur le passé, c'est inutile et douloureux.

J'ai d'heureuses nouvelles à vous faire parvenir, tout d'abord, j'ai été sacrée meilleure élève de l’institution par la mère Supérieure et le corps enseignant, ce qui me vaut une médaille du mérite à accrocher sur mon uniforme. Ensuite, figurez vous qu'un mystérieux admirateur m'a fait parvenir des fleurs de sucre, voici quelques jours, si elles supportent le voyage, vous pourrez en déguster quelques-unes que je joindrais à cette épître, c'est délicieux !

J'ai une dernière chose à vous dire, particulièrement intime, soyez sérieuse pour une fois.

Hier matin en me levant, j'ai trouvé une immense tâche de sang sur mon drap, sang qui coule goutte à goutte, et en plus du mal de ventre terrible, cela m'inquiète beaucoup. J'ai défais et ceinturé mon drap pour limiter les dégâts, mais j'ai peur d'inonder ma chambre, que les autres se moquent et je ne sais pas comment j'irais en cours demain (nous sommes dimanche). Si vous pouviez demander conseil à Marguerite, et me répondre vite, cela me serait d'un grand soutien. Merci infiniment d'avance.

Camille

Assise en tailleur sur mon lit la lettre dans les mains, je demeurais effrayée. Le coeur battant et inquiète pour Camille, j'allais demander des réponses à tante Marguerite, dont la réaction me surprit.

— '' Ma tante ?

—''Que se passe t-il, Louise ?

—''J'ai un conseil à vous demander.

—''Allez y donc, arrêtez de tourner autour du problème.

—''Camille saigne et elle ne sait pas comment faire.

—''Comment cela elle saigne ? S’est-elle blessée ?

—''Je crois qu'elle a découvert cela le matin au réveil, il faut vite que je lui réponde.

—''Je n'en sais rien, demandez-lui de mettre des bandages, ou d'appeler un supérieur. Vous savez bien que depuis ici, je ne peux rien faire pour elle.

Comme je savais que je n'obtiendrais rien de plus de Marguerite, j'allais voir France qui endormait sa fille dans la chambre, et qui saurait assurément me répondre.

— '' France ? Camille m'a écrit, elle saigne, elle ne sait pas comment faire.

Elle quitta des yeux le berceau, dans la pièce sombre.

—''S'est-elle blessée ?

—''Non, le sang ne s'arrête pas de couler et elle a mal au ventre.

—''Je vois, donnez-moi votre lettre, je vais l'aider.

J'apporta donc le papier à ma cousine, qui alla s'asseoir au salon et écrivit longtemps, s'appliquant. J'adorais France, elle avait souvent la réponse a un problème.

Lorsqu'elle eu terminé, je pu lire ce qu'elle avait écrit.

Camille,

Depuis je vous ai envoyé la lettre, je ne sais comment vous vous êtes débrouillée, de façon rudimentaire je suppose. Votre sœur Louise m'a gentiment prié de vous aider à résoudre un problème que rencontrent la plupart des jeunes filles de votre âge, un problème handicapant si l'on ne sait pas comment y remédier.

J'ai cependant une méthode efficace et très discrète, qui va à coup sûr résoudre votre difficulté :

Prenez un linge solide et épais, roulez-le comme une corde et passez l’autour de votre taille, faites qu'il soit bien serré. Roulez et accrochez un second drap au milieu du premier, et faites tenir en son milieu une éponge, en faisant bien en sorte que tout reste bien serré. Rincez l'éponge toutes les deux ou trois heures environ, pour éviter les fuites. En cas de mal de ventre, appliquez une bouillotte ou un linge chaud sur la région douloureuse.

Si vous avez des questions, je suis disposée à vous répondre dans les meilleurs délais.

Bien aimablement,

Votre cousine France.

Camille répondit d'une courte mais bien compréhensible lettre.

Louise et France,

Merci de tout cœur pour les conseils que je suis bien, Louise, je vous prie de dire a France qu'ils m'ont été d'une aide précieuse. Pouvez-vous lui demander ce qui provoque ces saignements douloureux, car depuis quelques jours, ils ont complètement disparus.

Camille.

Je posais la question à France, mais elle me répondit clairement qu'elle n'avait aucune idée de ce qui les provoquait, tout juste savait-elle qu'ils étaient indispensables pour concevoir un enfant.

Étrange je trouvais la nature.

Suite à cet épisode, je me mis à avoir peur de saigner, que ce malheur m'arrive, tellement sale et handicapant. Mais je repensais par la suite à ce que France m'avait dit, que cela n'arrivait généralement qu'aux filles à partir de quinze ans. Je me trouvais alors l'esprit tranquille et encore bien loin de ce fardeau, je n'avais même pas douze ans.

Célestin criait de plus en plus sur Marguerite, il la frappait, se prenant pour le roi.

Une fois même, elle tomba sur un meuble et renversa la vaisselle, dans un bruit épouvantable.

France ne vint bientôt plus à la maison, car l'ambiance était horrible, et sa fille n'avait pas à supporter la violence. Je me retrouvais seule entre ces deux adultes, impuissante.

Je m'enfermais dans ma chambre la journée, l'esclave m'apportant à manger devant la porte.

Ma seule occupation était d'écrire à Camille, je tentais de faire abstraction des cris de Marguerite, qui a chaque fois me déchiraient le cœur. Ma pauvre tante avait épousé son ami pour nous assurer un avenir décent, et elle se faisait passer à tabac.

Je me fêtais intérieurement et grâce à mon petit calendrier mon douzième anniversaire, c'était important pour moi de garder un œil sur le temps qui passait, si vite en vérité.

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