Chapitre 31

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Le souffle déjà court, Zelda ne soupira ni n’éclata de rire. S’étouffer elle-même n’aurait pas été une mince affaire, alors elle avait dû faire avec les moyens du bord, et son gardien avait sans doute peu apprécié qu’elle lui raconte en détail tous ses meurtres, et surtout ceux qu’elle n’avait pas commis. Elle avait un peu joué avec lui, en lui faisant croire qu’elle avait également assassiné sa famille, ses amis, des inconnus, probablement des gens qu’il connaissait, et il avait horriblement pâli. Il avait prononcé un nom, auquel elle s’était contentée d’ajouter un éclat de rire et quelque chose qui ressemblait à un je m’en souviens.

Il s’était jeté sur elle comme un monstre, les yeux injectés de sang, il avait sorti une corde d’elle ne savait où, et s’était jeté sur elle avec une telle violence qu’elle s’était demandé quelle corde elle avait touchée. Elle avait perdu connaissance au moment où l’implant du garde avait décidé d’intervenir, et visiblement de mettre fin à ses jours.

Enfin, tout s’était plus ou moins bien passé, puisqu’elle était sortie de prison. Certes, ça ne voulait pas dire qu’elle était libre, mais au moins, elle n’était pas sous la surveillance d’un gorille entre quatre murs ridicules et en béton. Et puis, ils avaient sûrement pu faire quelque chose pour la blessure qu’elle avait sur la tête, et qui avait tant saignée quand elle s’était réveillée. D’ici, elle parviendrait sûrement à s’évader. On la retrouverait facilement, si elle traînait un peu trop dans les rues, mais il suffirait qu’elle prenne les transports en commun cachée sous l’identité de Renouveau et qu’elle passe par une autre entrée pour probablement parvenir à rentrer chez elle. Il y aurait forcément quelques difficultés, mais rien d’insurmontable, si elle parvenait à contacter Joy une fois dehors.

Elle rouvrit les yeux et sourit. Et puis elle leva automatiquement les yeux vers le nombre de messages qu’elle avait, cherchant un peu de distraction. Mais il n’y en avait que quelques-uns, et elle s’en lassa vite. Rien de très intéressant ne se passait dans le monde, malgré quelques guerre en Asie, les Américains qui sombraient encore et toujours dans la folie avec leurs armes et le déclin navrant de leur économie et de leurs relations politiques avec le monde et sa propre arrestation dans les journaux en ligne. Pas d’élections prévues, pas de mise à jour non plus, le calme plat. Tellement plat… De quoi pouvaient bien vivre les gens, ici ? Pas d’amour et d’eau fraîche en tout cas.

Elle réprima douloureusement et pour la quinzième fois de la journée un soupir. Son regard ne s’égarait que sur un vert pâle censé changer du blanc effrayant et reconnu mauvais pour le moral qui tapissait autrefois ces murs. Le mobilier n’avait pas beaucoup changé, aucune chaise confortable, aucun tableau agréable rien pour égayer une atmosphère déjà pesante, et des visages tristes, fermés, même parmi ceux des infirmiers. Ah, qu’elle regrettait les jours qu’elle avait passés sous terre…

Elle espérait qu’ils ne s’inquiétaient pas trop… S’ils la croyaient morte, l’avaient-ils déjà annoncé à Kazumi… ? Elle se força à ne pas froncer les sourcils, et s’imagina comment Swan avait dû le lui annoncer pour détendre l’atmosphère.

- Je suppose qu’en prison les principales causes de mortalité sont la maladie et l’ennui, Kazumi…

- Zelda !

- Kazumi ? Qu’est-ce que tu fais dehors ?

- Je suis avec Anakin ! Et il me dit de te demander comment ça va !

- Tout va bien, ne t’inquiète pas. Transmet lui que Valkyrie viendra avec nous à Disney, j’ai pu discuter avec elle, elle va nous aider à avoir des places, il faut que vous en parliez avec Velvet, d’accord ? Tu lui dis bien ?

- D’accord ! C’est qui Valkyrie ? Et Velvet ?

- Ce sont des amies, et elles avaient très envie de te rencontrer, tu les verras bientôt. Ah, et pensez à nourrir le cygne, il doit mourir de faim… Ne t’inquiète pas, je rentrerai bientôt, une fois que je serais complètement rétablie, tu verras, on jouera avec toi, d’accord ? Je dois te laisser, une amie vient me voir cet après-midi. Je vais bien, ne t’inquiète pas.

Elle fit un effort pour le sortir de ses pensées, et condamna son accès à la messagerie instantanée. Il ne fallait surtout pas qu’ils puissent retracer cet appel, son implant devait déjà être sur écoutes, si elle les avait mis en danger, elle s’en voudrait jusqu’à la fin de ses jours. Si Joy avait été libérée, elle avait sans doute pris des mesures ou retardé, comme elle avait l’habitude de le faire, la fuite d’informations, sinon peut-être que Swan était parvenu à contacter Velvet, auquel cas…

Il fallait à tout prix qu’ils sortent de l’enceinte de la ville, qu’Anakin réfléchisse à une manière de les sortir de là au plus vite, qu’il se rende compte du problème… Elle était immobilisée, incapable de parler, lui trop nouveau pour avoir appris les codes, le morse, qui n’était même pas fiable puisqu’il était l’un des plus connus… Elle ne savait pas coder, et pour des ingénieurs, c’était une mauvaise idée, alors… Elle n’avait plus qu’à espérer qu’il y avait quelqu’un de libre et d’assez intelligent pour les sortir de là pour réparer ses bêtises…

Comme d’habitude. Après tout, c’était comme d’habitude. Elle ne faisait pas assez attention, elle était blessée, elle mettait les autres en danger, c’était de sa faute. Elle ne réfléchissait pas assez avant d’agir. Elle n’avait jamais vraiment pensé aux conséquences de ses actes sur les autres. Jamais. Elle savait ce qu’elle voulait, ce qui devait être fait, et elle faisait son possible pour parvenir à ses fins, quitte à piétiner les avis des autres, à oublier qu’il y avait des gens pour lesquels elle se battait qui avaient besoin qu’elle les protège, puisqu’ils ne pouvaient pas le faire eux-mêmes. Elle le savait, elle vivait avec eux, encore et encore, sans voir le soleil, sans rien respirer d’autre que l’air soufflé par les conduits d’aération, relégué par la climatisation de leur couverture. Et pourtant, elle ne pouvait pas s’empêcher de faire toutes ces erreurs, de leur causer tous ces problèmes, sans cesse.

S’il arrivait quoi que ce soit, ce serait encore de sa faute. Si Kazumi était blessé, si son père adoptif devait fuir, si Mamoru et les autres intolérants devaient souffrir, si Louis était obligé de les trahir, ou de fuir, si Joy ne parvenait plus à les dissimuler… Elle aurait tué tous ces gens qu’elle était censée protéger. Elle ne pouvait pas laisser Wallace et les autres équipes se charger de rattraper ses erreurs, pas plus qu’elle ne les laisserait l’accepter à nouveau dans leurs rangs. Non, si elle commettait l’irréparable, si elle était la cause de leur exode, il fallait qu’elle s’exile, qu’elle disparaisse, probablement indéfiniment.

C’était mieux pour tout le monde.

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