### Amina ###

Je sortis lentement de mon sommeil et vis devant moi le visage reposé de Pierre. Mon mari ! Enfin, plus d’incertitudes ! Ninah était encore couchée sur lui, mais cela ne le dérangeait pas apparemment. Ils étaient encore endormis profondément. Ninah avait le sourire aux lèvres dans son sommeil, Pierre tenait un sein, dont le téton gonflé émergeait entre ses doigts.

Je passai avec le dos de ma main sur leurs joues, ce fut Ninah qui ouvrit les yeux la première.

– Bonjour Amina, alors tu as bien dormi ?

– Oui, petite sœur, de plus je suis heureuse !

Pierre s’ébroua aussi et nous donna des baisers sans discontinuer. Il lâcha le sein de ma sœur pour se saisir du mien, causant une vibration profonde dans mon corps. Par-dessus mon corps, il consulta le réveil sur la table de nuit.

– Mes amours, je ne veux pas vous bousculer, mais ce soir nous prenons l’avion pour Paris, on partira avec peu de bagages car comme promis, le premier jour à Paris nous ferons du shopping pour que vous ne soyez pas des Africaines sortantes de votre brousse !

– Oh, Pierre cela me rappellera les achats de mes vêtements de travail !

– Sauf que cette fois, je ne serai pas à regarder ton corps par l’espace entre les rideaux de la cabine d’essayage. Maintenant, je connais ton corps !

– Pierre, dit Ninah, je dois encore aller au marché pour acheter une réserve d’herbes pour tes fortifiants !

– Oh non Ninah, si la douane fouille nos bagages, nous finirons en prison pour importation frauduleuse de drogue. Rassure-toi Ninah, à Paris dans le quartier africain où tu pourras acheter tout ce dont tu as besoin, même si les prix sont cinq ou dix fois les tarifs d’ici.

– Oui, ajoutai-je, lorsque j’étudiais en France, j’allais acheter dans ce quartier tout ce dont j’avais envie pour me rappeler les goûts et les mets d’Afrique. Ne t’inquiète pas petite sœur, ne t’encombre pas de toutes les herbes qu’on pourra acheter en France. Et si on a besoin de calmants ou de médicaments, les pharmacies sont toujours de bons conseils avec les médicaments que les blancs absorbent lorsqu’ils ont mal de tête ou lorsqu’ils sont fatigués !

– Prenez surtout quelques boubous pour parader le soir dans les hôtels et se vêtir dans l’avion pour passer une nuit confortable. Lysa a déposé quelques boubous qui vous donneront un cachet particulier, qui vous donneront de la classe !

– N’oubliez pas vos documents de voyage, et vos passeports. Vous les rangerez dans vos sacs à main avec vos bijoux, vous garderez ces sacs en permanence avec vous et ne les perdez jamais de vue ! La lanière vous permettra de les porter en bandoulière.

– Il y a des voleurs en France ? demanda Ninah.

– Oui, petite sœur, plus qu’à Kinshasa !

– Pierre, avant que je ne l’oublie, merci pour tout, je suis ta femme maintenant, mais tu pourras toujours compter sur moi ! Je suis heureuse et je veux que tu le saches !

Pierre ne répondit rien, mais m’embrassa longuement.

***

Zakpa nous conduisit à l’aéroport. Ninah était impressionnée et fut un peu stressée lorsque le douanier examina son passeport et demanda la raison de son voyage.

– J’accompagne ma sœur et mon beau-frère dans leur voyage ! Nous allons visiter la France ! répondit-elle sans hésiter.

Pour moi, il ne fit aucun commentaire, mon passeport français tout neuf, fut examiné sous toutes les coutures, mais le fonctionnaire ne fit aucun commentaire. Le passeport de Pierre, déjà rempli de cachets et tampons reçut juste un tampon supplémentaire et un « bon voyage ». Je notai que la valise de Pierre ne fut pas contrôlée, alors que Ninah et moi dûmes ouvrir nos bagages qui furent examinés soigneusement ! Ninah me regardait en oblique, je compris qu’elle paraissait soulagée de n’avoir emporté rien d’illicite !

Pierre avait vraiment arrangé notre voyage dans le confort ! L’attente avant embarquement se fit dans un local avec des sièges confortables et une hôtesse nous offrit des rafraîchissements et un journal français pour Pierre. Nous étions en première classe, dans des sièges confortables. Dans l’avion, nous étions dans un bloc de trois sièges et j’offris à Ninah le siège fenêtre alors que Pierre prit le siège couloir.

Au moment du décollage j’avais la main de Ninah qui me serrait la droite pendant que ma main gauche était blottie dans la main de Pierre.

Après le repas du soir, je montrai à Ninah comment incliner son siège et lui conseillai de dormir un peu. Je fis de même en mettant ma tête contre l’épaule de Pierre qui écoutait de la musique avec les écouteurs fournis par l’hôtesse.

Je lui souris car je perçus dans le lointain qu’il écoutait de la musique classique. Il me souhaita une bonne nuit avec un bisou sur mon front.

### Ninah ###

Malgré le bruit et l’excitation je m’étais endormie et je me réveillai avec ma tête dans les bras d’Amina. L’hôtesse voyant que je ne dormais plus m’offrit aimablement une boisson fraîche et me demanda si je voulais un petit-déjeuner avec café ou thé. Je choisis un café. Amina, elle, prit un thé après m’avoir donné un baiser et m’avoir demandé si j’avais bien dormi.

Pierre, nous salua toutes les deux.

– Le voyage passe toujours plus rapidement lorsqu’on peut dormir, de toute façon, à notre arrivée à l’hôtel nous pourrons toujours faire une petite sieste avant de dévaliser les magasins.

Le petit-déjeuner était succulent, les croissants étaient chauds comme sortis du four ! C’était super de me faire servir comme une grande dame. Amina me rassura :

– Oui, Ninah, sauf exception, ici tu n’es pas une boyesse mais une femme voyageant en première classe ! donc tu es servie en fonction du prix qu’on a payé pour voyager. Ce sera comme ça durant tout notre voyage. Personne ne saura que tu as été la boyesse de Pierre. Maintenant tu es la sœur de la femme de Pierre et en privé tu es la coépouse ! Tu as un rang social et même pour les blancs tu n’as pas à te sentir inférieure. Ninah en Europe c’est l’argent qui impose le respect.

– Qu’est-ce que vous complotez ? intervint Pierre.

– J’expliquais à Ninah qu’en Europe, ce n’est plus le pouvoir de la couleur de la peau, mais le pouvoir de l’argent. Ninah comprend petit à petit qu’elle est assise en première classe et que c’est normal que l’hôtesse de l’air la serve.

– Oui, Amina tu as tout à fait raison ! dit Pierre.

– Alors c’est ça le travail de Brigitte ? demandais-je.

– Tout à fait ! répondit Pierre, sauf que Brigitte est responsable de toute l’équipe des hôtesses et stewards à bord de l’avion. Lorsque l’avion est plein de passagers, elle donne le coup de main pour aider son équipe.

– J’ai compris ! C’est donc le pouvoir de l’argent, répétais-je.

Entre-temps j’avais terminé mon repas et une hôtesse me demanda avec un grand sourire si elle pouvait débarrasser.

– Merci beaucoup Madame, vous êtes bien gentille ! lui répondis-je.

Elle me répondit avec un grand sourire. Je pris exemple sur Pierre qui avait toujours été aimable et gentil, je ne serai jamais hautaine ni méchante, car moi aussi j’avais été en bas de l’échelle sociale et j’avais subi l’arrogance des personnes ayant le pouvoir ! Mon ancien patron en était un bon exemple.

Entre-temps, le ciel devint lumineux et j’aperçus entre les nuages le sol couvert d’arbres, de maisons et de routes. L’hôtesse revint en souriant pour me demander d’attacher ma ceinture car nous allions atterrir.

La sortie de l’avion se fit sans bousculade avec juste notre bagage à main. Nous entrâmes dans l’immeuble en passant par un grand tuyau sans voir dehors. Puis nous fîmes la file devant un guichet où comme au départ nous dûmes montrer notre passeport. Je suivais dans la rangée derrière Pierre et Amina.

Pierre passa sans encombre, Amina dut attendre un peu car le fonctionnaire examina son passeport à toutes les pages. Elle confirma être la femme de Pierre et elle put passer. Pour mon passeport, le fonctionnaire prit même une loupe pour vérifier la page de mon visa et me rendit mon passeport en me souhaitant « bon séjour en France ! »

Nous arrivâmes dans un grand hall où les valises arrivaient sur des grands tapis roulants. Pierre vit très rapidement nos trois valises et les mit sur un chariot pour sortir. Nous passâmes encore devant les douaniers mais qui ne nous demandaient rien. Car ils virent que nous étions ensemble avec Pierre. À la sortie un homme tenait un grand panneau avec le nom de Pierre, il nous guida vers une limousine et chargea les valises dans le coffre pendant que nous prîmes place à l’arrière de la voiture.

Le chauffeur nous souhaita bonne arrivée et prit la route vers la ville.

### Pierre ###

Je fus content d’être à nouveau à l’air libre, même s’il faisait encore frais ce matin, le passage de l’immigration s’était bien passé et j’aspirai à retrouver rapidement l’hôtel pour compléter ma nuit trop courte. Amina connaissait encore bien Paris et expliqua à Ninah que la route vers le centre-ville serait encore longue.

Puis elle montre au loin la tour Eiffel.

– Nous sommes presque arrivés ! dit-elle en me souriant.

– Oui ce ne sera plus très long, ajoutai-je.

À la réception on nous remit les cartes d’accès sur présentation de mon passeport. Je remis au réceptionniste les pièces d’identité des femmes en rassurant Ninah que tout à l’heure on nous remettrait les documents.

À l’entrée dans la suite Ninah resta muette, Amina la poussa du coude pour qu’elle entre car elle était pétrifiée devant l’immensité de la suite avec un salon et deux chambres. Lorsque le garçon d’étage eut déposé les valises Ninah ouvrit enfin la bouche.

– Pierre ! c’est magnifique !

– Oui, mais rassure-toi ma gazelle, on dormira ensemble ! Je propose d’ailleurs qu’on se couche encore un peu pour continuer la nuit qui fut trop courte pour moi !

Quelques minutes plus tard, nous étions sous les draps ; Amina et Ninah se lovèrent contre moi et je m’endormis sans délai.

NDA : Voilà le début du voyage ! Ninah sera un peu dépaysée mais s’adaptera très vite.

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