La BMW roulait plus vite que la limite de vitesse autorisée.

Ethan était parti depuis maintenant un peu plus de quatre heures et savait qu’il n’avait pas de temps à perdre. Mais il commençait à fatiguer et devait faire une halte pour prendre un café. Il n’avait quasiment pas dormi de la nuit. Mieux valait faire une petite pause, ne serait-ce que de quelques minutes en prenant un café, que de finir dans le fossé.

Il aperçut un panneau indiquant une aire d’autoroute un peu plus loin, voilà qui tombait à pic.

Il ne pensait pas ce matin-là qu’il allait faire ce trajet. Pour lui, la journée devait se résumer à son travail puis passer la soirée avec son épouse.

Mais il avait fini par faire ce rêve après avoir mis beaucoup de temps avant de trouver le sommeil. Ce n’était pas n’importe quel rêve évidemment, mais l’un de ceux qu’il avait fait il y a maintenant plusieurs années. Un de ces rêves qui l’avaient hanté de réalisme et qu’il espérait ne plus jamais avoir à faire. Le genre de rêve que l’on ne fait pas d’habitude mais qu’il avait fait quand il était plus jeune et qui avait changé sa vie.

Il prit la sortie vers l’air de repos et trouva une place de parking ombragée. Il coupa le moteur et sortit de la voiture. Ses jambes étaient engourdies, il s’étira et marcha quelques instants avant de rentrer dans la petite station-service qui servait également aux automobilistes d’achats en friandises, sandwichs ou encore pour prendre une boisson chaude. Ethan fit de la monnaie en achetant avec un billet de dix euros un sandwich qu’il mangerait en voiture, puis se dirigea vers le distributeur de boissons. Il choisit un café long, introduit sa monnaie puis, une fois la boisson servie se dirigea vers une petite table pour se poser un instant.

Il avait encore plusieurs heures de route à faire et avait peur d’aller bas. Mais il devait aider l’adolescent qu’il avait vu en rêve et qui avait besoin de lui. Il connaissait cette fille aux yeux dont on ne peut déterminer la couleur, il l’avait déjà vue. Il s’en souvenait comme c’était hier. Ce visage et cette silhouette presque irréels mais aussi ce regard et l’attirance qu’il avait eu pour elle. Il ne savait pas comment s’appelait le garçon mais l’avait vu dans son rêve et savait dans quel lieu le chercher.

Le café était encore brûlant, il continuait de le mélanger avec la petite spatule qui était tombée dans son gobelet. Lorsqu’il avait annoncé à sa femme qu’il devait partir, elle n’avait pas compris et voulait savoir où il allait. Il n’avait jamais pu lui raconter cette partie de son passé : comment croire ce qui lui était arrivé ? Il avait lui-même mis beaucoup de temps pour se remettre à vivre. Pas à retrouver un quotidien et ce que l’on pourrait appeler une vie normale, mais simplement se remettre à vivre.

Il avait donc décidé de mentir à son épouse pour couper court et éviter de l’effrayer en lui racontant qu’un déplacement de dernière minute pour son travail était nécessaire. Il se déplaçait très rarement mais c’était déjà arrivé, même si habituellement tout était planifié un moment à l’avance. Elle le crut ou du moins lui fit comprendre qu’elle ne chercherait pas à en savoir davantage étant donné qu’il ne comptait de toutes façons pas en dire plus. Il lui indiqua également que ce n’était l’affaire que de deux ou trois jours maximums. Il espérait au plus profond de lui que ce soit réellement le cas. Il espérait même mieux : pouvoir rentrer à la maison, sain et sauf.

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Il avait fini son café. Ethan emporta le sandwich qu’il venait d’acheter et qu’il mangerait plus tard pendant le trajet puis remonta dans la voiture. Il posa un instant les deux mains sur le volant, ferma les yeux et prit une profonde respiration : “mais qu’est-ce que je suis en train de faire bon sang ? et si je me dirigeais tout droit dans la gueule du loup ? ça se trouve l’adolescent que j’ai vu en rêve n’est qu’un appât pour aller là-bas ?”

Il chassa ces idées de sa tête, rouvrit les yeux et sans réfléchir cette fois remit le contact. Il devait y aller.

La voiture roula à bonne allure : il n’y avait pas de temps à perdre.