39. Chris

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J’abandonne à regret l’antique bâtisse qui retient le corps d’Alice à la vie, je prends le métro à Austerlitz. Un homme qui sort de la gare me bouscule sur le quai avec sa valise. Il ne s’excuse pas, ne se tourne même pas vers moi… Je suis à bout de nerfs, une pulsion de violence monte en moi. Je l’éjecte instinctivement d’un coup d’épaule sans aucune retenue. Le mec va s’éclater sur un distributeur où il est écrit « Savoure l’instant » sur fond rouge. Je ne pensais pas avoir poussé si fort mais je ne regrette rien. Le mec prend l’air ahuri de celui qui n’a rien compris. Il commence à geindre en massant son bras défoncé puis devient tout rouge et ouvre sa grande bouche comme pour m’insulter. Il se ravise soudain en croisant mon regard de si bas qu’on comprend tous les deux qu’il ne fera pas le poids.

Je sors de la douche. J’en avais bien besoin. Je me sens déjà moins nerveux, en réalité je suis lessivé… Je roule et m’endors sur un joint.

Je me réveille dans le salon envahi de lumière, recroquevillé sur le canapé. Les cristaux liquides du micro-ondes indiquent sept heures… Une seconde suffit pour me rappeler ma solitude. Elle revient me frapper comme un boomerang et reste là, fichée dans ma cervelle qui ne la digère toujours pas. Je me sens encore plus fatigué que tout à l’heure, j’ai l’impression d’avoir été assommé par une grosse masse.

Je me lève en chancelant pour m’effondrer sur le lit de la chambre. L’absence d’Alice tranche cruellement avec l’odeur qui imprègne l’oreiller. Elle est tellement envahissante et si réelle que mon cœur se roule en boule autour d’elle. La boule se gonfle de sanglots retenus qui s’égouttent dans mon ventre en douleur lancinante. Je ferme les yeux et m’endors sur ma peine, le nez dans le passé et l’esprit réfugié dans la nuit.

La sonnerie du téléphone me réveille. Je me rue sur mon portable. Il est dix heures, c’est un numéro inconnu qui m’appelle. L’hôpital ? Une rechute ? Ou alors elle s’est réveillée… Je décroche :

— Allô ?

— Allô Chris, ça va ?

— … C’est qui ?

— C’est Ariane. Je suis à Paris.

— Ah bon ? Depuis quand ?

— Je viens d’arriver, je suis encore à l’aéroport. Je prend un taxi pour aller à l’hôpital là, tu y es ?

— Non, je suis rentré chez moi pour dormir.

— Ok. Tu veux que je passe te chercher ou on se retrouve plus tard ?

— Heu… Tu peux passer me chercher si ça te dérange pas.

— Ok, c’est quoi votre adresse ?

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