suite de la salle du bal

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Cendrillon se rapprocha de ses sœurs, alors que ces dernières ne semblaient pas la reconnaitre. Elles se contentèrent d’attendre que la nouvelle venue se présente.

« Non ! … mais vraiment, vous ne me reconnaissez pas ? demanda Cendrillon en mettant les poignets sur sa taille.

— S'est-on déjà croisées ? précisa timidement l’une d’entre elles.

— Mais on se croise à longueur de journée, Javotte !

En entendant prononcer son nom, la petite sœur discerna bien vite l’intonation de son ainée et la prit aussitôt dans ses bras.

—Oh ! Cendrillon, c’est vraiment toi ?

—Qui veux-tu que ça soit ? Bérangère, la fille du boucher? charria-t-elle en se défaisant de l’oppressante étreinte. A propos de Bérangère, l’avez-vous vue quelque part ? Cette peste me doit de l’argent.

—Mais de qui parles-tu ? intervint cette fois-ci Anastasia qui ne semblait pas aussi heureuse de la retrouver.

—Laissez tomber ! De toute façon, vous ne reconnaissez jamais personne, reprit-elle en même temps qu’elle promenait son regard au milieu de la foule. Où est Belle-maman ? »

Les deux sœurs s’échangèrent des regards avant que l’une d’entre elles reprenne la parole.

—Elle est retournée avec monsieur Filmard te chercher.

—Tu sais, Cendrillon… c’est le monsieur qui nous a amenés.

Quel ne fut pas l’étonnement de la grande d’entendre une pareille nouvelle ! Cela la réjouissait que son sort pût préoccuper sa belle-mère. Cependant, elle s’inquiétait, avant tout, des remarques qu’on allait lui faire. D’ailleurs, que pouvait-on lui reprocher ? N’était-elle pas une jeune fille irrépréhensible ? C’était elle qui faisait vivre sa famille, qui faisait les courses, le ménage et la cuisine. L’idée qu’on pouvait lui faire encore des critiques la tarauda si bien qu’elle s’entendît leur dire que tout cela n’était pas de sa faute et que sa belle-mère était la seule responsable de ses actes. Les deux sœurs se regardèrent encore une fois ; elles ne comprenaient pas la réaction de leur aînée.

—Tu ne portes pas la même robe que tout à l’heure ! remarqua Anastasia pour changer de sujet.

—Oui, effectivement, reprit l’aînée en oubliant déjà sa colère avant de se regarder joyeusement dans un miroir, celle-ci, est encore bien plus jolie.

— Oh, Cendrillon ! que tu es très belle !

— Comme toujours Javotte, comme toujours ! répondit-elle sans aucune modestie.

—Qu’as-tu fait de ma robe ? demanda Anastasia, inquiète.

—Je suis tombée dans une mare de boue, articula tout bonnement la grande en même temps qu’elle se servait à manger.

—Bien fait pour toi ! Tu n’as eu que ce que tu mérites ! La providence t’a puni, car tu me l’as prise de force.

—Ah bon ! Alors, dans ce cas, ta providence à une étrange façon de me punir, ponctua-t-elle en avalant un bout de carotte.

—Et pourquoi donc ?

Cendrillon ne répondit pas, elle avait juste à mettre en évidence ce qu’elle portait pour que sa sœur comprenne que ce nouveau vêtement, bien plus beau comparé à ceux de cette soirée, était loin d’être une punition.

Anastasia comprit bien vite l’allusion. Elle serra les poignets de colère et tourna la tête pour ne plus la regarder.

—Avez-vous rencontré le fameux prince ? interrogea Cendrillon, d’un air faussement intéressé en se resservant dans son assiette.

—Et bien… nous avons une petite idée de qui il s’agit. »

Anastasia qui s’était décidée à ne plus adresser la parole à sa sœur ne put se retenir davantage. Le sujet devenait attrayant : « Javotte et moi nous soupçonnons un charmant jeune homme et cela, dès le début de la soirée. Elena l’a bel et bien confirmé.

—Oh, Cendrillon ! reprit Javotte, si tu avais croisé cette jeune fille, Elena, tu aurais été éblouie. Sa façon de s’exprimer, de regarder et de répondre est stupéfiante. Je dois à tout prix te la présenter.

—Elle est aussi très gentille et serviable, poursuivit Anastasia d’un air triomphant, dès lors nous lui avons montré le jeune homme, elle a tout de suite affirmé que c'était lui. Parait-il que ses parents connaissent le prince en personne.

—Vraiment ! répondit-elle, avec un intérêt simulé.

Ses sœurs étaient suffisamment naïves pour faire confiance à une inconnue. Sous les projecteurs de leur bêtise, Elena avait trouvé deux proies faciles et les avait délibérément induites en erreur.

—Où se trouve ce soi-disant prince ? exigea Cendrillon en reposant son assiette.

—On ne te le dira que si tu nous promets que tu ne l’aborderas pas ! s’exclama fermement Anastasia. Il est à nous… Et à nous seules !

—Ah bon ! Vous comptiez le partager entre vous deux !

Les deux sœurs se regardèrent aussitôt, manifestement, elles n’avaient pas pensé à la question.

—Il choisira par lui-même, précisa Javotte, on se présentera à son altesse et ça sera à lui de faire le reste.

—Ah, non ! Je suis plus âgée que toi, Javotte, donc je suis prioritaire pour me marier. C’est moi qui l’aborderai en premier.

—Si l'on suit ton raisonnement, c’est Cendrillon qui devrait l’épouser, elle est plus âgée que nous deux.

—Calmos les filles ! Tout ce que je cherche à savoir, c'est d'après vous, qui est le prince?

La grande se trouvait debout entre ses deux sœurs quand l’une d’entre elles décida de le lui montrer. Le doigt de la cadette pointa un jeune homme assez distingué entouré de quelques filles. Celui-ci tenait un verre et parlait coquettement à son audience. De temps à autre, ses conquêtes glougloutaient de bonheur. Cendrillon le regarda attentivement avant de prendre ses deux sœurs par leur taille.

—Vous êtes vraiment sûr que c’est lui ?

—Aussi sûr que Javotte est ma sœur et moi la sienne.

Elle rigola de bon cœur à l’exemple d’Anastasia puis décolla gentiment sa main pour prendre un morceau de carotte cru de son assiette. Pendant qu’elle la croquait, elle se tourna cette fois-ci en direction de Javotte et demanda : « Et toi ma chère, es-tu sûr que c’est le prince ?

—Aussi sûr que le soleil brille le jour et que pendant la nuit, on dort.

Elle explosa de rire à cette dernière remarque et tira sa sœur pour l’embrasser sur son front.

En essayant ses larmes, elle reprit sur un ton assez sérieux : « Si parfois, vous aviez pris le temps de faire le marché avec moi, vous auriez su que le type qui se tient joyeusement autour de son poulailler n’est autre que Bertrand, le frère de Bérangère, les enfants du Boucher. Eh bien mes cocottes, dorénavant, il va falloir bosser.

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