Chapitre 56 : lundi 20 juin 2005

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Harris se tenait debout au milieu de son équipe, dans la salle du restaurant. Tout le monde était là. Sa femme, Lisbeth, petite, un peu ronde, toujours bien habillée et très élégante, avait pris place derrière le comptoir, là où elle officiait habituellement, le soir, en alternance avec son mari. Elle avait posé à côté d'elle, dans un vase, le bouquet apporté par Mickaël et confectionné par Maureen pour le transmettre à la femme de Dan qu'elle comptait voir le lendemain. Sam s'était appuyé négligemment contre le comptoir, pas très loin d'elle. Ann, Harry, Jonathan et Vincent, l'autre cuisinier, s'étaient assis sur des chaises, dégagées de deux tables. Julia et Tony étaient debout côte à côte, de même que Timothy, le sommelier. Il s'était appuyé contre une table. Tous avaient les traits tirés, les visages graves, les regards inquiets.

- J'ai eu Mary, la femme de Dan, au téléphone ce midi, commença Harris. Il est donc hospitalisé à Edimbourg. Il a été opéré, mais il y aura une autre intervention, un peu plus tard, pour la greffe. Il souffre, mais elle dit que c'est supportable. Il a pu dormir à peu près ces dernières heures. Elle lui a transmis nos messages et cela lui a fait plaisir.

- Comment fait-elle pour aller le voir ? demanda Julia.

- Elle a pris deux journées de congés, là, pour s'organiser, expliqua le patron. Heureusement que leur fille est assez grande et débrouillarde. Elle est très affectée aussi. Elle n'a pas vu son père encore, Mary m'a dit qu'elle attendait un peu pour l'emmener, qu'il soit reposé et qu'il ait le visage moins marqué.

Quelques hochements de têtes lui répondirent.

- Elle va s'arranger, finir plus tôt les prochains jours pour aller chaque soir à Edimbourg. Normalement, il sera ramené à Glasgow quand ils auront pu lui faire la greffe. Voilà les nouvelles que j'avais à vous transmettre. Maintenant, je voudrais aussi qu'on pense à ce que nous allons faire, comment nous allons nous organiser. Il est hors de question de continuer à tourner comme nous le faisions, à cinq en cuisine, même avec Jonathan. Il n'a pas encore l'expérience nécessaire pour cela. Et vous savez comme moi que cela pourrait devenir dangereux pour tous. Sans compter que la qualité pourrait en pâtir. Nous ne pouvons pas nous permettre cela. J'ai donc pris dès ce matin les premiers contacts pour trouver quelqu'un. Mais en attendant... En attendant, nous allons supprimer le deuxième service pour le début de semaine, le mardi et le mercredi.

Tous se regardèrent sans dire un mot. Ils savaient qu'Harris avait déjà bien réfléchi à la situation et qu'il avait une solution, même provisoire, à leur soumettre. Ensuite, chacun apporterait sa pierre à l'édifice, ses remarques. Mais ce serait lui qui aurait le dernier mot et trancherait. Le patron reprit :

- Mickaël, dans cette perspective, on va aussi repenser les passages en criée. Tu iras en début de semaine, le mardi et le mercredi. Les trois autres jours, je m'en chargerai. Il y aura plus de travail en cuisine en fin de semaine, surtout si on maintient les deux services du jeudi au samedi.

Le jeune chef marqua son assentiment d'un simple signe de tête. Il était impossible de continuer à faire tourner le restaurant, payer les charges et les salaires, sans les deux services de fin de semaine. Ou alors, c'était le chômage assuré pour trois d'entre eux, deux en cuisine et un au service. Au minimum.

- Il vous faut maintenant aussi repenser votre organisation entre vous, en cuisine. Sans oublier que Jonathan n'a pas terminé sa formation. Il est avec nous jusqu'à fin juillet. Si tout va bien, cependant, et j'espère bien entendu que Dan pourra reprendre son poste bientôt parmi nous, cette situation ne devrait pas durer. C'est juste pour me laisser le temps de trouver un remplaçant.

- Ca va se bousculer au portillon, patron, lança Sam. Des gens qui veulent travailler pour vous... ça court les rues.

- Peut-être, Sam, mais je ne veux pas prendre n'importe qui non plus. Non seulement pour la qualité du travail, mais aussi pour vous. Il ne faudra pas que cette personne soit une charge. Il lui faudra pouvoir s'intégrer à votre groupe très aisément, et surtout, très rapidement. Et en cas de souci... Il faudra m'en parler.

Tous acquiescèrent. Julia se permit cependant une remarque, après avoir jeté un regard de connivence à Ann, signe qu'elles avaient déjà parlé de cette possibilité toutes les deux :

- A la fin du service, on peut aider aussi. Et même avant, pour ranger les arrivages... On peut arriver plus tôt, également.

- Merci, Julia. J'accepte ta proposition.

Mickaël écoutait, enregistrait les interventions, les propositions des uns et des autres. Petit à petit, dans son esprit, les choses se mettaient en place. Comment se réorganiser, sans rompre la chaîne de travail, sans surcharger l'un ou l'autre, tout en restant rapides, efficaces et surtout sans altérer la qualité et le service apporté aux clients. Il savait qu'il allait pouvoir compter sur chacun, à l'image de la confiance qu'Harris leur apportait. Mais les fins de semaine seraient en effet "chaudes". C'était aussi pour cela qu'Harris voulait lui laisser plus de temps de repos, notamment le samedi matin.

Harris conclut, afin de les laisser tous repartir sans tarder :

- Bien, on fait comme ça. Le moindre souci, vous m'en faites part, on ajustera. Merci en tout cas à tous, de votre soutien, et de votre confiance.

- Merci à vous, patron, dit Sam au nom de tous.

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