Chapitre 7

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Seed, Dalkia, 3 juillet 1990, 10h00

Hal repensait à ce qu'il avait vu depuis son arrivée sur Utopia. Depuis qu'il était là, il n'avait vu qu'une seule chose : la guerre. Ce que décrivaient déjà les explorateurs exotiens il y a trente ans. Ça n'était peut-être pas la même guerre, mais ça en restait une.

Un monde constamment en guerre. Cette phrase lancée par l'un des six explorateurs exotiens à leur retour, lui revint en tête. Ce type avait raison, pensa Hal.

— Vous êtes sûr que ça va fonctionner votre truc ? demanda un homme, ramenant Hal à la réalité.

Hal se trouvait dans un entrepôt, qui avait du abriter des armes comme en témoignaient les quelques caisses encore présentes. L'Exotien pouvait reconnaître n'importe quelle arme de son monde. Mais sur Utopia, il n'en connaissait aucune, bien que certaines pouvaient avoir un design très proche des armes exotiennes. L'entrepôt était toutefois désaffecté et on le lui avait assigné avec plusieurs techniciens pour qu'il construise son piège.

— Théoriquement, répondit Hal.

Cette réponse était un demi-mensonge, car il savait que ça pouvait fonctionner, il l'avait déjà vu, sur son monde. Il avait découvert, il y a quelques années déjà, que pour utiliser leurs pouvoirs, les Paranormaux devaient faire preuve d'une assez grande concentration. Il avait également découvert que lorsqu'ils étaient soumis à un effet larsen de haute fréquence et de façon continue, comme pour toute personne normale, cela perturbait leur concentration. Ils n'arrivaient donc plus à utiliser leurs pouvoirs. Mais il savait aussi qu'il était possible qu'un Paranormal fasse abstraction du bruit suffisamment longtemps pour en détruire la source. Ce petit détail, Hal l'avait caché au capitaine Neg et à présent aux ingénieurs qui l'assistaient.

Quoi qu'il en soit, la conception du piège était simple : construire de quoi émettre un larsen suffisamment efficace pour perturber la cible et permettre aux hommes de Neg de lui administrer un tranquillisant le temps du transport.

Une fois le Paranormal enfermé, il fallait l'empêcher d'utiliser ses pouvoirs. Et c'est là qu'interviendrait la fameuse « Grande découverte » de Hal concernant les Paranormaux : l'utilisation de ce qu'il avait appelé « l'anti-parapsychique », une drogue qui endormait presque complétement celui à qui elle était administrée tout en perturbant sa concentration.

Cette drogue était nécessaire, car le larsen bien qu'efficace pour surprendre un Paranormal n'était pas la meilleur solution lorsque l'on souhaitait caputrer un Paranormal. Une exposition prolongée pouvait détériorer l'audition de la cible et donc ça n'était pas pratique pour garder le prisonnier en bon état. L'inconvénient de cette drogue était que ceux à qui elle était administrée, perdaient un peu l'esprit le temps de son effet, rendant, par exemple, peu efficace l'obtention d'informations. Hal se demandait donc comment Neg ferait pour un éventuel interrogatoire.

Encore fallait-il trouver ce Paranormal. Les hommes de Neg pouvaient tomber sur n'importe quel résistant et comment distinguer leur cible au milieu d'eux ? Le Efdéème savait qu'il recherchait un homme ayant entre vingt et vingt-cinq ans. Donc les femmes ainsi que les hommes plus âgés ou plus jeunes, étaient à exclure. Mais comme Hal avait pu le constater en voyant les cadavres des résistants sur la plage et en ville, les hommes âgés de vingt à vingt-cinq ans étaient courants dans la Résistance.

Même avec ce piège, cela serait compliqué.

— Comment avez-vous su que ce genre de dispositif pouvait stopper les Paranormaux ? demanda un ingénieur. Et pour cette drogue ? Vous avez déjà eu affaire à un paranormal sur votre monde ? Vous en avez déjà capturé un ?

Ces questions décontenancèrent Hal qui ne savait pas comment y répondre.

— Et bien je...

— Ça fonctionnera, le coupa Aramis Neg qui arriva dans la salle après avoir entendu la conversation. Je vous fais confiance, monsieur Damon, ça marchera et c'est tout ce qui compte.

Le capitaine s'avança vers les engins en cours de montage et se mit à rire.

— Je n'arrive pas à le croire... Un simple effet larsen les empêche d'utiliser leurs pouvoirs. Incroyable. C'était si simple... Et pour cette drogue... C'est vraiment incroyable.

— Les Paranormaux ont peut-être des pouvoirs mais à part ça, ils sont comme vous et moi, lui dit Hal. Et... oui, c'était tout simple. Je vous avoue qu'au départ j'ai eu du mal à comprendre pourquoi vous m'avez demandé mon aide.

— Comme on le dit souvent mon garçon, « c'était simple mais fallait y penser ».

— Mais pourquoi avoir eu besoin de moi ? Scottfield ne vous a rien dit à propos de ma découverte ? Pourtant il vous a dit que j'avais trouvé quelque chose.

— Et c'est tout ce que nous savions Hal. Celui que vous appelez Scottfield a juste eu le temps de découvrir que vous saviez comment empêcher les Paranormaux de faire usage de leurs pouvoirs. Il n'a pas eu le temps de découvrir « comment ». Il a cru s'être fait repérer par un de vos agents de sécurité. Craignant que sa couverture soit compromise, il a préféré partir. Il vous a remis cette fameuse lettre de démission et nous a tout raconté.

— Donc en somme, s'il avait réussi à aller plus loin dans ses recherches, je ne serais pas ici ? C'est ça ?

— Même si nous avions découvert votre procédé, nous aurions fait appel à vous, monsieur Damon. Pour la simple et bonne raison que l'empereur souhaite établir des liens commerciaux avec votre monde. Même si ces derniers doivent être clandestins. Exotis a certainement beaucoup de choses à apprendre d'Utopia, mais l'inverse est tout aussi vrai. Votre monde nous intéresse. Vous avez énormément de choses à nous apprendre.

— Sur les armes ?

— Hal, le Efdéème a beaucoup à vous donner. Mais d'après certains espions, Exotis disposerait d'une arme de destruction massive inconnue sur Utopia.

— Et... de quelle arme vous parlez exactement ? demanda Hal, bien qu'il se doutait déjà de ce dont parlait Neg.

— L'arme absolue, celle que vous appelez « Bombe Atomique ». répondit Aramis Neg, confirmant les craintes de Hal.

La bombe atomique. Une arme développée conjointement par les Etats-Fédérés et l'entreprise Rising Drake du temps où le père de Hal la dirigeait, dans les années 1960. Une arme capable d'anéantir une ville en quelques secondes, mais jugée tellement dangereuse que les Etats-Fédérés et son père avaient décidé d'en stopper le développement. Désormais, la bombe atomique appartenait au passé.

— Que voulez vous en faire ? Pourquoi vouloir posséder une arme aussi cruelle et dangereuse que celle-ci ?

— Pour tenir nos ennemis à distance. Hal, nous ne voulons rien de plus que la paix. Utopia a connu de nombreux conflits. Avec cette arme nous pourrons mettre fin aux guerres avant même qu'elles ne commencent.

— Qui vous dit que je pourrais vous aider à l'obtenir ?

— Comme je l'ai déjà annoncé, ça fait des années que l'on observe votre monde, que l'on a des agents sur place. Nous l'observions déjà lorsque votre père dirigeait votre entreprise. On sait qu'il a contribué au développement de cette arme.

— Oui mais le développement a été arrêté. Il ne m'a jamais rien dit au sujet de cette bombe, mis à part qu'elle devait être oubliée. Je ne suis même pas certain que les Etats-Fédérés en aient gardé.

— Mais vous pouvez relancer les recherches. L'empereur est prêt à vous fournir la technologie nécessaire à Exotis pour explorer le système, en échange de la bombe atomique.

Le vol spatial. Voilà qui était intéressant. Hal en rêvait. Avec ça, Exotis pourrait concevoir des vaisseaux spatiaux beaucoup plus efficaces que ce qu'elle produisait actuellement. De plus, après ce qu'il venait de voir à Seed, la puissance du Efdéème, ses armes, ses véhicules de combats,... Il savait qu'Exotis serait vulnérable face à une telle puissance. Avec leur technologie, Exotis disposerait d'une défense spatiale plus efficace que les quelques missiles sol-air dont ils disposaient actuellement

La contrepartie était d'offrir la bombe atomique au Efdéème, ce qui n'était pas rien. Il paraissait hautement improbable que celui-ci ne sache pas la produire, avec sa puissance technologique. Mais Hal ne voulait pas savoir pourquoi aucune puissance utopienne n'en soit capable. À moins que l'une d'entre elles l'ait développé en secret et ait eu la sagesse de le cacher ?

— Je vais y réfléchir, lança Hal.

— Prenez votre temps.

Quelques secondes plus tard, Neg tendit une tablette numérique à Hal. Elle affichait une image montrant un garçon courant dans les rues de Seed.

— Nous avons récupéré les vidéos d'une caméra de surveillance située à l'endroit où notre cible a été vue pour la dernière fois. Maintenant nous savons à quoi il ressemble.

Hal regarda l'écran. Une capture montrait le visage du Paranormal.

— Où comptez-vous installer le piège exactement ? Pas dans la ville, j'imagine, puisqu'il n'est plus là.

— Nos drones ont retrouvé la trace de notre blindé en fuite. Ils ont suivi les résistants jusqu'à leur QG qui semble être situé à l'intérieur du mont Sqenia à environ cinquante kilomètres d'ici.

— Dans une montagne ? demanda Hal étonné.

— Oui, c'est ingénieux. Les Dalkiens ont dû mettre des années à aménager ce complexe. Nous lancerons l'assaut sur leur base lorsque vous en aurez fini ici.

Donner l'assaut pensa Hal étonné. Si le capitaine donnait l'ordre d'attaquer le QG de la résistance et que le Paranormal s'y trouvait, alors il y avait de fortes chances qu'il soit tué durant l'opération.

— Mais capitaine, reprit Hal. Si vous attaquez la base résistante, n'y a-t-il pas un risque que la cible soit tuée ?

— Je viens de parler avec l'Empereur lui-même. Nous avons l'autorisation de l'abattre si nous n'arrivons pas à le capturer.

— L'abattre ? Mais vous ne le vouliez pas vivant ?

— Nos ordres ont changé. Ce garçon a rejoint la Résistance. Nous devons à présent éviter qu'elle ne l'utilise contre nous. Nos ordres sont clairs. Nous devons soit le capturer, soit le tuer. Dans tous les cas nous devons empêcher la Résistance de s'en servir contre nous. C'est aussi simple que ça.

Hal fixa un instant Aramis Neg.

— Mais ne vous inquiétez pas monsieur Damon, reprit Neg voyant son invité bouleversé par la nouvelle. Vous aurez ce que l'on vous a promis. Et même plus si vous acceptez l'offre de l'empereur.

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