Divine providence (2)

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   Un bout de bois éclata dans le feu faisant sursauter Edgar qui pensa un instant que son cœur ne le supporterait pas, ce qui fit rire Joshua. Mettant ainsi fin à la discussion, les deux hommes commencèrent à manger leur dîner, le lapin était tendre et cuit à point. Edgar était même surpris qu'il puisse être si bon, il en félicita son compagnon. C'était même le premier compliment qu'il faisait à Joshua ou à quelqu'un depuis le début du voyage, de quoi surprendre le guide qui ne sut quoi répondre sur le moment. Parfois, ils jetaient des coups d’œil d’un côté comme s'ils attendaient quelque chose ou quelqu'un, non loin de la clairière se trouvait des rochers et une voûte naturelle qui devait conduire sous terre. Plus tôt dans la journée, le reste du groupe s’y était engouffré avec l’espoir d’y trouver des ruines intéressantes. Mais cela faisait déjà plusieurs heures et personne n’en était revenu. Edgar et Joshua avaient perdu à la courte paille, se retrouvant à monter la garde en attendant le retour des autres. Le récupérateur avait bien envie d’aller voir, se doutant que les autres avaient éclairé et balisé le chemin, mais qu’apporterait-il de plus ? Ils allaient revenir bredouille après des heures à crapahuter dans des galeries ou alors ils étaient en train de s’organiser pour rapporter leurs trouvailles. L’un dans l’autre, Edgar ne serait pas très utile et il préférait rester là à attendre. Le voyage n’en était qu’à son début, il aurait tout le temps d’assouvir sa curiosité et de découvrir un artefact amusant.

  Après avoir fini de manger et d'échanger quelques discussions pour passer le temps, Edgar se leva, ses genoux craquèrent et son dos lui fit mal, ce fut plus laborieux qu’il ne l’aurait imaginé pour se remettre debout. Sa tête vacilla un instant à cause de la fatigue et de l’alcool, il ferma les yeux et prit une longue inspiration en attendant que le vertige passe. Une fois fait, il se pencha lentement avec précaution pour ramasser ses bottes. Il posa son postérieur sur une souche d’arbre d’où s’échappait une fine odeur de moisissure et enfila tranquillement ses chaussures.

  Il s’éloigna du bivouac pour soulager sa vessie, trébucha sur une racine et sa voix vint rompre le silence en vociférant des jurons. Marchant à tâtons pour ne pas s’étaler de tout son long, il mit plus d’une minute à s’approcher des arbres. Il s’arrêta enfin vers l'un d'eux, particulièrement grand, et déboutonna son pantalon en sifflant un air de musique. Observant les branches à s’en donner un torticolis pendant qu’il urinait, le récupérateur était de meilleure humeur maintenant qu’il avait le ventre plein et l'outre de vin avait apporté sa contribution. Edgar en avait déjà vu des arbres géants mais jamais autant. Cependant il avait vu des bâtiments immenses dans des cités en ruines qui lui avaient inspiré ce même sentiment d’être insignifiant. Il se souvenait de sa première visite de ruines : des bâtiments effondrés faits dans des matériaux qu’il n’avait jamais vus, des machines qui erraient dans les rues, attaquant le moindre signe de vie, des cadavres ambulants dans les habitations qui n’avaient plus rien d’humain. A l’époque, il avait détesté ce lieu, il avait pensé que c’était l’enfer, exactement comme ce qu’il ressentait à présent envers cette jungle. Nul doute qu’il finirait par s’y habituer, il aimait surtout se plaindre, c’était humain après tout.

  Secouant son membre pour l’égoutter, il tourna la tête, ayant entendu quelque chose. Ce qu'il aperçut était pour le moins étonnant : une jeune femme était assise contre un arbre, à quelques mètres de lui. Elle l’observait avec de grands yeux ronds paniqués. Elle avait de longs cheveux lisses et sombres, ses boucles d’oreilles et son collier brillaient d’une lueur orangée même dans l’obscurité. De l’ambre ? Edgar connaissait ce matériau qui restait lumineux éternellement, on s’en servait en ville pour faire des lampadaires ou des torches mais jamais encore il n’avait vu quelqu’un en utiliser comme bijoux. Il remballa ses affaires dans son pantalon, un peu couillon, pour s'avancer vers elle. La jeune femme se recroquevilla contre l’arbre, apparemment terrifiée, offrant ainsi un sentiment de confiance et de supériorité à Edgar.

  Il tendit une main vers elle, arborant un sourire carnassier et malveillant. Il n’avait pas imaginé rencontrer quelqu’un dans cet enfer, et encore moins un joli brin de fille totalement terrifiée. Dire que Joshua l’avait mis en garde sur les sauvages : de véritables guerriers assoiffés de sang. Il en ricanait. Ce n’était qu’une jeune femme perdue. À croire que les dieux l’avaient entendu quand il disait vouloir un lit douillet et une charmante compagnie. Il lui fit alors signe de se lever, tendant sa main vers elle, se voulant bienveillant alors qu’une multitude d’idées perverses lui traversaient l’esprit. La sauvageonne posa ses yeux émeraude sur la main puis sur Edgar et hésita mais le récupérateur se penchait déjà sur elle pour lui ordonner de se lever.

  La jeune femme poussa des gémissements récalcitrants, lutta un instant mais face à la corpulence de l’homme, elle abdiqua rapidement. Une fois debout, Edgar l’emmena vers le campement, la poussant un peu pour qu’elle obéisse sans avoir la moindre pitié pour elle. Il eut alors du mal à regarder le sol pour éviter les racines, trop concentré à observer sa trouvaille. Il se dégageait d’elle une odeur agréable, un parfum épicé qui n'était pas pour déplaire le récupérateur. Joshua qui remuait les braises du feu, releva les yeux et fut plutôt surpris de ce qu’il vit.

 – C’est quoi ce bordel ?

 – Regarde ce que j’ai trouvé, blottie contre un arbre. C'est la divine providence qui l'a mise sur notre chemin !

  À la lueur du feu de camp, Edgar profita pour mieux observer la sauvageonne. Elle était jeune, la vingtaine environ et incroyablement belle. Des yeux d’un vert intense comme il n’en avait jamais vus, des lèvres pulpeuses et attirantes. Elle ne portait qu’une veste en lin qui lui tombait jusqu’au niveau des cuisses. En dessous, on pouvait voir son torse et son ventre nus, un simple bout de tissus venait cacher sa généreuse poitrine qu'Edgar contempla un moment avec avidité. Son pantalon en peau, déchiré par endroits, épousait parfaitement les courbes de ses jambes, ne laissant que peu de place pour l’imagination.

  Le regard du récupérateur se fit plus lubrique, il passa machinalement sa langue sur ses lèvres : alléché par ce qu’il voyait. La jeune femme mit ses bras devant son corps, comme pour se protéger et fuyait le regard des deux hommes, jetant un coup d’œil à gauche, puis à droite, observant parfois le feu de camp et les restes du lapin.

Elle était svelte, la peau bronzée à l’aspect de pêche et il émanait d’elle quelque chose d’animal dans son comportement, tel une bête sans défense et apeurée. Edgar éclata de rire.

 – Moi qui me plaignais du manque de compagnie. Me voilà comblé !

 – Elle appartient sûrement à une tribu du coin.

 – Et alors ? Là, elle est toute seule et regarde-moi ce joli petit lot ! En plus, on dirait qu’elle va fondre en larmes !

 – Pourquoi est-elle toute seule ? Joshua s’avança vers elle et tenta de croiser son regard. Tu comprends ce que je dis ? Que fais-tu ici, toute seule ?

La jeune femme acquiesça timidement et baissa les yeux sur le feu. Les flammes dansaient dans son regard alors qu'Edgar la déshabillait du sien.

 – Chassée… J’ai été chassée.

 – Voilà qui est fort triste pour toi ma petite ! Par chance, nous t’avons trouvée et tu n’es plus seule.

Pour accompagner ses paroles, Edgar lui pelota allégrement le postérieur. La jeune femme sursauta mais n’osa pas bouger, par peur des représailles. Joshua ne semblait pas partager cet entrain à s’amuser avec une sauvageonne mais il ne voyait pas non plus pourquoi il exprimerait son désaccord à son compagnon. Edgar remarqua que la jeune femme observait les restes du repas et sourit.

 – Tu as faim ? Tu peux en avoir si tu veux.

Il se rapprocha d’elle, soufflant dans son oreille, trahissant l’excitation qui parcourait son corps alors que sa main continuait de palper les fesses de la demoiselle.

 – Si tu es gentille avec moi, je te promets que je le serai aussi avec toi… Tu auras autant de nourriture que tu le voudras. Tu m’as compris ?

Elle hocha doucement la tête, avalant sa salive et ses sanglots pendant qu'Edgar glissait ses mains sous sa veste pour la lui retirer. Cette dernière tomba sur le sol et laissa le corps de la jeune femme à demi nu. Sa peau semblait si douce et sensuelle, elle ne portait alors que son collier, quelques bracelets et ce bout de tissu qui masquait encore ses tétons et une partie de sa poitrine. Venait s’ajouter à ça quelques cicatrises sur son corps mais qui ne gâchait en rien sa beauté.

  Edgar semblait ravi du trésor qu’il avait débusqué par hasard. Il s’installa au sol et invita la jeune femme à le rejoindre avant de déboutonner son pantalon. Il l’allongea par terre, glissa une main sur sa gorge, descendant lentement sur sa clavicule : sa peau était en effet très douce. Une sucrerie dans cet enfer, c’est ce qu’elle lui inspirait. Il l’embrassa sans prévenir, lui mordillant la lèvre pour lui faire comprendre qu’elle devait lui rendre son baiser. Sa main continua son chemin, arrachant le tissu sur sa poitrine pour mieux la prendre en main. Il releva la tête pour regarder un instant sa poitrine, profiter de la vue sur son trophée. Satisfait de ce qu’il voyait : une paire de seins bien ferme et rebondie, il l’embrassa de nouveau.

  Joshua poussa un soupir, assis près du feu. Il but une gorgée de vin tout en observant avec timidité le spectacle. Il trouvait la jeune femme attirante et commençait même à avoir envie de participer. Ce qu’il pourrait faire une fois qu'Edgar aurait terminé sa besogne.

  Les mains du récupérateur se promenaient sur le corps de la sauvageonne. L’une passait langoureusement sur sa cuisse, remontant doucement vers son entrejambe. Edgar avait le souffle saccadé par le désir. La jeune femme le repoussa alors doucement en lui faisant un sourire timide, il la fixa d'abord avec colère, prêt à lui coller une gifle pour qu'elle reste docile, mais il comprit : elle l’invitait à se coucher sur le dos. Une fois allongé, elle lui grimpa dessus et passa ses mains sur son torse, relevant son haut pour être en contact avec sa peau. Elle posa ses lèvres sur sa clavicule pour descendre ensuite, mordillant l’un de ses tétons alors que sa main glissa dans le pantalon du récupérateur.

  Edgar était au paradis, il souriait bêtement et sentait que la nuit allait être bien plus agréable que ce qu’il avait espéré. La demoiselle releva rapidement la tête, plongeant son regard dans le sien pour lui offrir un sourire. Il se noyait dans ses émeraudes, ne pensant alors qu'à elle, qu'à ce qu'il comptait lui faire. Elle le possédait de tout son être, il la désirait ardemment. La sauvageonne approcha lentement ses lèvres des siennes, déposant son souffle sur sa peau, il fut pris de frisson, agacé de ces préliminaires, il en voulait plus !

  Il releva la tête pour l’embrasser mais elle recula rapidement, ce qui le frustra. Les doigts de la jeune femme étaient ressortis du pantalon, glissant à nouveau sur son torse. Il tenta d'attraper ses lèvres de nouveau mais quelque chose fit pression sur ses côtes, provoquant une gêne qui se transforma en douleur.

  Avant de comprendre ce que ça pouvait être, la lame s’enfonça en lui, perforant son poumon. La jeune femme posa sa main libre sur la bouche de l’homme lui soufflant de ne pas faire de bruit avant d’approcher son visage. Joshua observait la femme à califourchon sur son compagnon, il commençait à avoir du mal à rester assis, son entrejambe le démangeait. Il avait hâte qu’il en termine pour prendre sa place.

   C’est alors que la jeune femme se releva d'un coup, balançant ses cheveux en arrière avec élégance pour ne plus les avoir dans le visage. Joshua pensa alors que c'était chose faite : son collègue la prenait enfin ! Mais le regard de son compagnon était étrange, comme vide. Ce fut alors comme une douche froide se déversant dans les entrailles du guide. Edgar gisait sur le sol : son couteau enfoncé en plein cœur, baignant dans son propre sang : mort.

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