Chapitre 156 : jeudi 12 janvier 2006

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En ouvrant ses rideaux ce matin-là, Maureen constata qu'il avait encore neigé dans la nuit. On distinguait à peine la différence de hauteur entre le trottoir et la rue. Elle savait que Jenn et son père avaient prévu de venir jusqu'à Glasgow aujourd'hui et elle espéra qu'ils n'auraient pas de soucis sur la route. Elle se promit de passer un petit appel à Sam sur l'heure de midi pour s'en assurer.

Elle déjeuna tranquillement, savourant son thé Givré qu'elle trouvait particulièrement de circonstances pour ce matin. Elle voulait faire un petit tour chez Mickaël ce midi, se dit finalement qu'elle devrait attendre le lendemain, que les trottoirs soient dégagés. Avant d'ouvrir sa boutique, elle allait d'ailleurs devoir pousser la neige devant chez elle, pour faciliter le passage des piétons.

Elle passa une bonne partie de sa matinée à s'occuper des plantes en pot, ajoutant une ou deux petites décorations dans certaines, réalisant des mariages entre plusieurs pour faire de jolies potées qui pouvaient attirer l'œil et apporter de la lumière dans une pièce en cette saison.

Le midi, elle eut la surprise de découvrir une enveloppe portant l'écriture de sa grand-mère dans sa boîte à lettres. Elle se doutait qu'elle répondait à ses vœux. Elle s'empressa d'ouvrir et de lire le message :

Ma chère petite,

Je te remercie pour tes bons vœux et te souhaite à mon tour une belle et heureuse année 2006. J'attends avec joie la naissance du bébé de Tara, elle m'a dit bien se porter. J'ai vu Kenneth et toute sa petite famille au moment des fêtes, cela m'a fait grand plaisir. J'espère que tu vas bien et que tout se passe bien pour toi.

Je t'embrasse.

Granny

C'était un message court, qui toucha beaucoup Maureen. Elle imagina d'emblée la joie de sa grand-mère à voir les trois petits de Kenneth, et peut-être aussi celui de Gary. Elle se demanda cependant si elle allait pouvoir lui parler de Mickaël et se doutait que ni Kenneth, ni Tara ne l'avaient mentionné devant leur grand-mère.

**

Au cours de l'après-midi, elle vit passer plusieurs clients. Tout doucement, la reprise s'annonçait et elle pouvait espérer faire une semaine tout à fait correcte. Si elle avait renouvelé les plantes vertes, elle n'avait pas fait une trop grosse commande de fleurs en début de semaine, attendant un peu de voir comment cela se passerait. Elle en avait prévu une autre pour le lendemain, de toute façon, afin de pouvoir proposer des fleurs fraîches et de jolis bouquets pour le week-end. Elle reçut aussi la visite de la propriétaire du pub qui lui commanda un bouquet pour le lendemain. Maureen appréciait le geste, cette entraide entre commerçants : si eux mettaient en valeur son travail, elle-même ne manquait jamais d'aller déjeuner chez eux quand elle en avait l'occasion. Elle se félicita d'ailleurs de les avoir revus la veille avec Ingrid et Léony.

Quand le jour décrut, elle s'étonna cependant que la journée soit passée si rapidement. Même si la nuit tombait vite en Ecosse en hiver, elle ne pensait pas que les heures auraient autant filé. En cette saison, elle fermait de toute façon la boutique une heure plus tôt, car elle avait bien remarqué qu'en-dehors du mois de décembre, avant les fêtes, quand les gens faisaient encore des courses tardivement, en janvier et en février, ce n'était plus le cas. Il faudrait attendre les beaux jours pour voir à nouveau plus d'animations dans les rues.

Comme il n'avait pas reneigé de la journée, elle décida cependant de se rendre chez Mickaël. Elle releva le courrier, fit un petit tour rapide pour s'assurer que tout allait bien et sortit du congélateur la dernière part de bouillon de Mummy. Elle nota aussi déjà quelques petites courses à faire samedi midi, pour qu'ils aient de quoi tenir pour le week-end.

Elle était à peine remontée chez elle que son téléphone sonna : c'était Jenn qui l'appelait.

- Bonsoir, Maureen !

- Bonsoir, Jenn ! Quel plaisir de t'entendre ! Tu vas bien ?

- Oui ! Sam m'a dit que tu l'avais appelé ce midi, que tu voulais être rassurée à notre arrivée... Ca a été ! Le plus dur n'était pas à Glencoe, figure-toi, mais entre Tyndrum et Crianlarich, juste avant d'arriver sur le Loch Lomond. 5 milles... On a mis deux heures à les faire. Il y avait eu un accident, à cause du gel... Bref... Heureusement qu'on était en semaine et que ça ne roulait pas trop ! Papa bougonnait un peu, moi beaucoup ! dit-elle en riant.

- Comment va ton papa ? demanda Maureen.

- Il va bien, répondit Jenn. Mais il était content d'arriver. Il a ouvert une bouteille de whisky de Sam pour commencer, histoire de se "remettre" de ces sept heures de route... Soit le double du temps normal en cette saison ! Et toi, comment vas-tu ?

- Bien, dit-elle. Pas beaucoup de clients cette semaine, alors, comme j'ai dû faire une grosse commande parce que j'avais bien vendu durant les fêtes, j'en profite pour refaire des potées, en mélangeant des petites plantes.

- Sam m'a dit que Mickaël était absent ?

- Oui, répondit Maureen. Il est parti en France avec Timothy. Ils devraient être rendus dans le Bordelais ce soir et y passer la journée de demain.

- Ils rentrent quand ? demanda encore Jenn.

- Dimanche après-midi.

- Ok, fit Jenn. Tu es libre demain midi alors, je suppose ?

- Oui, je peux même me permettre de fermer à midi.

- Cela te dit si on vient déjeuner avec toi, papa et moi ?

- Avec plaisir ! fit Maureen en souriant.

- Ok, on passe te chercher... Le pub dans ta rue est ouvert ?

- Oui, on peut y déjeuner sans problème. Et ce sera l'occasion pour moi d'apporter le bouquet que la propriétaire m'a commandé.

- Ok. On se dit vers midi, alors ! A demain et passe une bonne soirée !

- Merci, Jenn et pour vous aussi. Reposez-vous bien...

**

Maureen s'était installée dans son lit, bien au chaud avec un plaid étendu sur ses jambes. Elle lisait. Elle avait envoyé un petit message à Mickaël au cours du repas, et il lui avait juste répondu qu'il la rappellerait un peu plus tard. Elle fut donc heureuse d'entendre son téléphone sonner.

- Bonsoir, ma douce, tout va bien ? demanda-t-il d'emblée.

- Oui et toi ?

- Bien, mais un peu fatigué... On a fait quatre caves sur la journée, en plus de la route... On a goûté des choses intéressantes, notamment un vin blanc d'Entre-deux-mers. Mais bon, en vins blancs, on a ce qu'il faut et on se garde de la marge pour les Loire. Pour le rouge... On doit encore rencontrer un producteur, demain matin, qui travaille en bio, ce qui est encore assez rare dans le Bordelais. Puis on remontera vers Tours.

- Vous faites d'autres caves demain après-midi ?

- Oui. On va passer à Montlouis, chez le fournisseur habituel. J'aurais bien tenté sur Vouvray aussi, mais on n'aura pas le temps, car on a un autre rendez-vous en toute fin de journée à Chinon. On dort sur place, donc le propriétaire nous a dit que si on arrivait un peu tard, ce ne serait pas un problème. Il n'a pas d'autres clients que nous ce soir-là.

- Ca va vous faire encore une grosse journée... dit Maureen d'un ton compatissant.

- Oui...

- Tu crois que vous allez trouver ce que vous voulez ? Demain matin, je veux dire ? s'inquiéta Maureen à imaginer déjà la journée qui les attendait.

- Le vin qu'on veut, oui. Mais les prix... Ca... Je sens que ça va être une autre paire de manches. Il va falloir négocier. Et ce n'est pas ce que je préfère faire, car je sais qu'il y a du travail derrière. Mais certains abusent vraiment de leur notoriété. Néanmoins, Timothy a quelques idées... Et il est plus rompu que moi à ce type d'échanges. On n'oublie pas que notre clientèle est dans l'ensemble plutôt curieuse et ouverte aux suggestions. Même si on est "obligé" d'avoir du Bordeaux à la carte, on peut se permettre aussi de ne pas en avoir des pages et des pages. Et ça, Timothy sait très bien le faire comprendre à nos fournisseurs potentiels. Histoire qu'ils aient en tête qu'on n'attend pas après eux pour faire plaisir à nos clients. Donc, s'ils veulent nous avoir eux aussi comme clients... Et bien, il faut qu'ils fassent un geste.

- Hum, je vois, fit la jeune femme. Et il fait beau, sinon ?

- Froid, mais ça va. On n'a pas de neige.

- Vous avez dîné ?

- Oui, on sort de table ou presque. C'était délicieux. Et j'apprécie vraiment de ne pas avoir à faire la cuisine... et ce, pendant plusieurs jours d'affilée !

- Tu sais, je pourrais me mettre aux fourneaux de temps en temps, ça te reposerait...

- Est-ce que tu mangerais aussi bien que si c'était moi qui cuisinais ?

- Certainement pas ! rit-elle. Mais cela sous-entend que tu doutes de mes talents de cuisinière...

- Alors, je te mets au défi... plaisanta Mickaël.

- Très bien ! Défi relevé, répondit Maureen. Tu verras à ton retour... Il te faut juste patienter un peu !

- Il n'y a pas que pour déguster tes petits plats que je vais devoir patienter... pour te déguster, toi aussi !

Un éclat de rire lui répondit. Il adorait l'entendre ainsi, ce rire si frais, si joyeux, si vivant !

- A demain, mon cœur, dit-elle tendrement. Dors bien.

- A demain, ma douce, répondit-il. Toi aussi, dors bien.

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