2:Hohen

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  • Hohen, vieille branche ! Que viens tu faire dans cette ville moisie ?
  • La puanteur de la capitale commençait à me manquer. Répondit l’homme au manteau de cuire et cheveux blond sales armé d'un sourire franc

Le tavernier bedonnant attrapa son vieil ami dans ses gros bras.

  • Prend donc une bière, c'est la maison qui offre.

Hohen prit place près du vieux bar collant de crasse. Le tavernier posa devant lui une chope débordante de bière moussue. Le voyageur la porta à ses lèvres, il en vida la moitié avant de la reposer.

  • Et bah il avait soif l'animal ! Mais dit moi plus sérieusement, pourquoi est tu revenu.

Hohen s'essuya la moustache du revers de la main avant de répondre

  • Je cherche du travail.
  • Mais bien sûr! Et tu penses que je vais te croire!
  • C'est vrai!

Face au silence du tavernier et à son regards inquisiteur il ne pu que continuer.

  • J'ai… des envie de vengeance.
  • C'est ce que je pense? Hohen ne répondit pas et se contenta de regarder le bois du bar fixement, comme un enfant pris en faute. Tu connais mon avis là dessus. Le tavernier cessa de froncer les sourcils et poursuivit en continuant son ménage. Si tu cherche quand même du travaille c'est la bonne période. Les riches ont peur, le bruit court qu'une révolution se prépare. Les révolutionnaires pullulent à ce qu'on dit.
  • On dit toujours beaucoup de chose ici. Mais rien n'a ébranler l'ordre établi depuis des millénaire. La couronne n'est pas prête de tomber.
  • Pourtant cela me semble vrais. Il y a un homme qui semble fomenter un coup d’état. Le capitaine qu'on l'appel. Je pense l'avoir vu. Et si c'est celui qu'je pense que c'est, la reine à intérêt à se méfier.

Hohen fixait le fond de sa chope, absent. Le tavernier ne s'offusqua pas du mutisme de son ami et commença à astiquer le bar avec un torchon gris de crasse. Il enlevait moins la poussière et les restes de bières qu'il ne les incrustai dans le bois, mais le geste avait le mérite de faire briller le bar qui à la longue y avait gagné une allure vernie. Astiquant toujours son bar le tavernier repris,

  • Tu sais, je pense que ce ras-le-bol général vient du prince Heliban. Les gens aiment bien la reine Parh’hma, elle était bonne avec nous, et elle l'est encore. Mais son fils c'est pas un cadeau. Il nous affiche sa richesse en se baladant en ville. Tu sais normalement les nobles, ils osent pas descendre dans les quartiers moyen. Bah lui si, et c'est pas pour la charité. A chaque fois, il en fait fouetter quelques uns qui s'agenouillent pas assez bas pour Monsieur. Oh et le pire ! Il à fait augmenter les taxes pour financer la construction d'une salle de bals et d'une fontaine !

Hohen, curieux, sorti un oeil de sa chope.

  • Vraiment ?
  • Oui. Le reste n'est que rumeur, mais on raconte qu’il a tué sa fille Bah’hati et que sa femme en est morte de chagrin.

Il laissa flotter le silence un instant, Hohen semblait pensif à nouveau.

  • J'ai aussi entendu dire qu'il aime s'acheter des danseurs, des jeunes danseurs surtout…

D’un mouvement brusque Hohen se redressa, il affichait une grimace de dégoût.

  • Arrête toi là s'il te plaît, je vois le personnage merci.
  • Pardon d'avoir heurté la sensibilité de monsieur ! Ta réserve m'a toujours surpris. Tu n'as pas décider de devenir moine au moins ? T'es puceau ? Si tu veux je te prêtes trois sous et un lit...
  • Mais arrête ! On croirait entendre mon père !
  • J'ai une fille aussi, tu lui plaît beaucoup.
  • Ta fille ! Il me donnerait sa fille ! Mais quel homme est-ce !

Le tavernier rit à gorge déployée de son rire gras et chaud. Hohen faisait les gros yeux. Il se retourna et continua sa bière.

  • Eh, tu bois pas ma bière en me faisant la gueule gamin ! Sinon tu la paie.
  • J'ai pas de sous.
  • Alors souri crétin.

Hohen planta ses yeux dans ceux du tavernier et se força à sourire de toutes ses dents.

  • Tu n'es qu'un enfant. Un enfant soldat. Prend le lit au moins, si tu ne veux pas la fille.
  • Merci l'ami, essaye de trouver mieux qu'un enfant soldat pour la jolie Cassandre.
  • Ma fille t'aime bougre d'âne. Va trouver mieux que quelqu'un que tu aime tiens ! Dit le tavernier désespéré par son ami, et par la fixette que faisait sa fille sur ce drôle de bonhomme mi fou mi inconscient.
  • Quelqu'un qui t'aime en retour. Répondit l'enfant soldat du tac au tac. C'est laquelle ma chambre ?
  • Celle avec le verrous qui marche. Ferme bien la porte si tu ne veux pas que ma tigresse de fille ne profite de ta présence cette nuit.

Hohen attrapa la clé tendue en soupirant. Se retournant, il vit deux yeux en amande chocolat l'épier par la porte de la cuisine. Cassandre regardait, elle avait sûrement tout entendu. Mesquin, Hohen lui souffla un baiser et partit se coucher. Arrivé à sa chambre il entendit la fille engueuler son père qui riait encore. Il pris soin de fermer la porte. Connaissant l'ours qu'était le père, il voulait bien croire que la fille était un tigre.

Il faisait nuit. Il s'accouda à la fenêtre et observa le ciel noir piqué d'étoile. On toqua à la porte.

  • Hohen ? C'est moi, Cassandre.

Il était trop fatigué pour la repousser ce soir. Alors il ne répondit pas et fit semblant de ronfler. Un soupir se fit entendre de l'autre côté de la porte, puis il entendit la fille partir. Enfin tranquille, il se mit à réfléchir. Il pensait à la reine si sage et tant aimé de son peuple. Il pensais aussi à ce détestable prince, et à sa fille Bah’hati dont il venait d’apprendr à la fois l’existence et la mort. Il se souvient que ce n’était peut-être que des racontars et que les seules choses sûres dans le récit du tavernier était l’augmentation des taxes et la mort de la femme du prince.La princesse était peut-être encore en vie mais quelle vie?

Il s'immergea dans ses souvenirs d'enfances, déroula soigneusement tout le fil de sa vie. S'imaginant comment elle aurait pu être si elle n'avait pas été ce qu'elle est. Mais ce n'est pas avec des si qu'on change le passé.

Demain il faudra qu’il se trouve un travail. Se venger lui demandera du temps et il allait devoir se nourrir et se loger pendant ce temps là..

Par la fenêtre il aperçoit une forme sur le toit en face. Un homme découpé dans les ombres au corps gracile, affûté comme un poignard. Ou peut être une femme, il voit mal. La silhouette s'accroupit et bondit, un saut si beau qu'on croirait qu'il s'envole. Mais la silhouette retombe en souplesse sur le toit suivant. Puis sans un bruit elle cours et disparaît dans la nuit.

  • Curieux… pense tout haut Hohen.

Puis il hausse les épaules et s’affale sur son lit. Tout ça, il y pensera demain.

L’ombre, elle, traverse la ville par les toits, sautant avec grâce de maison en maison. Le fond de l'air est frais, elle doit rester en mouvement. Au coin de la rue, en bas, une lumière s'allume. L'allumeur de réverbère passe en sifflotant près de l'ombre qui se tapie comme si la lumière pouvait la manger. L'allumeur de réverbère continue son chemin, quand il est assez loin elle se relève et repart. La lumière du réverbère dévoile des dessous de dentelle blanche sur un costume noir. Puis l'ombre quitte la lumière et disparaît dans la nuit.

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