Les yeux fermés, je vois des images vives. Un doux rêve.

Un texto : "On peut se revoir ?".

Aucune hésitation, mes doigts composent par eux-mêmes le message "22 heures aux Quatre Saisons".

La réponse ne se fait pas attendre "Suite 1ere".

Flash. Une scène de Pretty Woman.

Je prends un bain.

Boutiques, massage, salon de coiffure.

19 heures. J'enfile une robe courte, des cuissardes.

Taxi. Georges V.

"Bonsoir. Tu es très en beauté."

Alain.

Une suite. Du sexe. Un canapé. Un piano.

Une voix : "Ce n'est pas si terrible que ça. C'est même plus classe que ça ne paraît. Je peux le faire, je le vois. Même y prendre du plaisir."

Un lever de soleil. La même suite. Un petit-déjeuner. Des billets. Un taxi.

J'ouvre les yeux, l'obscurité est totale. Je tâtonne autour de moi. Un lit. Un homme. L'interrupteur. Une autre chambre d'hôtel. Un autre homme. Karl.

Qu'est ce qui est rêve et qu'est ce qui est réalité... Tout était encore mélangé dans ma tête. Je ne vous raconte pas ce rêve pour mon plaisir. En quelque sorte, il annonçait mon avenir. C'est à ce moment-là que j'ai cru que la prostitution, aussi répugnante qu'elle puisse paraître, était "mon truc". Comme quoi, la nuit n'est pas toujours de bon conseil.

La réalité était synonyme de dépendance, d'amertume, de dégoût. Faux amour et fausse amitié. À quoi bon y rester ? À quoi bon la rechercher. Je ne comprends pas les gens terre à terre. Pourquoi vivre par dépit ? Les fantasmes sont plus profonds, plus intéressants. Les songes sont plus doux.

Dans le monde onirique, ce qu'on fait n'a pas d'importance ; au réveil tout s'estompe. Aucun engagement, aucune conséquence. Pas de déception. Je voulais faire de ma vie un rêve. Aussi étrange que cela puisse paraître, c'est la prostitution qui m'a libérée. Paradoxal. Mais... Savez-vous ce que c'est, vous, que le paradoxe ?