Chapitre 4 : Au revoir.

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En entrant dans l’hôpital, Michael prit conscience qu’il pénétrait dans une part importante de la vie d’Eglantine. En effet, celle-ci avait longtemps connu les grands couloirs blancs, empestant constamment l’odeur du désinfectant et la compagnie d’infirmières personnelles.

Le jour de sa naissance s’avéra être un jour de pluie. Il tombait des cordes sur la ville et l’orage fracassait le ciel lorsqu’elle sortit du ventre de sa mère. L’accouchement fut pénible tant pour sa génitrice que pour cette petite fille dont les trois poils argentés sur le caillou fit sourire l’ensemble de la salle. Le seul trait dont elle avait hérité de sa famille fut cette couleur de cheveux improbable comme s’il s’agissait d’un gène dominant. L’expérience traumatisante eut comme conséquence un bébé à la santé fragile qui reçu des soins particuliers dès son premier jour. L’angoisse de sa mère durant la grossesse jouait en son sens, rendant son enfant particulièrement vulnérable aux dangers du monde qui l’entourait.

Elle fut pouponnée, choyée, surprotéger par sa famille dont la peur enferma davantage cette petite princesse angoissée. Tout l’effrayait, les adultes et même les autres enfants, l’idée de mettre un pied en dehors de leur grande villa, d’entrer en contact avec l’extérieur. Tout l’effrayait et ses parents profitaient de ces frayeurs pour la garder à la maison, sauf quand elle devait se rendre à l’hôpital. La petite Richess se voyait dans l’obligation de faire des sorties de bonne figure. Les médias ne cessaient d’harceler les Akitorishi concernant leur fille “cachée” et dont la scolarité se déroulait à la maison. C’est pourquoi il la sortait de temps à autre pour montrer au monde la beauté de leur adorable Eglantine. Malheureusement, à force de la couver, ces promenades la plongeait dans un stress énorme. Elle ne réagissait pas en pleurant, en se cachant ou en devenant muette comme les autres enfants. En fait, elle vivait les trois et subissait de fortes fièvres accompagnée de tremblements et de baisses de tensions. Les effets de la foule la renvoyait immédiatement auprès de ses infirmières qui firent office de figure parentale. La laisser entre leurs mains était plus facile que d’admettre qu’elle avait besoin d’une aide psychologique.

À dix ans, c’est un docteur qui la sauva de ce calvaire en lui affiliant un des psychologues de l’hôpital alors que ces parents n’avaient pas payé pour. Sa thérapie commença avec le personnel, puis avec les personnes âgées dans le parc. Elle aimait beaucoup le couple “Jacques”, deux amants qui s’étaient retrouvés à l’hôpital. Leur gentillesse et leur bienveillance réussirent à la conquérir. Ils avaient tant d’amour à revendre pour cette petite poupée qui adorait chanter et raconter des histoires derrière ses airs timides. La petite Eglantine devenait connue parmi le troisième âge, il était temps qu’elle fasse connaissance avec d’autres enfants. Ça ne se passa pas aussi bien avec eux. Ils l’intimidaient beaucoup parce qu’elle avait l’air si fragile que la plupart la rejetaient. Malgré tout, elle se fit deux amis. Deux petits garçons qui la trouvait absolument adorable et le restant des filles la mirent encore plus à l’écart. Ce “bonheur” fut de courte durée puisque ces parents punirent le docteur lié à cet affront. Leur fille, voir un psychologue ? Quelle honte de croire qu’elle puisse être malade. C’est à cause de ses réflexions qu’elle se crut justement anormale, comprenant qu’elle avait un problème. Mais c’était une fille intelligente qui arrivait à garder de ce séjour, toutes les expériences positives. Elle le devait, car si ses parents ne l’avais pratiquement jamais laisser allez à l’école et une fois qu'elle aurait onze ans ce ne serait plus le cas. Là, ils voulurent bien s’en détacher pour la mettre à Saint-Clair. Ça avait toujours été leur but, comme pour tous les autres Richess. C’était leurs écoles de prédilection. Parce qu’il y avait les meilleurs professeurs et le meilleur programme de cours. Ensuite, il fallait qu’elle côtoie le reste du grand gratin. C’est certainement parmi eux qu’ils trouveraient son futur partenaire. Dans la tête d’Eglantine c’était impossible qu’elle puisse se rapprocher de quelqu’un à ce point-là. Elle ne se sentait pas à sa place, toujours prise entre le flot d’admiration que les garçons lui portait et la haine que les filles lui renvoyait. Jusqu’à sa première, ça pouvait encore allez, mais elle fut hospitalisée à nouveau parce que ce monde l’angoissait. Ses parent lui dirent que ce serait la dernière fois, quelle était grande maintenant et qu’elle devait arrêter ce cinéma. Incomprise, lorsqu’elle revint à l’école, elle rencontra Shad Berkley, le petit ami caché de Marry Stein. Elle le considérait comme un ami, jusqu’à ce qu’il tombe fou amoureux d’elle, comme tous les autres. Ensuite, le drame vint lorsqu’il se confessa après avoir quitté la blonde la plus populaire de l’école. Ce fut ce fameux soir où il la sauva d’une voiture, mourant devant les yeux de son ex petit-ami et de ceux qu’il convoitait. Quand elle se réveilla à l’hôpital une nouvelle fois, elle sut que c’était trop pour sa famille. Pourtant, il y avait une bonne raison cette-fois, mais ils l’effacèrent. Personne ne devait savoir que le fils des Berkley s’était sacrifier pour la troisième Richess, comme personne ne devait savoir qu’il était en fait destiné à être le futur mari de la quatrième. Aucune ne put faire son deuil et un long harcèlement s'ensuivit. Marry Stein ne la laisserait pas en paix, jusqu’à ce qu’elle rencontre Michael.

La suite de l’histoire, nous la connaissons : ils tombèrent amoureux, opprimant leurs sentiments par obligation. L’amour prit pourtant le dessus, nous ramenant la douce dans notre petit groupe d’amis qui s’étendu même jusque Marry Stein. Même jusque Blear Makes, c’est pour dire. Ce fut la première fois qu’elle avait des copines, trouvant en chacune d’entre elles une amie particulière. Alicia était sa sauveuse, Katerina sa confidente, Blear une complice et Marry prit une place particulière dans son cœur : une compagne de souffrance.

Ce que nous ne savions pas c’est que ce coup de foudre ne datait pas de leur troisième secondaire. À vrai dire, dès leur première année, dès la première fois qu’ils s’étaient rendu sur la grande scène de l’école pour se présenter comme Richess, ils prirent conscience de l’autre. Ce qu’ils avaient ressenti au premier regard se poursuivit durant les mois à venir. À chaque fois qu’ils se croisaient, que leurs prunelles se rencontraient, l’amour les envahissait. Mais ce sentiment mêlé à leurs obligations s’avérait bien trop douloureux. Jamais ils ne pourraient être ensemble et s’il apparaissait que ce soit quand même le cas, la rupture viendrait rapidement.

Finalement, après un an et demi de relation, le jour redouté arriva : les Akitorishi acceptèrent le marché des Challen. Ceux-ci rembourseraient la moitié de la somme astronomique qu’avait coûté ce tableau s’ils laissaient Michael lui dire au revoir.

Il n’osait pas frapper à la porte de sa chambre d’hôpital, sachant qu’il rencontrerait ses parents pour la première fois. Ils ne lui réservaient certainement pas un accueil chaleureux. Quant aux siens, sa mère le pressait tandis que Monsieur Challen faisait preuve d’une patience extraordinaire. C’est le cœur battant qu’il donna trois petits coups sur l'étendue grise et froide. L’homme qui apparut dans l’ouverture se voulait tout aussi glacial : le père Akitorishi aux yeux plus perçant qu’un aigle. Michael lui rendit un hochement de tête en guise de bonjour et fit de même à la femme assise au fond de la pièce dans un fauteuil blanc. Il déglutit et s’avança, suivit de ses parents. Mettre un pied devant l’autre lui semblait être une épreuve. Dès qu’il aurait dépassé les grandes armoires à l’entrée de la chambre, il la découvrirait dans son lit d’hôpital. Jamais il n’eut aussi dur de faire face à sa petite amie. La vue était insoutenable.

Eglantine se tenait assise, adossé à un énorme oreiller et fixait ses mains entremêlées avec lesquelles elle jouait nerveusement. Elle avait perdu tout éclat, tant sa peau rosée que sa chevelure argentée. Ne parlons pas de ses yeux azur dont la transparence amenait un sentiment de vide. Un frisson le parcourut lorsqu’elle les planta dans les siens. Il se mit à faire les cents pas devant son lit, ne sachant que faire. Dans la précipitation, il tourna sur lui-même portant ses mains sur sa bouche. Les parents ne quitterai pas la pièce. Un mélange de colère et d’angoisse monta jusque dans sa poitrine. Il sentait son cœur s’y écraser violemment alors qu’il s’obligeait à ne pas pleurer. À nouveau plongé dans ses yeux, il baissa la tête et poussa un long râle. Elle restait silencieuse, sans expression, brisée. Tant pis pour les parents, il se logea à ses côtés d’un pas précipité et l’obligea à lui donner sa main.

- Écœurant, marmonna la mère d’Eglantine.

- Je ne veux pas qu’il touche ma fille, tonna son père.

- Laissez-les donc se dire au revoir correctement ! s’exclama celui de Michael.

Enfin, elle montrait un peu d’elle-même, ses sourcils se rapprochant l’un de l’autre sur son front rougit de colère. Elle serra sa main dans celle de Michael, ce par quoi il répondit par une caresse, déplaçant une mèche de cheveux derrière son oreille. Il tourna légèrement son visage vers le sien, exprimant toute sa douleur en un regard. Les “je t’aime” restèrent bloqués dans sa gorge et les larmes accrochées à ses cils inondés. Il rattrapa les siennes les arrêtant de revers de pouces alors qu’il rapprochait son front du sien. Du coin de l’œil, il vit les parents détourner leur tête d’un air renfrogné. À quoi bon se retenir puisqu’il s’agissait de leur dernier baiser. Il emprisonna ses lèvres des siennes, tout en glissant sa main dans le bas de son dos. Elle eut un sursaut, reprenant son souffle pour le dévisager. À nouveau, il encadra son visage de ses paumes et lui adressa un sourire sincère.

Le père de Michael s’avança doucement pour récupérer son fils d’une pression sur l’épaule, lui signalant qu’il était temps de partir. Il ne voulait pas lâcher sa main, c’était bien trop tôt. Les sanglots saccadés d’Eglantine, ses doigts s’accrochant aux siens, il retint un hoquet qui sortit dans un bruit pitoyable. Elle le retenait et sa mère perdant patience les arracha l’un à l’autre. Il recula de quelques pas à contre-cœur, impuissant face à son père qui le tirait vers la sortie.

- Michael, couina-t-elle dans un pleur étouffé. Michael, je t’en prie, ne me laisse pas ici, supplia-t-elle ensuite.

- Tais-toi, la secoua sa mère.

Il se mordit les lèvres et lui renvoya un regard sombre. Il se sentait tellement inutile. Jusqu’à la fin, il garda ses yeux plongés dans les siens, dans l’espoir qu’elle l’entende. Il lui criait “je t’aime”, mille fois. Les trois mots voulurent sortit du côté d’Eglantine, mais elle les garda coincé entre ses lèvres qui dansèrent en silence. Le dernier regard coupa le fil rouge qui les liaient, son père l’attrapant par la nuque pour le pousser hors de la chambre. Une fois à l’extérieur, il le repoussa violemment et parcourut le couloir à toute vitesse, cachant honteusement ses larmes dans le creux de ses mains.

Les Akitorishi sortirent de la chambre à leur tour, vérifiant que la famille quittait les lieux comme prévu. Ce temps laissa tout juste le temps à Eglantine, en pleurs, de glisser sa main dans son dos pour récupérer ce qu’il avait glissé dans son bas de pyjama. Sa gorge se serra en découvrant une bague en argent et en or blanc surplombé d’une minuscule perle d’ivoire. Un tout petit papier rose pâle y était accrochée à l’aide d’un fil argenté. Elle l’ouvrit, toute tremblante et sentit son souffle se couper en lisant ses mots : “Be strong until I’m here again”. *Sois forte jusqu'à ce que je sois à nouveau là*

Elle déposa un baiser brûlant sur le mot qu’elle replia en quatre, évitant de le mouiller de ses larmes, avant de la ranger en lieu sûr avec la bague. S’ils lui avaient enlevé l’amour de sa vie, jamais ils ne lui voleraient ce dernier espoir.

***

L’espoir s’avérait s’être répandue au plus profond de chacun de nous, même de Louis et Alicia espéraient que rien ne nous sépare. Imaginer le pire, avec la maladie de Louis, ils comprenaient parfaitement ce que nous ressentions. Plus que d’autres, certains d’entre nous ne voulaient pas entendre cette vérité.

Ils s’arrêtèrent devant la chambre d’Elliot et se dirent au revoir d’un long baiser. Katerina agrippa plus fort son avant-bras, brûlante de désir.

- Tu es sûr que tu ne veux pas rester ? pouffa le roux.

- Il faut vraiment que j’étudie pour le test de demain, répondit-elle d’un ton peu convaincant.

- Je te promets de t’aider à réviser après avoir étudié ton corps, fit-il en glissant un bisou dans son cou.

- Ce n’est vraiment pas raisonnable, souffla-t-elle. Non, allez j’y vais !

- Attends, la retint-il. Kat, tu dois le savoir… quand ils sont venus chercher Michael, sa mère nous a surpris alors que je le consolais. Ils nous ont vus, répéta-t-il d’une voix presque tremblante et en saisissant sa main.

Le sérieux qui gagna le visage de Katerina s’envola en même temps que sa rationalité. Elle l’embrassa violemment et il la récupéra dans ses bras pour répondre à sa fougue. Quelques coups de langues et jeux de regards plus tard, il l’emmena dans sa chambre qu’il ferma d’un geste vif. L’ordre de ces jours résonna comme une évidence : profiter de chaque instant.

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