L’autre jour, un sagnamadr vint sonner à la porte de la DicoDanerie. Il avait l’air normal.

-- Pouvez-vous m’adopter ? Dit-il. Je suis tu, et j’ai appris qu’on adoptait à la DicoDanerie les mots tus, car « un mot tu est un mot foutu ».

-- C’est exact lui répondit le concierge. Que faites-vous  dans la vie ? Je n’ai jamais entendu parler de vous.

-- Rien d’étonnant, je suis le plus méconnu des mots. Je suis très difficile à trouver dans un dictionnaire ni même une encyclopédie. L’encyclopédie Universalis parle de moi mais je reste encore à créer dans Wikipedia.

-- Mon Dieu, dit le concierge, en ouvrant toutes grandes, les portes de la DicoDanerie, cet endroit est fait pour vous. Vous êtes ici chez vous. Pouvez-vous nous en dire davantage et vous présenter aux autres pensionnaires ?

-- Certainement, je suis un auteur de sagas. Régis Boyer, grand spécialiste de la question, affirme que « L’Islande médiévale a conçu autour du XIII° siècle un type de récit en prose, les sagas, qui n’a aucun équivalent en Occident et que l’on peut, à bien des égards, tenir pour l’ancêtre de notre roman moderne. Tout y est original, le style d’abord, le genre de personnages et les péripéties ensuite, sans parler d’une vision du monde et de l’homme qui demeure exemplaire. Les Islandais composèrent des manières de biographies qu’ils appelèrent sögur (au singulier saga) : ce sont des textes en prose, éventuellement agrémentés de strophes scaldiques, c'est-à-dire issues de la poésie orale scandinave » (Régis Boyer)

-- Le sagnamadr est donc un auteur de sagas.

-- Oui. Et le pluriel du mot est « sagnamenn ».