Chapitre 42

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Dans le bus, beaucoup ont dormi, éreintés par la journée. Même moi j’ai un peu somnolé, au moins jusqu’à ce qu’un à-coup un peu trop brusque du bus ne manque de me jeter dans l’allée centrale, après quoi j’étais bien plus éveillé. On a fait des jeux de voiture avec Malik, pendant lesquels il m’a battu à plate couture – en même temps, quel genre de monstre essaie de faire deviner « ornithorynque » ? On a parlé un peu de tout et de rien, sans revenir sur la conversation de l’après-midi, ce en quoi je lui suis reconnaissant. Toutefois, je suis touché par son écoute et son soutien. Malik n’est habituellement pas trop du genre à avoir des conversations intimes – il est toujours là, et on peut parler de plein de choses avec lui, mais s’épancher sur des sujets plus personnels, c’est pas trop son truc.

Arrivé dans la grande salle, je m’assoies avec bonheur devant le plat de pâtes qu’on a déposé dans mon assiette. On mange en silence, tous fatigués par la journée et absorbés par la nourriture. Enfin, en silence, pas pour tous. Valentin a beau être à la place opposée de moi à la table, j’entends tout ce qu’il dit comme s’il était à côté.

Après le repas, tout le monde décide d’aller se coucher sans faire de jeu. Mes musclent saluent cette décision. Comme d’hab’, je raccompagne mes camarades vers leurs dortoirs. Je souhaite bonne nuit à Thibaut et Malik, et me tourne pour raccompagner Max. Néanmoins, celui-ci étant en pleine discussion avec Valentin, je décide de m’épargner cette épreuve. Je salue Margot, et repars vers ma propre chambre.

J’ai à peine atteint l’angle du couloir que j’entends quelqu’un me suivre, et Max m’appelle.

- Lucas ! Bah, tu me fais la gueule ou quoi ?

- Non, je suis crevé, je vais me coucher, je répond d’un ton las.

- Ah bon, c’est pas parce que je parle avec Valentin ? Je sais que tu ne l’aimes pas, mais c’est mon pote.

Je soupire. Je reconnais ce ton. Max a toujours eu des périodes comme ça, où il cherche la moindre raison pour s’engueuler. Généralement, je me contente de le laisser fulminer pendant quelques jours, et après il redevient normal.

- Non, je suis juste fatigué, j’ai envie d’aller dormir.

- T’es sûr, parce que déjà cette aprèm tu ne m’a quasi pas adressé la parole.

Derechef, je soupire pour ne pas m’énerver. Je m’apprête à lui redire qu’il se trompe, quand les paroles de Malik me reviennent en tête. Je fais des efforts depuis des semaines, à chaque fois que Max me reproche quelque chose. Si ça me semblait normal jusque là, je sais qu’aujourd’hui au moins je n’ai rien à me reprocher, et que j’en ai marre de faire le dos rond pour satisfaire les sautes d’humeur de mon meilleur ami.

- Cet après-midi, tu t’es isolé tout seul en faisant la gueule, ne me reproche pas ça, OK ? Et tu sais quoi, t’as raison : je n’aime pas Valentin, c’est un abruti fini, et je n’aime pas le gars que tu es quand tu traîne avec lui. Maintenant, si ça ne te dérange pas, je suis crevé, je vais me coucher.

Je le laisse là et sans lui donner le temps de répondre, je fais demi-tour et remonte le couloir, dans une sortie de drama queen que Margot n’aurait pas reniée. J’ai le cœur un peu battant : je n’ai pas l’habitude de m’engueuler avec Max et je déteste ça. Mais suivre les conseils de Malik m’a un peu soulagé. J’espère juste qu’il ne me fera pas trop la tête.

Arrivé dans la chambre, je constate avec joie qu’Enzo est déjà là, lisant sur son lit. Ses cheveux mouillés partent dans tous les sens, le rajeunissant un peu. Il m’adresse un grand sourire qui me réchauffe le cœur. M’asseyant à côté de lui, je l’embrasse quelques instants, savourant son contact.

Quand il se recule, il m’observe un instant en silence, puis passe son pouce sur mon front.

- Toi, tu t’inquiètes encore, dit-il en continuant à me fixer.

Je soupire, essayant de détendre mon visage avant qu’il ne recommence à dire que je vais avoir des rides.

- C’est rien, je me suis juste pris un peu la tête avec Max.

- Tu veux en parler ?

- Non, pas vraiment.

Je me relève et prend mes affaires pour me préparer à aller me coucher. Je me change rapidement, tout en repensant toujours à mon altercation avec Max. Malgré ce que je viens de dire, je raconte à Enzo ce qu’il s’est passé.

- C’est pas grand-chose, j’ajoute tout en me brossant les dents, mais ça me soûle, je n’aime pas m’engueuler avec lui. Depuis quelques temps, j’ai l’impression qu’on ne fait que ça.

- À cause de quoi ?

- De tout et de rien. Enfin, il y a eu toute l’affaire de la soirée théâtre et tout… Ça, et le fait qu’il traîne tout le temps avec cet abruti de Valentin.

- Je croyais que tous les Zola étaient des gens biens ? Se moque-t-il.

- Ouais, bah lui c’est vraiment l’exception qui confirme la règle. En plus, il réveille les mauvais côtés de Max : quand il traîne avec lui, il est lourd, il veut faire toutes les conneries possible, et limite sexiste.

- Et tu lui a parlé de ça ?

Je hausse les épaules.

- Pas vraiment, non, je me vois mal lui dire « Eh, je déteste le gros beauf que tu es en ce moment, je t’interdis de traîner avec quelqu’un d’autre que moi » !

- Peut-être pas dit comme ça, rigole-t-il. Mais si tu tiens à lui, c’est bête de laisser les choses s’envenimer.

Je réfléchis à ce qu’il a dit pendant que je rince le dentifrice.

- J’imagine que tu as raison. Écoute, je l’ai envoyé bouler une fois, je te dirai ce que ça a donné.

Il se relève et vient se mettre devant moi, passant sa main dans mes cheveux.

- Pars du principe que j’ai toujours raison.

Je lève les yeux au ciel en rigolant.

- Tu rêves.

Je me penche vers lui pour l’embrasser. J’apprécie ce baiser, doux et langoureux. Quand la main d’Enzo descend dans mon dos, je me recule.

- Je suis crevé, ça te va si on va se coucher ?

- Tu rigoles ? J’ai déjà eu du mal à sortir du lit, là j’attends juste de dormir.

Je souris. Il dépose un dernier baiser sur mes lèvres puis repart dans son lit avec un soupir de satisfaction.

Je reste un instant gêné, à tordre mes mains, avant de demander d’une petite voix :

- Euh… Est-ce que ça te gêne si je dors quand même avec toi… ?

Il lève les yeux au ciel et retire les couvertures.

- Mais bien sûr que tu vas dormir avec moi, idiot.

Avec un sourire, je me précipite pour me coucher à côté de lui. Il rabat la couverture sur nous et éteint la lumière. À peine quelques secondes plus tard je m’endors, son bras passé autour de moi.

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