Chapitre 11

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J'écarquille les yeux au baiser farouche et possessif qu'il me donne. Ses lèvres sont tellement douces et chaudes. Étrangement ça me plaît. Je m'en veux pour cette ambivalence des émotions qu'il déclenche en moi !

Mon corps est pressé contre celui du déchu et ce n'est qu'en sentant ses mains sur mes hanches que je me rappelle que je suis sensé le détester et non l'embrasser.

Je pose les miennes sur son torse pour essayer de le repousser, mais il me tient très fermement contre lui.

Je fronce les sourcils et je lui mords violemment les lèvres, le faisant grogner un peu. Il se recule légèrement pour murmurer :

- Sois un gentil chaton et reste tranquille jusqu'à ce que cette réception s'achève. Ensuite tu pourras me crier dessus si tu le désires toujours, murmure-t-il sur un ton amusé.

Je lui lance un regard meurtrier. Mes instincts de meurtre reviennent à vivre allure, cependant quelque chose me pousse à lui obéir et à m'assoir sagement sur une chaise sans rien dire.

Azraël prend place à côté de moi en silence, me tendant une assiette remplie de nourriture et un verre d'eau :

- Merci, dis-je en me saisissant du plateau.

Il me sourit et me regarde manger tout en restant discret. Ça tombe bien car je n'ai vraiment pas envie de faire la « conversation ». Je suis toujours furax contre son frère et de sa façon de me sauter dessus pour m'embrasser ! Même si, je dois bien l'avouer, ce moment fut très agréable et que j'aimerais volontiers recommencer... Mais, on ne se donne pas en spectacle de cette façon. De plus, me faire traiter « d'animal de compagnie », c'est humiliant !

Que signifie de sa part ce comportement ?

Mes doigts se crispent un peu sur le verre que je tiens. Refouler mes émotions, garder au fond de moi cette colère sous-jacente me demande beaucoup de self-control.

La soirée continue sans que personne ne m'adresse la parole. Je vois souvent des regards interrogateurs sur moi. Ils se demandent sans doute qui je suis et pourquoi Gabriel m'accorde autant d'attention. Au plus profond de moi je sais ce qu'il désire, qu'il me veut tout à lui : corps et âme, et en prime, mes secrets.

Je soutiens chacun de leur regard sans baisser les yeux. Je refuse de courber l'échine, après tout je ne leur dois rien et je me fiche totalement de ce qu'ils pensent !

Le temps s'étire lentement et je m'ennuie à mourir, Azraël est parti je ne sais où et je me retrouve tout seul. Gabriel me jette parfois quelques regards furtifs à et chaque fois je le fusille des yeux, lui faisant bien comprendre que je suis toujours en colère contre lui.

Je suis toujours en train de ruminer dans mon coin quand une paire de jambe s'immobilise en face de moi. Je lève la tête et me retrouve nez à nez avec l'un des sbires de Gabriel :

- Suis-moi, lâche-t-il froidement.

Sans me donner plus d'explication, il tourne les talons. Je n'ai d'autre choix que de me lever pour le suivre. Mais après tout ce temps passé assis et immobile, mes jambes sont un peu patraques et il me faut quelques secondes pour parvenir à me tenir debout sans tanguer.

Pour le coup, me voilà obligé de courir après le garde pour le rattraper. Nous traversons une suite de passages qui se ressemblent tous. Comment font-ils pour ne pas se perdre ? En plus d'être un vrai labyrinthe, tous les couloirs sont totalement identiques !

Après plusieurs minutes à fouler cette forteresse de velours et de luxe, nous entrons dans la chambre de Gabriel. Apparemment la soirée semble finie pour moi :

- Attends ici, m'ordonne-t-il.

Après cet ordre sec, le sbire quitte la pièce.

Seul, j'en profite pour me déshabiller et passer un boxer et un large tee-shirt.

Je ne sais pas trop quelle attitude adopter : attendre le retour de Gabriel pour lui mettre mon poing dans la figure ou alors aller me coucher et remettre ma vengeance à demain ? Non je pense que je n'arriverais pas à dormir dans le même lit que lui sans avoir mis cette histoire au clair.

Je m'assois sur le canapé qui se trouve dans le salon et j'attends patiemment qu'il arrive. Cependant je regrette bien vite mon choix car il ne daigne pas montrer le bout de son nez.

Je me réveille en sursaut en entendant la porte d'entrer se refermer. Allongé sur le canapé, j'ai dû m'endormir en attendant le retour de Gabriel.
Je grogne en me redressant, me retrouvant nez à nez avec l'ange déchu qui sourit de toutes ses dents :

- Tu sais que tu es terriblement mignon quand tu dors ? dit-il de sa voix ironique mais somme toute sensuelle.

Je fronce les sourcils, son ton perfide ranime la rage que j'ai ressentie quand il m'a embrassé de force.

Mon poing part tout seul pour aller se fracasser sur sa figure. Il grogne alors qu'un horrible craquement retentit.

Du sang coule de son nez que je viens de briser et il ronchonne encore tout en me lançant un regard qui est tout sauf en colère. À croire qu'il était ravi que je l'aie frappé :

- Je l'ai mérité, je l'admets, mais tout de même, me dit-il.

Son nez commence doucement à se remettre en place, les anges déchus, tout comme les créatures célestes et démoniaques possèdent une capacité de régénération quasi instantanée :

- Je peux savoir pourquoi tu m'as embrassé là-bas ? Et surtout comment ose-tu me traiter « d'animal de compagnie » ! demandé-je, furieux.

- Je suis désolé mais je n'avais pas vraiment d'autres alternatives, j'ai fait ça pour te protéger.

Je n'en crois pas mes oreilles « pour me protéger » ? En quoi c'est sensé pouvoir le faire ?!

- Il va falloir que tu m'expliques parce que je ne comprends pas vraiment ce qu'il t'est passé par la tête quand tu as pensé à une telle chose !

L'ange déchu pousse un soupir pendant que son nez continue de guérir :

- Écoute, tu sais que quand tu t'en prends à un membre d'un gang, tous les autres se mettent en tête de vouloir ta peau ! L'homme qui t'a agressé et que tu as failli tuer tout à l'heure t'en voulait parce que tu as tué deux des nôtres. Il ne sera pas le seul à vouloir ta mort. Tant que tu ne seras pas passé dans l'autre monde ils considéreront que la dette de sang n'est pas honorée et ils continueront à essayer de t'ôter la vie. Alors en annonçant publiquement que tu m'appartiens et que si quelqu'un te fait du mal il en mourra, j'ai garanti ta sécurité. Mes hommes ne s'en prendront pas à toi, alors tu devrais me remercier au lieu d'être en colère contre moi, même si je comprends ta réaction.

- Te remercier ?! Alors que tu m'as embrassé sans mon accord et que tu m'as traité d'animal de compagnie ?! Tu te fourres le doigt dans l'œil si tu penses que je vais t'être reconnaissant pour ça ! vociféré-je.

Il me regarde avec un air totalement calme, ce qui est tout le contraire de moi qui suis énervé au plus haut point. Mon désir de l'égorger ne m'a pas quitté. Seulement je ne tenterais rien, parce que je ne suis pas un animal sauvage et que même si ça me coûte de l'avouer, j'ai besoin de lui pour rester en vie :

- Écoute Killian, j'ai fait ça pour leur montrer que j'étais sérieux, et puis ne fais pas comme si tu n'avais pas aimé mon baiser car je sais que c'est faux, affirme-t-il en me regardant dans les yeux.

Je sens la réminiscence de la colère qui monte encore en moi. Ça me tue qu'il ait raison et pourtant jamais je ne l'avouerai !

- En tout cas, sache que ce n'est pas pour te remercier de ta soi-disant protection que j'accepterais de coucher avec toi !

Il haussa un sourcil en me regardant, ne s'attendant visiblement pas à une telle répartie :

- Qui a dit que c'était ce que je voulais ? Certes j'en ai très envie. Ton petit corps est un appel à la luxure, mais je sais très bien que ce n'est pas avec un simple baiser que tu accepteras de te donner à moi.

Un long frisson me parcourt le dos, je ne saurais dire si c'est de peur ou d'excitation. Parce que oui, il est vraiment bien foutu et ça ne me gênerait pas de partager son lit pour autre chose que dormir. Cependant je ne le ferais pas parce qu'en plus de m'avoir kidnappé, il me traite comme un vulgaire animal et ça c'est humiliant !

- Heureux de savoir que tu ne te fais pas de fausses idées. Bonne nuit, lâché-je froidement.

Je me dirige dans la chambre. Après avoir retiré mon tee-shirt et juste gardé mon boxer, je me glisse avec bonheur sous les draps en lâchant un ronron de bien être, je me sens tellement bien là, au chaud sous la couette !

À peine je commence à m'endormir que je sens le lit s'affaisser un peu. Gabriel ! Je sens sa chaleur dans mon dos et mon léopard a très envie d'aller se lover contre lui en ronronnant. Je repousse cette idée loin dans ma tête, pas question que je laisse mon envie me guider.

Je laisse le sommeil m'emporter doucement et je sombre dans les bras de Morphée.

- Maman ! Pourquoi papa est pas avec nous ?

Ma mère me regarde, elle est en train de cuisiner, un bon ragoût comme j'aime :

- Et bien... Ton père a été obligé de partir avec sa famille.

- Pourquoi ? Il va revenir ? Il nous aime plus ? demandé-je en la regardant avec attention.

Elle se mord la lèvre, et quand maman a ce tic, c'est qu'elle cherche un moyen de me dire quelque chose qui va me rendre triste :

- Mon chéri, tu sais, ton père nous adore plus que tout, mais il ne reviendra pas, parce que s'il le fait il aura beaucoup de problèmes alors il doit rester là où il est.

- Mais il me manque à moi ! Je veux mon papa ! protesté-je avec véhémence.

Je la regarde, les larmes aux yeux. Mon père est parti je ne sais où et moi je suis un petit bonhomme de cinq ans, mais je me souviens de lui comme si je l'avais vu hier. C'était un homme bon et doux :

- Je sais qu'il te manque mon cœur, à moi aussi il me manque beaucoup tu sais. Mais tu dois être fort, un jour tu le retrouveras ne t'en fais pas. Allez mon petit cœur, mets la table on va manger.

Je hoche la tête et obéis sagement. Maman est aussi triste que moi, mais elle ne le montre pas, elle veut être forte pour moi.

Quand elle sert le ragoût, je me jette quasi dessus, j'ai toujours aimé ce plat, surtout quand il est fait par maman :

- Killian, mange moins vite tu vas avoir des crampes ! rie-t-elle en me regardant m'empiffrer.

Elle me serre dans ses bras et je ferme les yeux pour savourer son parfum doux et rassurant, le parfum de ma maman.

Je me réveille en sursaut. Un rêve, un stupide rêve ! Je sens la tristesse m'envahir doucement. J'ai l'impression encore de sentir son doux parfum et les larmes me montent aux yeux. Elle me manque atrocement. Je me souviendrais à jamais des circonstances de sa mort. Malgré le temps mon chagrin est vivace et je culpabilise toujours d'avoir été trop faible ce jour-là et de n'avoir pas pu la sauver.

Je regarde autour de moi, il fait jour et je constate que Gabriel n'est plus dans le lit. Il doit sans doute s'être levé depuis des heures car les draps sont froids.

Apparemment, j'ai fait une grasse matinée car il est déjà neuf heures trente.

Je me lève en maugréant car je n'ai nulle envie de sortir de ce lit douillet. Et puis, mon rêve et le souvenir de maman m'ont trop chamboulé...

J'enfile un pantalon et un haut avant de sortir dans le salon où un plateau contenant un énorme petit déjeuner me tend les bras ! Cela tombe bien, je suis affamé, comme toujours d'ailleurs.

Je déambule toute ma journée pour trouver à m'occuper. Tantôt je jette un rapide coup d'œil sur les chaînes TV, mais aucune ne retient mon attention ou je feuillette un livre que je choisis au petit bonheur la chance. Bref, je ne fais rien de bien concret. Vers midi je mange le repas que m'apporte Aaron. J'aime bien ce vampire, je dois dire qu'il est souriant et me permet de me détendre un peu.

Puis tranquillement, le soir arrive et ce n'est qu'après le souper que je prends en solitaire dans ma chambre. À l'arrivé de Gabriel, je remarque de suite qu'il a l'air d'avoir passé une mauvaise journée, je le sens. Il porte sur lui l'odeur d'une personne énervée. Mais subitement dès qu'il me voit, son visage semble s'apaiser et sa senteur change :

- Bonjour Killian, comment était ta journée ?

- Oui, et toi ? demandé-je avec hésitation.

Il me fait un sourire tout en enlevant sa veste et allant se servir un verre de scotch :

- Ça peut aller, j'avais surtout très hâte de te revoir. Au fait, prépare tes affaires nous partons, nous allons dans ma maison de vacances dans la montagne de Black Forest.

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