Gus le magnifique

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Certaines marches craquent tandis que d’autres sont aussi silencieuses que la discussion entre Gus et moi. Il n’a pas le droit de venir ici, de gravir les escaliers. Je peux sentir son souffle rauque dans mon dos et son impatience lorsqu’il fait aller ses doigts sur la rampe tel un virtuose maudit quand je prends mon temps pour accéder à l’étage. Je fais tomber un objet non identifiable dont le son ricoche dans les escaliers trahissant notre présence. Granny bien que, malgré son âge avancé est encore pleine de vigueur, n’est pas dotée de rayons X pour s’apercevoir de la présence de Gus à travers les murs. Ma maladresse légendaire nous couvre, elle se dit s’en doute que je suis seule à grimper à l’étage. Sur le pallier, mon estomac se noue. A ma droite, au fond du couloir, qui semble s’être rapetissé depuis ce matin, les appartements de Granny : sa chambre, son bureau et sa salle de bain personnelle. De l’autre côté, à ma gauche, je m’engouffre pour entrer dans ma chambre le plus rapidement possible et dès que Gus est entré, je ferme violemment la porte derrière lui. Mon cœur bat la chamade : il est enfin dans ma chambre ! Les posters de star du rock qui recouvrent les murs semblent jalouser sa présence tandis que je m’en délecte. Je l’observe contempler mon antre qui renferme tous mes secrets dont les fantasmes à son sujet. Il semble apprécier être dans une pièce qui ne date pas du moyen-âge et ne semble cependant pas étonné de l’encombrement de la pièce. Mon grenier est accessible par une trappe dans le plafond de ma chambre, Granny n’y verra que du feu.

  • C’est ces caisses-là ? Demande-t-il d’une voix bien trop forte à mon goût.
  • Chuuuuuuuuuuuut ! 

Il me regarde. Je détourne la tête mais en relevant mes yeux bleus honteux, il me regarde encore. Je ne le quitte pas des yeux. Je remarque son teint hâlé prendre une teinte plus rouge, ma peau devient encore plus translucide que d’ordinaire. Soudain un cri étouffé et un bruit lourd qui fait trembler les murs nous fait sursauter et me sort de ce moment de gêne particulièrement intense. Nous nous regardons toujours mais la gêne s’est envolé pour laisser place à la crainte. D’un mouvement parfaitement synchronisé nous nous tournons vers la porte. Nous ne disons rien mais je sais pertinemment qu’il pense la même chose que moi : ce n’est pas normal. Son teint devient livide. Comme s’il avait pris conscience de quelque chose qui m'échappe. A quoi pensait-il ? Il me regarde avec un air triste. Je sais que je l’ai déçu en l’emmenant dans ma chambre alors que c’était interdit mais je compte me racheter et copier l’encyclopédie universelle s’il le faut ! Il ouvre la porte lentement. Je ne bouge pas, je suis tellement pétrifiée de honte que je n’accorde pas la moindre importance à ce petit cri étouffé. Gus passe sa tête et son visage disparaît de ma vue. Enfin, son corps se faufile dans le couloir et je me retrouve seule avec mon sentiment de culpabilité. Après quelques secondes à regarder par la fenêtre sans trop savoir sur quoi poser mon regard, je me ressaisis et m’engouffre à mon tour dans le couloir. Je plaque mes mains sur ma bouche lorsque je vois Gus l’oreille posée contre la porte de la chambre de Granny. 

  •  Mais t’es malade ?!  chuchotais-je assez fort pour qu’il m’entende.

Je ne sais quel courage il me prend de m’adresser à l’homme le plus sexy de la terre de cette façon mais je veux lui éviter une mort lente et douloureuse. Moi-même je n’ai pas le droit de m’approcher si près de l’annexe de Granny. Il faut que je le sauve. Je trottine sur la pointe des pieds jusqu’à sa rencontre. Le tapis rouge aux arabesques douteuses qui recouvre le parquet a le don d’étouffer mes petits bruits de pas. Dans un élan d’héroïsme nullement dosé, j’attrape sa main et je le tire vers moi, l’invitant à faire demi-tour. D’une facilité déconcertante, il retire sa main et la pose sur la poignée en cuivre. Mes yeux sont écarquillés.. Je lis une confiance déconcertante dans les siens.

Il faut entrer. Il lui est sûrement arrivé quelque chose, lâche-t-il comme si c’était une évidence.

A part Granny et nous, il n’y avait personne d’autre dans la maison susceptible d’être à l’origine de ce cri.

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