Chapitre 14.2

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En entrant dans la première coursive, elle fut autant surprise par l'aspect fonctionnel que par le style vaguement art déco qui s’en dégageait. De grandes volutes de bronze cernaient des surfaces qui semblaient faites d'ambre poli.

En dehors de quelques caisses d’outils, il n’y avait aucune aspérité ou quoi que ce soit qui puisse arrêter les passagers du vaisseau en cas d’évacuation. Deux personnes pouvaient même se croiser sans se toucher. L’éclairage, clignotant par intermittence, provenait de lampes semblant faite en pâte de verre jaune soleil. Ce qui donnait une ambiance très particulière.

Ils croisèrent une équipe de cinq personnes occupées sur un relais électrique. Deux d'entre elles tiraient sur des fils, la troisième en rafistolaient d’autres. Quant à la quatrième, elle soudait des plaques d’ambre près du relais. Plusieurs lampes avaient été démontées dans un couloir. Une cinquième labirée les nettoyaient à l'écart.

Esmelia supposa qu’il s’agissait d’une opération d’entretien. Du moins jusqu’à ce qu’ils se retrouvent soudainement dans l’obscurité. Une lumière de secours prit le relais. À elle seule, elle éclairait plus violemment le couloir que l’ensemble des lampes. Jusqu’alors les cinq électriciennes, absorbées dans leur travail, n’avaient pas prêté attention aux nouveaux arrivants. En reconnaissent Grama et plus sûrement Baal, elles se mirent au garde-à-vous.

L’ancien dieu les salua d’un signe de tête et lâcha deux mots brefs. Aussitôt les cinq labirées se détendirent. Quatre d’entre elles reprirent leur travail tandis que la cinquième échangea quelques paroles avec Grama.

Second de Baal, et donc du vaisseau, il était de son devoir de s’assurer que tout fonctionne vite et bien à bord. Lorsque ce n’était pas le cas, c'était à lui d’y apporter des solutions avec les personnes concernées.

— L’éclairage nous joue des tours depuis quelque temps.

Esmelia mit un court moment à comprendre que Baal venait de s'adresser à will et elle dans leur langue.

Will avait été surpris lui aussi.

Une fois qu’il eut toute leur attention, l’ancien dieu poursuivit :

— Dans l’espace, il n’existe ni jour ni nuit. Cela peut être déstabilisant pour des humanoïdes. Quelle que soit l’espèce, la vôtre, celle de Copy ou la mienne, elles ont besoin de cycles de sommeil. J’ai fait installer une alternance de jours et de nuits. Des moments dévolus à l’activité et à la lumière, et d’autres au repos et à l’obscurité. Nos problèmes d’énergie perturbent ces cycles, hélas.

Apparemment, entre les problèmes d’entretien des navettes et ceux d’électricité, il y avait déjà fort à faire sur ce vaisseau, songea Esmelia.

— Ce n’est pas le seul de nos problèmes, ajouta Grama en les rejoignant. D’après Echlo, notre gestionnaire énergétique, cela ne provient pas totalement du réseau. L’IA qui gère l'ensemble des systèmes de survie du vaisseau semble être atteinte elle aussi. Elle ne simule plus les cycles journaliers et nous allons aussi devoir condamner l’ouverture automatique des sas. Il y a eu plusieurs accidents de dépressurisation. Pendant notre absence, deux membres de l’équipage se sont fait piéger et éjecter dans l’espace. Par chance, ils portaient leur combinaison de survie et ont pu être récupérés sains et saufs. C’est pourquoi vous devez toujours porter vos combinaisons, et si vous devez vous déplacer à l’extérieur de vos cellules de repos, vérifiez toujours la pression des pièces qui se trouvent derrière les écoutilles.

Tout en parlant, ils avaient repris leur parcours vers une destination à travers le vaisseau que seuls Baal et Grama devaient connaître. Copy avait disparu. Il ne restait que Quick qui fermait la marche, silencieuse.

Esmelia avait remarqué que depuis leur descente du transporteur, elle les dévorait des yeux. Sa curiosité était motivée par l’intérêt que leur portait Baal, et peut-être par les discussions que les Labirés n’avaient pas dû manquer d’avoir au sujet de ces deux étrangers.

Grama désigna l’extrémité de la coursive.

— Ces portes donnent sur la passerelle de commandement. Vous ne pouvez y entrer…

— Je pense que nous pouvons faire une exception, le coupa Baal. Je doute que Quick ait à servir un jour sur ce vaisseau, mais il serait bon qu’elle voit à quoi ressemble notre passerelle.

Grama se garda bien de contredire son maître, mais il lui jeta un regard sévère que celui-ci ne releva pas. Le Second ne cachait pas qu'il lui déplaisait que deux étrangers puissent accéder au saint des saints.

Baal pénétra le premier dans le poste de commandement, suivit de Quick, Will et Esmelia.

Grama entra le dernier et rejoignit aussitôt l’une des consoles. Le labiré qui s’y trouvait recula de deux pas pour lui laisser sa place.

D’un coup d’œil, Esmelia embrassa toute la passerelle. La lumière y était plus forte que dans les coursives, mais sans être éblouissante.

Elle s’était attendue à y voir toutes sortes d’objets destinés à la navigation et des manifestes traîner entre les consoles pleines de boutons de toutes les couleurs, des écrans, peut-être même des cartes spatiales, des plans, des diagrammes.

Au lieu de cela, elle vit un poste de commandement finalement assez petit, dépouillé et d’une propreté absolue. Rien ne traînait sur les consoles dont les écrans occupait la majeure partie de l’espace. Tout y semblait lisse, sans aspérité, avec toujours ce dérivé d’art déco qui dominait les lieux.

Une baie donnait sur l’espace qui les entourait et sur une partie de la surface du vaisseau.

— C’est une reconstitution visuelle ? demanda Will.

— Nous sommes au beau milieu de l’espace, sans aucune source de lumière proche, répondit Baal.

Elle remarqua un vague sourire sur son visage qui s’effaça aussitôt.

Dans un coin de l’écran, une série de données commença à défiler. Ces fameux diagrammes, calculs, courbes et cartes stellaires qu’elle s’était attendue à voir étalés un peu partout et qui, ici, apparaissait méthodiquement à la demande de Grama ou de l’autre pilote installé devant la deuxième console.

— Toutes ces données proviennent de sondes qui entourent constamment le vaisseau, expliqua Grama. Elles nous envoient des informations ainsi que des images. Des sondes comme celles-ci.

Will et elle se retournèrent en entendant une sorte de ronronnement derrière eux. Deux petites sphères se positionnèrent aux dessus de leur épaule droite.

— En attendant que notre médecin de bord vous pose une balise d'identification et de localisation, vous devrez vivre avec elles, les prévint Baal. N’essayez même pas de leur échapper.

— Un émetteur ? s'inquiéta Will

— Uniquement si vous présentez un quelconque intérêt pour moi, s’entendit-il répondre.

Il préféra ne pas aller plus loin sur le sujet, le réservant sans doute pour plus tard. Au lieu de cela, l'ancien dieu fit une autre remarque :

— Tout a l’air de bien fonctionner ici… Sauf le chauffage.

— Il fait chaud effectivement, répondit Grama. Il faudra vous y faire. Les températures risquent être très hautes… ou très basses dans les prochains jours.

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