Chapitre 33 : Qu'est-ce qu'il se passera ?

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  • Personne ne doit savoir, même pas Nice…
  • Qu’est-ce que tu ne veux pas qu’on sache exactement ? Que tu as couché avec Alex ou qu’il t’a pris ta virginité ? demanda Laure avec ironie.
  • Tu pourrais le dire autrement… Les deux ? Si possible. Mais je ne veux surtout pas qu’on sache que c’était ma première fois…

D’un regard insistant, la demoiselle aux longs cheveux mauves l’invita à poursuivre.

  • Je préférais que tout le monde continue de penser que je l’ai déjà fait...
  • Maintenant c’est le cas, la coupa-t-elle.
  • Très drôle, fit Faye en levant les yeux au ciel. Non, je ne veux pas qu’on sache, je veux garder mon statut et surtout ne pas passer pour une sainte-nitouche.
  • Alors si tu ne veux pas que Nice soit au courant, c’est parce que tu penses que ça en est une ?
  • Pas du tout ! Mais elle est si pure, je la respecte. Elle n’a jamais eu besoin de faire semblant pour ça. Moi je suis Faye Fast, une grande gueule, un peu girouette sur les bords qui s’est comment s’amusée… Je ne veux pas qu’elle sache, parce qu’elle aurait sûrement honte de moi. Tout ça, elle n’approuvera jamais…
  • Pourtant, aujourd’hui elle est en couple avec Selim, tu ne penses pas qu’elle pourrait comprendre ?
  • Mais nous ne sommes pas en couple avec Alex ! C’était juste… du sexe… comme ça, non ?
  • C’est à toi de me le dire, ça…
  • J’en sais rien, mais promets-moi que tu ne diras rien ?
  • Rassure-toi, sourit-elle, contrairement à certains, je suis une tombe.

Au pas de la porte, Faye hocha de la tête en guise de remerciement.

  • Merci Laure. Merci pour tous tes conseils, ajouta-t-elle avant de s’éclipser.

***

Le même matin durant lequel Faye avait été prise au piège, Nice vivait un réveil bien différent. Contrairement à sa meilleure amie, la petite Challen avait dormi toutes ses heures de la nuit. Celle-ci évitait les écarts pour se rendre tous les jours à l’école au meilleur de sa forme. S’agissait-il là du secret de sa peau de porcelaine ? Malgré une discrétion implacable et ses airs timides, Nice resplendissait. C’était une simple jeune fille de quatorze ans, mignonne, mais qui manquait un peu de confiance en elle-même.

Les livres de cours du jour à bout de bras, elle repositionna sa frange à l’aide du miroir de sa coiffeuse. Elle ne souriait pas.

Elle n’était peut-être pas aussi simple que ça, finalement. Son reflet montrait une personne bien trop sérieuse pour son jeune âge. Assidue, intelligente, au point d’avoir sauté une classe à la grande Saint-Clair. Richess dans l’âme et tenu par les responsabilités, elle se devait de maintenir son niveau.

Ces derniers mois avait été les plus heureux de toute son existence. Avant Selim, avait-elle connue autre chose que les études ? Ce dernier l’avait sortie d’un tourbillon incessant dans lequel elle se convainquit qu’elle devait replonger. Depuis qu’ils sortaient ensemble, elle s’était écartée du droit chemin. Une esquisse vint égayer son visage pâle lorsqu’elle pensa au trouble-fête qu’il était, mais son sourire s’éteint bien vite. Si elle acceptait le danger de leur relation, elle s’effrayait des conséquences de cette première dispute. Elle regrettait les mots qu’elle lui avait envoyés à la figure et ne savait pas comment lui faire face à nouveau. Et s’il ne savait pas non plus comment faire ? Selim était de nature nerveuse, ou pire, peut-être lui en voulait-il vraiment ? Elle n’avait reçu aucun message de sa part. Mais elle comprenait, car elle avait manqué de gentillesse. Seulement, elle savait qu’il ne pourrait comprendre son envie de travailler davantage. Elle le devait.


Fixant toujours son reflet, elle fronça les sourcils et serra les poings pour se donner de l’énergie et du courage. Aujourd’hui, elle s’excuserait, avait-elle pensé. Mais d’abord, elle se concerterait avec sa meilleure amie.

En sortant de l’internat, un pincement au cœur la gagna. Même si elle avait été méchante, elle avait espéré que Selim l’aurait rejoint au point de rendez-vous habituel. C’est tristement qu’elle se rendit jusqu’à l’école. Un autre espoir tomba à l’eau, lorsqu’elle constata que Faye n’était pas là. L’expérience de ces derniers jours la conforta dans le fait qu’elle ne viendrait certainement pas en cours.

“Qu’est-ce qu’il se passe aujourd’hui ?”, pensa-t-elle, alors que tous ces plans se voyaient contrecarrés. Une main dans son dos la réconforta quelques instants, jusqu’à ce qu’elle croise les yeux turquoise de Loyd.


  • Salut Nice, comment tu vas aujourd’hui ? lui demanda-t-il de sa voix la plus douce.
  • Ça va… Est-ce que tu sais où est Selim ? Ou Faye ?
  • Vous n’êtes pas venus ensemble ? s’interrogea-t-il en regardant autour de lui. C’est rare… Oh, je vois, comprit-il.

Ce dernier eut de la peine en voyant sa mine triste.

  • Est-ce que tu veux me raconter ?
  • No… Non, pas la peine…
  • D’accord, mais tu sais bien que tu peux te confier à moi si tu le souhaites, fit-il en lui prenant doucement la main.
  • Merci, Loyd, balbutia-t-elle, les yeux humides.
  • Viens, allons rejoindre les...

Le regard de Loyd s’arrêta sur le banc qu’ils avaient l’habitude de partager. Laure et Sky y étaient déjà installés, mais seuls. Il était rare à cette heure-ci que le groupe soit si peu complet. Cette vision lui fit du mal, laissant un quart de seconde une expression douloureuse se dessiner entre ses deux sourcils.


  • Toi aussi, tu peux me parler, dit alors Nice après s’être surpris de le voir peiner.
  • Toujours aussi observatrice, souffla-t-il avant de reprendre un sourire courtois. Allons les rejoindre.

À peine eurent-ils le temps de faire quelques pas vers leur amis que Kimi arriva en trottinant. Sa remarque eut bon d’enfoncer le couteau un peu plus loin.


  • Selim, n’est pas là ? s’étonna-t-elle.
  • Non…
  • Lui alors, j’espère qu’il vient, on a prévu une séance de danse aujourd’hui…

S’il s’y rendait, sans même avoir pris la peine de discuter avec elle, bien qu’elle eu du mal à se l’avouer, elle serait jalouse.


Il arriva finalement, quinze minutes avant que la cloche sonne. Il avait l’air très fatigué. Secrètement, Nice se demandait s’il n’avait pas eut du mal à s’endormir à cause de leur dispute. Elle avait raison sur le fait qu’il serait nerveux. C’est d’un bisou hésitant qu’il lui dit bonjour. Les autres autour firent comme s’ils n’avaient pas ressenti le malaise. Sky s’enfichait, il voulait juste savoir une chose :

  • Je pensais que tu serais avec Alex, on a prévu de réviser physique ensemble…

Selim pensa que ce dernier devait plutôt s’être penché sur l’anatomie de sa meilleure amie. Hésitant, il n’osa pas raconter ce qu’il avait vu la nuit dernière.

C’est seulement au temps de midi quand il eut plus de temps avec sa chérie qu’il utilisa la nouvelle comme prétexte pour briser la glace. Nice s’inquiétait tellement pour Faye, même s’il s’agissait également à moitié d’une excuse, qu’il lâcha le morceau.

Quand il l’emmena à part pour en discuter, la petite Challen avait cru en autre chose.

  • Je… je ne crois pas que je devrais parler à sa place, et je n’osais pas devant les autres, mais hier… Alex et Faye, hum, se racla-t-il la gorge.
  • Je ne comprends pas ? s’étonna-t-elle, déçue qu’il ne parle pas de leur couple.
  • Hier on est allé en boîte avec, et Faye était là…

Nice avait déjà arrêté d’écouter, alors qu’il lui racontait la scène en détail.

  • Après ça, je ne les ai plus vus de la soirée… Donc, je crois qu’il est possible qu’ils soient encore ensemble à l’heure qu’il est. Surtout connaissant Alex…
  • Pourquoi tu es sortie hier ?
  • Comment ça ? Hum, réfléchit-il en découvrant ses yeux tristes.
  • Je… je pensais que tu étais à l’internat et je n’ai reçu aucun message, alors je pensais que tu boudais simplement, mais en fait, tu faisais la fête avec Alex ?
  • J’avais besoin de me vider la tête, dit-il après un temps, comprenant que c’était un reproche.
  • Après notre dispute ? Tu as senti le besoin d’aller boire, danser, avec je ne sais pas qui…
  • J’étais avec Alex et Faye…
  • Et quand ils sont partis… s’envoyer en l’air ? Tu étais aussi avec eux ?

De tels mots ne paraissaient pas naturels dans la bouche de sa petite copine. Selim comprit à son air, non pas renfrogné, mais distant qu’elle était vraiment en colère. Durant le restant de la soirée, il avait dansé de tout son soul sur la piste sans penser à rien d’autre. Ça lui avait fait tellement de bien de se défouler. Pour lui, il n’avait rien fait de mal et il n’avait pas touché à une fille de la soirée, même si certaines n’auraient pas été contre.

  • Tu insinues quoi, exactement ? se fâcha-t-il à son tour.

Choquée, Nice n’en revenait pas qu’il s’énerve alors qu’il était celui qui avait fait une bêtise.

  • Je n’insinue rien ! Mais… pendant que moi je…
  • Que tu ? insista-t-il.
  • Je me faisais du souci ! Et tu étais juste en train de t’amuser, au lieu de… de penser à moi, à nous !
  • Mais je…
  • C’est irresponsable de ta part ! Sortir à une telle période de l’année, alors que les examens approchent en plus…
  • Oh ça, ce n’est qu’une excuse de plus pour me renvoyer à la figure que je ne suis pas assez intelligent pour toi !

Ses mots la blessèrent profondément. Elle détestait qu’on la réduise au terme “intelligente”, alors qu’elle avait tant travaillé pour exercer son cerveau.

  • Je n’ai jamais dit ça !
  • Mais tu le penses !
  • Eh bien… peut-être… peut-être que je n’ai pas si tort ! Si tu ne sortais pas au lieu d’étudier, si tu te donnais un peu plus à fond, alors tu serais peut-être plus intelligent ! Mais non, c’est bien plus facile de sortir avec Alex, de boire, de danser, comme un de ces bêtes adolescents…
  • Je suis un adolescent ! Et tout le monde n’est pas comme toi, Nice !

Il en avait trop dit. Les larmes montèrent instantanément autour des belles prunelles noisettes de Nice.

La dispute avait attiré des curieux, notamment les autres Richess et Kimi qui observa la querelle d’un œil attentif. Elle intervint quand Selim rattrapa sa main et qu’il refusa de la lâcher, alors que son amie pleurait et s’apprêtait à lui crier davantage dessus.

  • Ça suffit, Selim, arrête, fit-elle en attrapant Nice par ses deux épaules comme pour la protéger.
  • Quoi ? Mais je n’étais pas en train de…
  • Je sais ! Mais ne fais rien que tu puisses regretter par après, elle ne veut pas te parler maintenant!

Selim regarda longuement les deux filles. Blottit dans ses bras, Nice ne lâchait plus Kimi. Il se sentit juger par les voyeurs, mais également par Loyd et Sky. Ceux-ci l’invitèrent également à se calmer. Il les chassa d’un geste dont ils ne s’étonnèrent pas. Tout le monde savait qu’il pouvait être extrêmement sanguin. Vexé, il s’empressa de quitter les lieux. De son côté, Kimi s’assura que son amie reprenne son calme. Laure les avait rejoints.

  • Tu veux rentrer à l’internat ? lui demanda Kimi.

Elle répondit négativement en hochant frénétiquement la tête.

  • Mais tu ne peux pas aller en cours dans cet état… Tu es certaine que...
  • C’est peine perdue, la coupa Laure, elle peut vraiment être têtue quand elle veut et elle n’a jamais louper un seul jour d’école de toute sa scolarité.

La blonde s’attarda sur le visage rougi et en pleurs de Nice, comment allait-elle se concentrer dans un tel état ? Elle n’en avait rien à faire qu’elle soit têtue, elle pouvait l’être encore plus.


  • Non, on rentre à l’internat, fit-elle en prenant sa main.
  • Mais ! s’exclama Nice en relevant la tête.
  • Tu penses vraiment réussir à suivre les cours ?
  • Je… Oui ! Je… je dois ! Et je suis capable !
  • Et prendre des pauses, tu en es capable ? demanda-t-elle en arquant le sourcil. Allez viens, Laure tu nous couvres ? fit-elle sans lui laisser le choix.
  • Affirmatif ! s’exclama celle-ci en lui faisant un salut.
  • Mais si je n’y vais pas…
  • Qu’est-ce qu’il se passera ? Si tu y penses rationnellement, il ne se passera rien. Alors tu viens avec moi, ou pas ?

Le regard de Kimi était si perçant. Elle se retrouva décontenancée, incapable de répondre. Le stress montait au gré qu’elle l’observait. Finalement, elle lui laissait le choix de rester ou rentrer. La simple pensée de faire face à Selim lui donna envie de pleurer davantage. À côté de ça, l’idée de ne pas suivre les cours l’angoissait plus que tout, mais elle n’avait jamais essayé ne serait-ce qu’une seule fois de se prendre une journée de “congé” comme disait les autres Richess. Elle était si fatiguée pourtant, d’étudier sans relâche. Nice serra sa main et acquiesça simplement silencieusement.

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