Chapitre 9

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Nathan avait fini par se réveiller en début d’après-midi. Mya se tenait à côté de lui, un livre dans les mains. Il commençait à avoir faim, il n’avait pas mangé depuis la veille.

Il se redressa et s’aperçut qu’il n’avait plus aucun vêtement sur lui.

« Où sont passés mes vêtements ?

— Ils sont en train de sécher, je les ai mis à laver pendant que tu dormais. Comme ce sont les seuls vêtements que tu as maintenant…

— C’est toi qui me les a retiré ?

— Oui. »

Nathan devait se contenter de cette réponse. Mya prit un peignoir qu’elle avait prévu de lui donner, et le lui tendit. Elle lui dit qu’il pouvait l’enfiler s’il voulait manger quelque chose, le temps que ses affaires sèchent.

Il enfila le peignoir puis la suivit jusqu’à la cuisine. Elle lui servit des œufs brouillés, une tranche de bacon et un chocolat chaud. Ce n’était pas spécialement le genre de petit déjeuner qui l’attirait d’habitude, mais il avait tellement fin qu’il dévora tout.

Mya posa le cheval blanc en bois sur la table.

« Tiens, j’ai trouvé ça dans la poche de ton pantalon, je sais pas si c’est un truc que tu veux garder avec toi. »

Le cœur de Nathan s’arrêta de battre quelques secondes : elle ne semblait pas être au courant de quoique ce soit pour le cheval blanc. Il l’avait suivi car il devait suivre cet objet et il était jusqu’à présent persuadé que c’était elle qui le lui avait offert. Et si ce n’était pas Mya mais Amy qui lui avait offert ce cheval ? Sa mère lui avait pourtant bien dit que c’était sa copine qui le lui avait donné avant de partir alors qu’ils avaient passé la nuit ensemble à la maison.

Nathan décida de mettre de côté pour le moment ce sujet, son esprit était assez embrouillé comme ça. Il prit simplement le cheval et le mis dans la poche de son peignoir tout en remerciant Mya.

Il changea de sujet en lui demandant combien de temps il allait rester ici.

« Encore une fois, ça ne dépend pas de moi. Reste ici avec moi et tu seras en lieu sûr.

— Mes parents ont dû paniquer en s’apercevant de mon absence ce matin. Tu crois qu’il serait possible de les prévenir ?

— C’est déjà fait. Je leur ai dit que tu allais bien et que même s’ils insistaient ils ne sauraient pas où tu te trouves actuellement, mais que tu es parti de ton plein gré. J’ai précisé que tu reviendrais.

— Ils ont dit quoi ?

— Ils ont paniqué bien sûr mais je leur ai dit que tu ne reviendrais que s’ils ne se mettraient pas à te chercher. Que ta décision était prise et qu’il n’y avait rien à savoir de plus.

— Merci.

— Je vais devoir m’absenter à un moment donné. Il faudrait que j’aille te chercher des vêtements. Pour les courses on pourra se faire livrer, mais pour les habits tu n’iras pas loin avec une seule tenue.

— Tu peux passer à la maison et prendre des affaires ?

— Non, c'est trop risqué. J’irai t’acheter des fringues tout à l’heure, et l’argent n’est pas le problème si c’est la question que tu te poses. Je ne m’absenterai pas longtemps, je ferai au plus simple : quelques t-shirts, deux jeans et un lot de sous-vêtements. Je ne compte pas faire le tour des boutiques, rassure-toi.

— Pourquoi tu fais tout ça pour moi ? Pourquoi tu me protèges et de quoi ?

— Arrête avec ces questions. »

Mya se dirigea vers le sèche-linge, sortit les vêtements de son invité et les lui tendit. Elle lui indiqua que tout était sec et qu’il pouvait s’habiller. Il prit ses affaires et ils remontèrent dans la chambre. Nathan enfila ses habits et demanda à Mya quand est-ce qu’elle comptait aller acheter de nouvelles affaires.

« Je peux y aller maintenant, ce serait fait.

— Je peux venir avec toi ?

— J’aimerais bien que l’on reste ensemble, mais j’ai peur que l’on te recherche et que ça attire davantage les ennuis. Je me dépêcherai.

— Bon…OK.

— Juste une chose : si tu restes, ne sors pas de cette chambre. Tu restes ici, prends un livre si tu veux. C’est compris ?

— Ça marche. »

Mya le regarda un instant droit dans les yeux pour s’assurer qu’il avait bien compris le message puis sortit de la chambre après lui avoir glissé un rapide “à tout à l’heure”.

Nathan commença à regarder les livres que possédait Mya. Elle devait en posséder une centaine, rangés dans des étagères. Quelque chose l’intriguait sur la collection de bouquins mais il n’arrivait pas à savoir quoi. Il parcouru les titres des livres puis s’arrêta sur “Kafka sur le rivage” de Murakami qu’il avait déjà lu mais qu’il comptait relire un jour. Après tout, ne sachant pas combien de temps il allait rester ici, ça l’embêtait de commencer un livre qu’il ne pourrait finir. Autant en commencer un qu’il avait déjà lu ou parcourir simplement des passages qu’il avait adoré. Il adorait Murakami et avait presque lu tous ses livres. Il le sortit de l’étagère et se rendit compte en l’ouvrant qu’il était neuf. Elle avait dû l’acheter pour le lire plus tard. Il rangea le livre qu’il trouvait trop neuf pour être lu par quelqu’un d’autre que son heureux possesseur. Il sortit alors “Crime et châtiment” de Dostoïevski mais là encore en l’ouvrant il s'aperçut que le livre était neuf.

Il venait de comprendre ce qui l’intriguait en parcourant toute cette collection : tous les livres étaient neufs ! Mya n’avait donc probablement lu aucun des livres qui étaient présents dans sa chambre. Nathan se refusa de se poser davantage de questions mais de se fier à son instinct, comme on le lui avait conseillé dans son rêve. Il ressortit donc “Kafka sur le rivage” puis s’installa sur le lit de Mya.

A peine eut-il entamé le livre qu’il entendit un bruit sourd qui devait venir du rez-de-chaussée. Nathan s’approcha de la porte de la chambre et y colla son oreille pour essayer d’entendre tout bruit qui pourrait lui paraître suspect. Il n’entendait plus rien. Il aurait aimé aller voir mais Mya lui avait interdit de sortir de la pièce le temps de son absence. Il essaya donc d’oublier ce qu’il venait d’entendre car après tout cela pouvait être n’importe quoi. Une fenêtre qui claquait à cause d’un courant d’air ou un chat qui aurait fait tomber un objet quelconque, bien que jusqu’à présent il n’avait croisé aucun animal ici.

A peine eut-il le temps de se retourner pour commencer à se diriger vers le lit qu’il sursauta lorsque l’on frappa trois coups à la porte.

Nathan regarda la porte, s’attendant à ce que l’on essaye d’entrer. Il devait faire confiance à Mya et ne surtout pas ouvrir quoi qu’il arrive. Mais par contre elle ne lui avait pas interdit de parler. Nathan tenta alors une question à la personne qui se trouvait à l’extérieur de la chambre :

« Qui est là ?

— Ouvrez moi juste un instant, je dois vous parler.

— Je vous entends parfaitement bien de l’endroit où je suis, qui êtes-vous ?

— Vous vous souvenez, j’ai été vous chercher en voiture alors que vous étiez en pleine rue en boxer, dans la nuit.

— Vous êtes le père de Mya alors ?

— C’est ce qu’elle vous a dit. Mais je ne suis pas son père. Ce n’est pas sa maison non plus.

— Qu’est-ce que vous racontez ?

— Elle me garde en otage dans ma propre maison et me tuera si je ne fais pas ce qu’elle me demande. Je dois me faire passer pour son père mais je voulais vous avertir que je ne le suis pas. Vous avez pas l’air méchant, et je me fiche de mourir si cela peut vous permettre de… » Il n’eut pas le temps de finir sa phrase que Nathan entendit un long gémissement. Il se mit à reculer dans la pièce, effrayé, jusqu’à tomber assis sur le lit.

La porte s’ouvrit et Mya apparut, couverte de sang, un couteau à la main. L’homme était à genoux, la gorge tranchée. Le corps finit par s’effondrer par terre.

Elle lâcha le couteau puis entra dans la chambre avant de refermer la porte derrière elle.

« Je suis désolée que tu aies dû assister à ça Nathan.

— Mais pourquoi l’as tu tué ? Et qui était cet homme ?

— C’était un violeur et un sadique. C’est pour ça que j’ai choisi cette maison. Je ne voulais pas t’effrayer donc je lui ai demandé de se faire passer pour mon père.

— Et tes parents, tu en as ?

— Je n’en n’ai plus depuis longtemps. Je suis désolée de t’avoir menti et d’avoir tué cet homme. Je fais ce que je peux pour te protéger. »

Nathan commençait à avoir de nouveau confiance en elle. Mya venait de tuer un homme, de lui mentir, ne répondait pas à toutes ces interrogations, mais il avait confiance !

****

Après avoir fini de traîner le corps dans un sac plastique jusqu’au rez-de-chaussée, ils se mirent à creuser un trou dans le jardin une fois la nuit tombée pour éviter d’attirer l’attention. Ils passèrent beaucoup de temps à creuser, même à deux, car il fallait que le trou soit suffisamment large pour faire rentrer le corps et suffisamment profond pour éviter qu’un animal quelconque ne le déterre et attire l’attention.

Une fois le corps enterré et le trou refermé, ils prirent chacun une douche puis Mya lui sortit les vêtements qu’elle venait de lui acheter. Il y avait de quoi se changer sans faire tourner de machine pendant une semaine complète.

Nathan enfila une de ses nouvelles tenues puis s’assit un instant sur le lit. Il avait besoin de souffler après les efforts qu’ils avaient réalisés. Elle s’assit à côté de lui et posa sa tête contre son épaule. Ils restèrent ainsi silencieux plusieurs minutes avant de réaliser qu’ils avaient tous les deux faim.

Ils passèrent à table comme si aucun événement majeur n’avait eu lieu : Mya avait seulement égorgé un homme avec un couteau et ils venaient d’enterrer le cadavre dans le jardin. Nathan se rassura en pensant que c’était un violeur.

Curieusement ils n’avaient pas perdu de leur appétit : tout était déjà de l’histoire ancienne, une histoire qui se trouvait six pieds sous terre.

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