Chapitre 10

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Alyson consulta sa montre pour la quatrième fois, suivi de son téléphone portable. Elle était certaine qu’Hadrien Toll lui avait donné rendez-vous à six heures cinquante à la gare. Et pourtant, elle avait scruté les lieux de fond en comble, parcourut l’espace en long en large et en travers, aucune trace de l’homme. Elle n’avait pas non plus de nouvelle de sa part et bien entendu, il était injoignable.

Avait-elle mal compris ? Ces derniers mois, elle n’était vraiment pas douée avec les hommes. Deux messages sur son répondeur suffisaient, si elle en laissait un troisième, elle risquait de ne plus maitriser ses propos.

Quand il daignerait consulter son portable, il découvrirait également près de dix appels en absence et quatre textos. Alison ne voyait pas ce qu’elle pouvait faire d’autre.

Tout bien considéré, elle avait peut-être une plus grande part de responsabilité qu’elle ne le croyait dans la trahison de Guillaume. Elle espérait que ce voyage apporterait des éclaircissements sur les motivations de son ex-fiancé.

Comment pourrait-elle à l’avenir faire confiance à un autre homme ? Comment ne pas redouter de reproduire le même schéma ?

Voilà en partie pourquoi elle devait découvrir ce qui était passé dans la tête de son compagnon. Tout comme elle voulait vérifier si elle pouvait encore se fier à son instinct, celui qui refusait toujours, en dépit de l’évidence, de croire qu’il soit allé voir ailleurs si proche de leur mariage.

La jeune femme trépignait donc de voir arriver le détective tout comme son absence augmentée son angoisse. Elle avait conscience qu’il était ridicule de se mettre une telle pression quand il serait préférable qu’elle tourne la page. Excepté qu’elle ne savait pas comment le faire sans en passer par ces investigations.

Plus jeune déjà, elle éprouvait cette nécessité absolue de comprendre. Ses enchaînements de « pourquoi » avaient le don d’exaspérer sa mère, car celle-ci savait que sa fille ne se contenterait pas des réponses fournies. Chaque réponse entrainait une nouvelle question.

Où était ce satané détective ? Pourquoi insister sur la ponctualité si lui-même en était incapable ? Se moquait-il d’elle ? Elle avait le sentiment qu’il la menait en bateau et elle ne le supportait pas. S’il ne voulait pas d’elle, il lui aurait suffi de le dire.

La colère prenant le pas sur le reste, elle se dirigea vers la sortie quand une main se posa sur son épaule, la coupant dans son élan. Elle se retourna pour tomber nez à nez avec Hadrien Toll, ce qui ne fit qu’accentuer son énervement.

Pour qui se prenait-il à la fin ?

Les mains sur les hanches, elle planta son regard dans le sien. Cette fois, elle n’avait pas l’intention de masquer ce qu’elle ressentait. Au contraire. Hors de question qu’il lui refasse le même coup ultérieurement. Mieux valait pour lui qu’il se révèle d’une compagnie exemplaire durant les prochaines heures. Il y avait une différence entre se montrer polie et se faire prendre pour une imbécile.

Le fils d'hadrien avait mal choisi son moment pour piquer une crise et refuser de passer les prochains jours chez son autre père alors même que quatre jours plus tôt il harcelait Hadrien pour savoir quand il retournerait dans sa deuxième maison.

Hadrien préférait dans la mesure du possible arriver le premier à un rendez-vous et ne supportait pas d’être en retard. Depuis un peu plus d’un an, il courait après le temps entre sa progéniture et son job, il ne savait plus où donner de la tête.

À en juger par l’attitude de sa cliente, cette dernière n’appréciait pas de poireauter près de vingt minutes. Ce fut les minutes nécessaires pour parlementer avec son fils. Appeler son ex afin qu’il gère le problème aurait été plus rapide. Cependant, l’enquêteur ne pouvait se permettre de montrer le moindre signe de faiblesse s’il souhaitait conserver la garde alternée de Isaac.

— Allons-y avant de rater notre train dont le départ précède celui de votre fiancé.

Ce type ne manquait pas de toupet ! Alyson fit de son mieux pour suivre le rythme soutenu imposé par son compagnon de voyage.

Ils parvinrent à leur siège quelques secondes avant que ne retentisse le coup de sifflet signalant le départ.

— C’était juste.

Ne lui avait-on jamais expliqué qu’il y avait des situations où il était préférable de se taire, en l’occurrence en ce moment ? Alyson prenait sur elle pour ne pas se montrer grossière avec lui, se demandant s’il ne le faisait pas exprès pour la tester où quelque chose du genre.

Alors qu’elle se pensait tranquille, Hadrien Toll entama une conversation des plus futiles sur la météo annoncée pour les prochains jours.

S’il voulait vraiment tenir une conversation badine, il allait être servi ! Le temps était venu d’en apprendre davantage sur son compagnon de retour afin de voir à qui elle avait affaire.

— Avez-vous toujours voulu devenir détective privé ?

— Et vous, avez-vous toujours voulu travailler dans l’administratif ?

— Ce n’est pas une réponse.

— Votre réplique non plus.

À ce rythme, ils n’étaient pas sortis de l’auberge. Alyson n’osa pas vérifier la durée exacte prévue pour leur transport de peur de déprimer. Quelle idée saugrenue avait-elle eu d’effectuer ce voyage en compagnie de cet homme ?

— Je ferais mal mon métier si je m’ouvrais aussi facilement à vous et chercher pas à détourner la conversation sur votre personne.

Cet homme était bien différent de son cercle habituel. Une expérience à la fois intrigante et déstabilisante.

Remarquant que le visage de sa cliente se renfrognait, Hadrien décida de lâcher un peu leste. Son intention n’était pas de se la mettre à dos. Le séjour tout comme le reste de son enquête n’en ressortiraient que plus compliqués. Et il avait assez de complications dans son existence ces derniers mois.

— Pas vraiment. Ça m’est tombé dessus un peu par hasard. Il s’avère que je suis plutôt bon dans mon domaine.

Alyson soupçonnait qu’il y avait une histoire intéressante là-dessous, mais visiblement elle ne la connaitrait pas aujourd’hui.

— Que fait-on maintenant ?

— On se rend à l’hôtel, j’en ai pris un non loin de notre cible, mais suffisamment à distance pour limiter les risques qu’il ne vous remarque.

Hadrien héla un taxi au sortir de la gare qui les conduisit rapidement à leurs destinations. Le détective laissa un généreux pourboire. Alyson espérait qu’il ne le lui facturait pas. Elle ne prévoyait pas de consacrer un budget exorbitant à cette enquête. Son inquiétude n’échappa pas à Hadrien qui aurait pu la rassurer, mais préféra s’abstenir. Il était préférable qu’il ne se prive pas d’une rallonge éventuelle en expliquant qu’il avait une caisse prévue pour les extras sous réserve que ceux-ci ne s’avéraient pas démesurés. Il était toujours utile de se mettre dans la poche tout un certain nombre de personnes (chauffeur, portier…).

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