chapitre 6

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— Veux-tu que je t’accompagne ? lui demanda pour la quatrième fois Élodie.

— Non, ça ira.

— D’accord, mais tu me rejoins dès que vous avez terminé.

— Promis.

Les deux jeunes femmes se serrèrent dans les bras avant de se quitter.

Le pas d’Alyson se faisait lent. Elle avait l’impression de se rendre à l’abattoir. Dans quelques minutes, le verdict tomberait. Malgré l’évidence de celui-ci, le doute persistait. Elle ne parvenait pas à croire que Guillaume avait réellement pris une maitresse. Pourtant dans peu de temps, elle tiendrait entre ses mains les preuves indubitables de sa trahison. Impardonnable ? Il lui restait à trancher sur ce point.

Prenant une profonde inspiration, aussi dignement que possible, elle pénétra dans le même café que pour leur première rencontre. Elle trouva rassurant le choix d’un lieu connu même si elle avait conscience du ridicule de ce sentiment. Peu importait où elle se trouvait au moment de découvrir ce qu’elle redoutait le plus. Alyson n’avait pas réussi à taire cet espoir fou qu’il y ait une autre explication au comportement étrange de son fiancé. Dans sa tête, Guillaume mettant tout en péril pour une autre femme ne possédait pas le moindre sens. Il était bien trop pragmatique et calculateur pour cela.

Plus tôt dans leur relation, possible. Mais maintenant qu’ils s’approchaient du but, qu’ils touchaient du bout des doigts la vie qu’ils souhaitaient ardemment, c’était incompréhensible. Mais est-ce que l’infidélité était supposée avoir un sens ? Elle le devrait, Alyson en était convaincue.

La jeune femme vit Hadrien Toll avant qu’il ne la remarque lui-même. Il affichait une attitude parfaitement décontractée comme lors de leur précédent entretien. Il ne se sentait pas concerné par les conséquences des révélations qu’il s’apprêtait à lui faire. Il exécutait un job pour lequel elle le payait, point. Alyson ne représentait rien pour lui. Pourquoi en serait-il autrement ? Combien de femmes comme elle, avait-il vu défiler ces dernières années ? Probablement beaucoup trop. Un nombre suffisant en tout cas pour montrer une totale indifférence. Attitude qu’Alyson lui enviait. Elle aimerait pouvoir gérer la situation de manière si détachée, de la traiter de façon impersonnelle, sans que cela ne la touche. Cependant, elle en était incapable. Elle s’était impliquée, avait misée toutes ses billes dans cette relation dont le mariage ne devait représentait que le début d’un long parcours côte à côte.

Parvenue à sa hauteur, Alyson détailla le visage du détective à la recherche d’un indice concernant ce qui allait suivre. L’homme affichait un air parfaitement neutre. Si son comportement social laissait à désirer, ce n’était pas le cas de ses manières professionnelles. Peut-être était-ce la raison pour laquelle il avait choisi ce métier.

Constatant l’arrivée de sa cliente, Hadrien referma son journal et le posa sur la table basse devant lui. Il observa la jeune femme s’installer puis se commander à boire. Sans son expérience, il n’aurait pas remarqué l’extrême tension qu’elle tâchait de dissimuler. Il admirait sa détermination à ne rien laissait paraître. Il n’aurait pas à gérer son flot de larmes parce qu’elle se serait effondrée. Un bon point pour elle.

Bien que ce ne fut pas la première fois qu’il se retrouvait à conforter les soupçons d’une personne trahie par sa moitié, cette affaire sortait du lot sans qu’il ne parvienne à l’expliquer vraiment.

A contre cœurs, il lui tendit l’enveloppe contenant les maigres preuves qu’il avait réunies. Les mains de la jeune femme ne tremblèrent pas lorsqu’elle s’en saisit. Il aurait préféré obtenir des photos sans équivoque du fiancé avec sa maitresse. Mais l’homme redoublait de vigilance, preuve manifeste qu’il avait quelque chose à cacher. Le prendre en flagrant délit exigerait du temps, beaucoup de temps. Or Hadrien avait déjà sa prochaine mission au long cours, plus que généreusement rémunérée, en prime. Il ne pouvait pas se permettre de consacrer des jours supplémentaires voire des semaines à l’infidélité manifeste de ce salopard, même pour les beaux yeux de sa charmante et intrigante cliente. Le détective avait été tenté de mener sa propre enquête sur la jeune femme pour finalement renoncer. Il ne savait que trop bien ce qui se produisait lorsqu’il s’impliquait plus que nécessaire dans les missions qui lui étaient confiées. Surtout quand une personne telle que sa cliente était concernée.

— Vous ne l’ouvrez pas, constata-t-il alors qu’Alyson tenait encore avec fermeté l’enveloppe dans ses mains.

— Vous confirmez que mon fiancé…

Les mots lui manquèrent cédant leur place à une boule qui s’était formée dans sa gorge. Elle ne parvenait toujours pas à formaliser la situation pourtant évidente. Qu’est-ce que cela signifiait sur elle ?

— Votre fiancé entretient une relation avec une certaine Éva, tout est à l’intérieur de l’enveloppe.

C’était plus que ce qu’Alyson souhaitait savoir. Connaître son prénom rendait cette inconnue trop réelle à son goût. Plus question de nier l’évidence.

Elle finit par ranger les documents dans son vaste sac à main, sortit son chéquier et paya le détective avec l’espoir qu’une fois son argent en poche il s’en irait. Mais à sa surprise, il n’en fit rien.

Comprenant qu’il n’avait pas la plus petite intention de bouger le premier, Alyson se décida à se lever mettant un terme à leur rendez-vous non sans l’avoir préalablement remercié pour ses services.

En sortant, elle fut accueillie par un vent rafraichissant et salutaire. Elle ne se sentait pas la force de regarder les preuves rassemblées par Hadrien Toll. Elle disposait de l’information la plus importante. Guillaume fréquentait quelqu’un d’autre.

Elle fouilla sa mémoire à la recherche de la mention de ce prénom par son fiancé, en vain. Tant de questions se bousculaient dans sa tête. Elle avait besoin de rester seule un moment si bien qu’elle entra dans le premier bistrot qu’elle croisa sur sa route.

Elle commanda un soda qu’elle ne toucha pas, tout comme son infusion avec Hadrien Toll.

Élodie attendait qu’elle la rejoigne, mais Alyson ne pouvait se résoudre à regarder les documents. Or son amie voudrait sans doute qu’elle les lui partage afin de mieux la consoler. Alyson n’avait pas besoin qu’on la réconforte, mais de mettre de l’ordre dans sa tête pour le faire ensuite dans sa vie.

Elle se contenta donc de lui envoyer un message bref : Guillaume me trompe.

Puis elle éteignit son téléphone pour ne pas être dérangée le temps nécessaire.

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