Swing & Practice

5 minutes de lecture

  Lors d’une partie de golf avec Serge et Ellie, nos relations franchirent un point de non-retour. Celles avec Serge restèrent les mêmes bien entendu. Je crevais d’envie de me taper sa fille et hormis ce fait, il était bien évidemment mon meilleur ami. C’est avec Ellie qu’un palier fut franchi en cette douce après-midi de printemps. Elle s’était parée pour l’occasion de manière classe et distinguée comme à son habitude. La petite visière qu’elle portait lui seyait bien et la jupe blanche assortie au top du même acabit prolongeaient une tenue d’ange terminée par de petites baskets jaunes du meilleur effet. Comme toujours : bandante. Pour moi. Son paternel s’affairait à triturer ses clubs de golf pendant que de mon côté, je tentais de cacher des débuts de tremblements. Mélange de crainte et d’excitation. J’avais maintenant la certitude de finir par fauter. Et en ça, j’y trouvais presque le réconfort du pêcheur soulagé.


- Ellie tu joues la première, David et moi, on te suit.

- Ça marche Papou ! David ?! Tu passes derrière moi ?

- Ouais… Allez, joue.


Elle ouvrit avec un drive sublime. Tant le coup que le geste. La rotation qu’elle fit envoya valser sa jupe au firmament et le déhanché pour l’accompagner n’était pas loin de me faire saigner du nez. La partie allait être longue, me dis-je, et j’en fus comme ravi.


- C’est bien la fille à son Papa ça, lui dit Serge avant de l’embrasser sur le front.


Il était fier de voir que sa princesse ne tarderait pas à jouer mieux que lui. Elle jouait d’ailleurs de mieux en mieux dans de plus en plus de domaines. Cette petite était brillante et née sous une bonne étoile. Elle jouait l’amour à sa façon et les danses que ses yeux m’offraient maintenant régulièrement ne tarderaient pas à avoir raison de moi. La partie se déroula tranquillement, avec une bonne humeur générale et un peu de répit pour moi aussi. Je retrouvais suffisamment de sérénité pour bien jouer. J’observais régulièrement Ellie s’extasiait après un coup et sifflais les bières emmenées avec mon pote. Finalement, je gagnais et j’en fus soulagé. Je perdais déjà suffisamment la face comme ça ces derniers temps. J’avais au moins la satisfaction d’avoir piné le père et la fille le même jour. A cette pensée, je m’en voulus dans la foulée. Et puis je me mis à rire tout seul. Un ricanement cruel et niais. Voilà où j’en étais.


- Je vous paie un verre au club-house, nous dit Serge.

- Ça marche, répondis-je.

- Un scotch pour moi aussi, comme les hommes ! déclara Ellie d’une moue enjouée.


On prit place dans la salle relativement calme et Serge alla au bar passer commande. Nous étions l’un en face de l’autre, le silence se fit une place et c’est un jeu de regard qui débuta. J’étais doué pour tout ça habituellement, et j’aurais dû la calmer sur-le-champ par une parole bien placée. Mais c’est elle qui ouvrit le bal.


- T’as aimé pouvoir me mater aujourd’hui ? A chaque balle j’avais envie que tu vois… T’avais envie de voir toi aussi ? Tu veux revoir comme lors de mon anniv ?

- Ellie, j’suis pas sûr que ce soit l’endroit le plus approprié pour en parler…

- Pourquoi ? Mon père ? C’est grave tu crois ? J’suis sûr que tu crèves d’envie d’en revoir un peu…

- Ellie, s’il te plaît, arrête…

- T’es peut-être même déjà en train de bander. Revoilà mon père. Papa ! J’étais en train de demander à David s’il serait d’accord pour me donner quelques leçons en semaine. C’est bientôt les vacances et j’adore le golf. Et il joue si bien s’il te plaît Papa…


Sa complainte était parfaite. Je devais tirer une tête d’abruti et valait mieux ça qu’autre chose, pendant que Serge déposait sur la table nos trois scotchs.


- Et bien écoute, s’il n’y voit pas d’inconvénient et que ça ne le dérange pas c’est OK pour moi. David ?

- Ouais, je tacherai d’en faire une championne de la petite. Gros potentiel. Elle ne devrait pas attendre trop longtemps pour te battre, lui répondis-je.

- C’est tout ce que je lui souhaite, de battre son vieux père.

- Merci merci merci ! Nous répétait Ellie aux anges.


Elle siffla son scotch rapidement, nous embrassa à tour de rôle et s’excusa pour filer aux toilettes.


- T’es sûr que ça ne te gêne pas David ?

- Absolument pas. Et puis tu sais combien j’adore Ellie.

- J’apprécie.


Son téléphone sonna, nous coupant en pleine conversation.


- Tu m’excuses…


Bien sûr vieux, prends ton temps, pensais-je. Il se leva et sortit poursuivre sa conversation dehors. De mon côté, je bus mon verre d’une traite, et à mon tour me levai pour aller aux toilettes. En entrant dans celles-ci, Ellie se tenait devant le lavabo, surplombé d’une glace et se refaisait sobrement une petite beauté. Je n’en fus tristement pas surpris, et c’est comme si le coup de fil passé à Serge était à mes yeux une aubaine à ne pas rater. Je m’approchais d’elle doucement, cherchant un air détaché que je ne trouvais pas.


- Alors, me dit-elle, tu veux la revoir ?

- Ce sont les toilettes des hommes Ellie…

- Je sais ! Il n’y a personne d’autre que nous ici. Que ce soit toi qui entre ou mon père ne change rien. Et puis j’ai pu me tromper aussi. Approche, je vais te montrer.

- Ellie…

- Allez, grand timide.


          D’un pas mal assuré, je pris sa direction la boule au ventre pour me planter devant elle comme un grand con. Elle me sourit quelques secondes d’un air cérémonial, et son regard changea l’instant d’après pour être drapé du vice. Elle me prit la main et la tendit paume vers le ciel, me regarda encore un peu, puis y déposa à l’intérieur son petit string rose à dentelle.


- Tu savais que je le portais aujourd’hui ? Bien sûr. Il est à toi. T’en crevais tellement d’envie, hein David ? Tu m’apprendras à jouer comme une pro au golf bientôt ? Tu devrais aller aux toilettes avec, là, et le souiller autant de fois qu’il te plaira. C’est comme ça que vous faites les hommes, non ? En cachette ? Non ? Bref… Je file rejoindre mon père. T’imagine sa tête s’il nous voyait tous les deux aux toilettes et moi les fesses à l’air ?


          Elle repartit amusée, d’un pas enjoué, nue sous sa jupe, et sans doute aussi humide que j’étais dur. De mon côté, je me sentais toujours aussi bête et effrayé. Mais la colonne de chair que j’avais dans le froc aurait pu briser une porte et c’est la mort dans l’âme qu’une nouvelle fois, je m’enfermais dans un chiotte pour y purger ma peine.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Jules Bandini ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0