Chapitre 18A: juin 1769

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Bientôt je ne vis plus ma sœur : elle devait être trop fatiguée pour venir me rendre visite. Je me disais alors que si elle ne venait pas me voir, je me devais d'aller prendre de ses nouvelles. Je me rendais chez elle, pour la première fois depuis son mariage. Je montais les escaliers et sonnais à l'appartement. La belle – mère vint m'ouvrir.

—'' Bonjour, vous-êtes ?

—''Je suis Louise, la sœur de Camille... J'aimerais prendre de ses nouvelles.

—''Entrez mademoiselle. Vous êtes bien mademoiselle ? Que je ne me trompe pas.

—''En effet je ne suis pas mariée.

La belle – mère avait l'air plutôt gentille, et elle me laissa voir ma sœur sans problème.

Après avoir parcouru rapidement l'appartement, je trouvais la chambre dans laquelle couchait Camille.

Elle m'entendit arriver, et se retourna, elle qui était tournée vers le mur.

—''Oh, Louise, bonjour.

—''Bonjour Camille. Vous souffrez ? Lui plaquais-je ma main sur son front chaud.

—''Oh Louise ! La douleur n'est pas encore très forte, mais je crains la suite.

—''Je vous ai apporté des biscuits, et du genévrier pour soulager vos douleurs et accélérer le travail. Quand devez-vous être accouchée ?

—''Dans peu de temps, mais les sages – femmes ont dit hier que je devrais encore attendre quelques jours. Ma sœur je ne sais pas si je vais tenir...

—''Mais si, vous allez tenir ! Je resterais près de vous jusqu'à ce que l'enfant soit né. Vous allez vous en sortir. Rassurez-vous.

Auguste arrivait, il jugeait la situation, puis repartait. Sans trop savoir quoi faire, je pense qu'il était rassuré de me savoir près de son épouse. Camille le regarda, puis ria.

— Qu'y a t - il Camille ? Lui demandais-je interloquée

—''Je le trouve drôle. Il ne sait jamais quoi faire de ses dix doigts, et lorsqu'il est mal à l'aise, il roule sa moustache entre ses doigts, l'avez-vous remarqué ?

—''Je ne le connaît pas assez pour juger. Comment va t - il faire avec l'enfant ?

—''Il ne s'en occupera pas. Ce n'est pas son rôle de toute façon, ce serait complètement ridicule de sa part.

Les premiers jours, je rentrais à la maison pour la nuit, et lorsque l'accouchement se déclara imminent, je restais dormir près d'elle, au pied de son lit sur un matelas. Certaines nuits, elle me réveillait en criant, car elle avait mal, alors je lui infusais une tisane de genévrier, et je retournais me coucher. J'avais alors l'impression d'être une mère qui rassurait son enfant lorsqu'il faisait des cauchemars. La belle – mère ne restait pas la nuit, et Auguste, me sachant près d'elle, n'osait pas se lever pour aller la calmer. Cela dura plusieurs jours, près d'une semaine, au bout de laquelle l'enfant se manifesta de façon très violente, alors je ne dormais presque plus la nuit, et je veillais ma sœur. Celle-ci criait à m'en percer les tympans, et malgré la fatigue, je lui préparais toujours ses tisanes chaque nuit. Au bout de quatre jours de routine, vers le vingt – quatre juin, les matrones furent appelées, car Camille allait accoucher.

Celles-ci installèrent ma sœur sur une chaise, et se placèrent devant elle pour l'aider à mettre au monde, en lui tenant les mains : une sur chaque chaise, moi derrière pour la soutenir sous la poitrine, et enfin une femme les genoux à terre devant ma sœur pour réceptionner l'enfant. J'eus une drôle d'impression lorsque la matrone verrouilla la porte derrière nous, la prochaine fois que nous en sortirions, ce sera avec un tout petit bébé. Camille leva les jambes, les appuya sur les deux chaises, je la sentais crispée. Elle avait chaud, et moi donc ! J'avais peur pour elle, combien d'accouchements avaient mal tourné ? Camille hurlait de douleur, pleurait, réclamait maman, je tentais de la consoler, cela dura un temps interminable.

Ma sœur serrait les mains des sages–femmes si fort que je cru qu'elles les perdraient. Alors que j'avais d'horribles crampes au bras, Camille cria et puis nous fûmes rejoint par un autre cri. Un cri de bonheur, le cri d'une nouvelle vie qui respire pour la première fois. J’aperçus la sage-femme qui était devant Camille attraper la petite crevette rouge et hurlante. Elle coupa le cordon d'un coup de ciseaux aguerri et se leva avec lui dans les bras pour aller lui pratiquer les premiers soins. Je restais là, sans rien faire, encore sous le choc, c'était bien le premier enfant de ma sœur, mon neveu. Après que le délivre avait été retiré, une opération délicate et inconfortable pour la jeune maman épuisée, doucement, on la ramenait dans son lit pour la laisser reprendre ses esprits et se reposer.

Après les soins du tout–petit et l'emmaillotage, on recoucha délicatement le fils dans son berceau. Camille, perdue, semblait vouloir le récupérer, je lui donnais alors son bébé qu'elle toucha et embrassa pour la toute première fois. Une des sages–femme, en s'essuyant les mains sur son tablier tâché de sang, ordonna qu'on fasse entrer Auguste. Celui-ci, plus mal a l'aise que jamais, triturait son chapeau, aussi il esquissa un sourire lorsqu'on lui annonça que c'était un mâle qui avait vu le jour. Il embrassa son épouse harassée d'un chaste baiser sur le front, et il chercha des yeux le berceau de son fils, que l'on venait de recoucher. Enfin quand il croisa son regard pour la première fois, son sourire ne fus plus seulement une esquisse. Il se pencha sur son bébé et contre toute attente, il caressa doucement sa joue avec son doigt, provoquant une légère réaction de l'enfant qui faisait des bulles avec sa bouche, la tête enserrée dans le bonnet de mailles.

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