Nouvelle

9 minutes de lecture

J'atterris lentement sur le sable, je ferme les yeux, préférant ne pas voir la fin de ma chute. Je ne ressens rien, j’ai juste l'impression de passer au travers de quelque chose. J'ouvre les yeux quand je ne sens plus mon corps bouger, j’entends le bruit calme des vagues, je suis allongée sur le sable, la nuit noire au-dessus de ma tête, je souffle :

–Bordel de merde ! J'espère que c'était seulement un rêve.

–Je te l'ai déjà dit : on ne peut jamais sortir de ce cauchemar.

C'est la voix de Gula, je me relève en soufflant :

–Vous étiez les dernières personnes que je voulais entendre, mais bon.

–Tu as réussi à survivre, c'est impressionnant. Me dit sèchement Zavist’.

J'enlève le sable que j'ai sur moi et demande nonchalante :

–Bon, on va où ?

–Tu souhaites nous rejoindre ? Demande Gula intriguée.

Je les regarde en souriant, autant que je profite de cette voie qui s'ouvre à moi, autant que je profite de ce petit sursis que l'on me propose :

–Vous avez piqué ma curiosité ! De toute façon, comme l'a dit Zavist’ c'est ça ou je retourne à ma vie chiante et franchement j’ai pas envie.

Ils retirent leurs masques en même temps, dévoilant alors pour la première fois leurs visages devant moi. Zavist’ est un homme blond aux yeux bleus, le visage carré et les cheveux courts. Gula est une femme aux longs cheveux bruns et aux yeux verts envoûtants. Gula se présente la première :

–Je suis Cynthia.

–Et moi David.

–Moi, c'est Rose enchantée… Bon ! Et maintenant, si je vous trahis ?

–Ça dépend, tu veux qu'on retrouve ton corps en combien de morceaux ?

David est très sérieux en me demandant cela, Cynthia elle, me fusille du regard en croisant les bras, ils n'ont pas aimé mon trait d’humour :

–Je plaisantais, vous me montrez le chemin ?

–Suis-nous, dit David.

Ils partent en direction des marches qui ramènent au niveau de la route proche de la falaise, je les suis, David clarifie certains points durant la montée :

–Alors pour t’expliquer simplement, nous avons plusieurs règles…

Il me regarde et attend n’importe quel réaction de ma part, je lui réponds :

–Tant que tu ne me fais pas un club de la bagarre, ça me va.

–... Et merde.

Cynthia est morte de rire, David sort un calepin de sa poche et raye quelque chose :

–Je ne pourrais jamais faire cette blague à présent. Bravo !

Je lui réponds complétement indifférente :

–Désolée de couper tes élans.

Il reprend ses esprits et m’explique :

–Bon pour notre sécurité et la tienne, tu ne dis absolument rien de nous que ce soit sur internet ou en ville.

–Tu penses que si je marque “les six” dans la barre de recherche, il va y avoir une flopée de flics qui vont rentrer chez moi ?

–C’est très probable, me dit David.

Cynthia ajoute pour me mettre en garde :

–Tu crois vraiment qu’il n’y a que la police qui nous cherche ? Un groupe qui n’hésite pas à effacer n’importe qui sans laisser de trace ? Interpol, FBI, CIA, KGB, MI6, MJ12, DGSE. Même des groupes sectaires comme les gardiens de sang, l’Ordre du temple solaire, le groupe bilderberg et cætera… même les Illuminatis. Bon ok pas les Illuminatis, eux, ils sont so 2000, mais tous nous cherchent pour avoir ce pouvoir d'effacer les personnalités qui les gênes.

Tant de monde pour un groupe de six personnes ?

–Vous êtes si dangereux ? J’ai à peine entendu parler de vous.

–C’est parce que nous prévenions uniquement nos victimes, mais certaines personnes sont inatteignables que ce soit par lettre ou e-mail. M'explique David.

Cynthia ajoute :

–Pour atteindre Hugh Pillow qui est connu pour se concentrer exclusivement aux recherches, il a fallu qu’on fasse une annonce publique comme ça même si lui ne l’entendait pas, ses collaborateurs lui feront passer le message.

–Et ça a fonctionné ?

–Du tonnerre et petite information en plus, tu te doutes très certainement que nous ne sommes pas français, donc si tu peux éviter d'essayer de reproduire les mots que tu as entendus, cela nous évitera d'attirer l'attention sur nous.

Oui, c'est vrai qu'il y a cette histoire de naturalisation offensive, je vais jouer le jeu de toute manière, je n'ai rien d'autre à faire :

–Je comprends, de toute manière, je n'ai même pas compris votre charabia.

–C'est bien, tu comprends vite.

Ils n’en disent pas plus, sûrement parce que nous sommes arrivés au bout des escaliers, la rue est vide, mis à part les quelques couples et marcheurs nocturnes, je leur demande :

–On va où au fait ?

–Chez nous, qu’est-ce-que tu crois ? Me répond David, condescendant.

Je demande, choquée :

–Vous habitez ensemble ?

–On habite tous ensemble, m’informe Cynthia.

J'essaie de changer de sujet, ne préférant pas en savoir plus :

–Il faudrait peut-être que je prévienne mes parents, non ?

–Des parents ? Qu'est-ce que c'est ? Ça se mange ? Me demande Cynthia, sarcastique.

–Parce que tu as un chez-toi ? Des personnes attendent une suicidaire ? Me demande David à son tour.

Je prends mon téléphone et le déverrouille, Cynthia souffle sèchement :

–Fais comme tu veux ! Sache juste qu’on t'attend pas.

Je regarde mon téléphone déverrouiller et l’éteint en soupirant :

–Et il est loin ? L’endroit où vous créchez ?

–Ça dépend, t’aimes marcher ? Me demande David.

–Ça va.

–Alors c’est plus très loin.

Nous nous éloignons de la plage pour atterrir dans le quartier populaire, le repaire des différents dealers de drogue et des réseaux de prostitution. Ils s'arrêtent devant un immeuble de trois étages abîmé par les années et qui, je dirais, n’a jamais été restauré, je leur fais remarquer :

–Il craint un peu votre chez-vous.

–Il ne craindrait pas si les syndics et les immobiliers faisaient correctement leur boulot, mais c’est toujours comme ça partout, on délaisse le petit peuple pour avoir les faveurs de l’élite. Me dit David.

Cynthia rétorque :

–En tout cas, nous, on ne l’échangerait pour rien au monde, car c’est notre royaume.

Ils s’écartent de la porte et déclarent en même temps :

–À toi l’honneur.

J’avale ma salive et ouvre la porte, la lumière m'éblouit, je mets un petit moment à m'habituer et j'aperçois une scène complètement surréaliste. Un grand noir est en train de bander ses muscles en caleçon, une fille à la peau tannée fait un concours de boisson avec un asiatique ; eux aussi sont tout aussi peu vêtus, une dernière personne est là, assis, il regarde la scène ; il serait parfaitement normal si seulement lui aussi n’était pas aussi peu vêtu. Les deux personnes se faisant le concours de boisson baissent leurs chopes de bière vides en même temps et ils disent tous au même moment, d’un son presque guttural :

–BOTTOMS ! UP !

–Bordel de merde !

Je referme immédiatement la porte, je regarde Cynthia et David :

–Vous vous êtes trompé d’immeuble, je crois.

–Non non ! J’ai reconnu le petit cul d’Aziz ! Me dit David, ironique.

Cynthia ajoute :

–Je l’avais dit qu'ils ne nous avaient pas attendus, par contre Max et Shu participent, c'est nouveau.

–Ouais et Taïba a l’air de bien s’amuser, rejoignons-les !

Ils ouvrent la porte en même temps et rejoignent le groupe, Cynthia leur demande :

–Il reste de la bière au moins ?

Celui qui est assis lui répond sur un ton nonchalant :

–Je t’ai gardé ta préférée ! En lui balançant une canette de bière.

–Merci Max !

Max est des plus normales. À peine musclé, je dirais qu'il fait environ 1,80 mètre, il a les cheveux châtains, longs et raides et des yeux marron. S’il le souhaitait, il n’aurait aucun mal à passer inaperçu dans la rue. David demande au reste du groupe :

–Qui gagne ?

–Ek ! Personne ne peut me battre, lui dit le grand noir d'une voix rocailleuse qui me fait penser à un vieux fumeur.

–J’aurais dû me douter que c’était toi Aziz !

Aziz est une montagne de muscle de deux mètres de haut dont le corps est recouvert de cicatrices et semble dater. Ses cheveux courts, rasés sur les côtés, accentuent ses yeux noirs et la veine qui ressort sur son front lui donne un air énervé, presque effrayant. J’entends la voix douce d’une femme hurlante :

–David ! تعال الى هنا ! J’ai besoin de recharger mes batteries ! Dit la femme en montrant un pyjama d’un animal.

–Oh non ! Pas maintenant Taïba !

Taïba est moi pourrions avoir le même âge, nous avons à peu près la même taille. C’est une jeune femme aux cheveux noirs et bouclés et aux yeux d’ébène auxquels s’ajoutent des formes plantureuses. C’est une belle femme à la couleur de peau exotique. La dernière personne demande d'une voix neutre à Cynthia :

–Tu penses que tu peux me faire les たこ焼き que je t’ai demandé ?

–Premièrement ! Laisse-moi respirer et deuxièmement, si tu me le demandes une nouvelle fois comme cela, va te faire mettre ! Sera la réponse Shu. Lui lance Cynthia en colère et en lui faisant un doigt d'honneur.

Shu est un asiatique, plutôt petit, je dirais qu'il est moins grand que moi, lui aussi est à peine musclé, il a même un peu de ventre. Ses cheveux noirs et courts font ressortir ses yeux noirs en amande. Cela me parait dingue, mais aucun d'entre n'a d'accent, si leurs origines n'étaient pas trahies par leur peau et leurs mots que je ne comprends pas ; j'aurais juré qu'ils étaient français, voire même que c’était une fratrie. Je décide de refermer délicatement la porte et regarde le groupe. Je remarque alors que Cynthia s’est habillée comme ses compères, ou plutôt, s'est déshabillée, je m'insurge :

–Pourquoi est-ce que tu t’es déshabillé toi aussi !?

–Pour éviter d’avoir chaud. Me répond-elle nonchalamment.

Tout le monde se tourne vers moi, Aziz s'approche de moi et il a vraiment l'air énervé par ma présence :

–C'est qui celle-là ?!

Shu se rapproche de moi aussi en me menaçant d'un couteau rétractile :

–File-moi ton fric salope !

J'entends Taïba dire :

–Oh ! Elle est trop mignonne !

Enfin quelqu'un de gentil, elle continue :

–Elle vient à peine d'arriver qu'elle va se faire découper en petits morceaux.

En fait, elle est exactement pareille que les autres, Cynthia les prévient :

–Ne la cassez pas surtout.

Dans quel guêpier je me suis fourrée moi encore :

–Bordel de merde ! Personne n’est sensé dans ce putain d'immeuble !

Les deux garçons se sont arrêtés et regardent Cynthia, Aziz lui demande :

–Qu'est-ce à dire que ceci ?

–C'est la dernière ! Dit David.

Il est dans le pyjama animal, la tête sur les genoux de Taïba qui lui caresse la tête, Taïba est en pleine béatitude, devant cette scène qui serait hilarante en temps normal, là, je ne peux que demander :

–Mais c'est pas vrai ! Pourquoi t'es comme ça toi ?!

Il me répond légèrement embarrassé :

–Taïba recharge sa batterie.

Elle sursaute :

–Ça y est terminé !

David se relève et se mêle au groupe, vêtu d’une tenue conventionnelle. Autrement dit, il n’arbore lui aussi qu’un caleçon, je demande désespérer :

–Pourquoi vous vous foutez tous à poil !?

–Allez, détends-toi et bois un coup ! Me dit Shu en posant son bras sur mon épaule.

Aziz me propose une chope de bière :

–Tu verras, tu te sentiras mieux !

–J'ai pas très envie de boire.

–Oh, allez ! M'incite Cynthia.

–Bon juste une alors.

Dix chopes plus tard :

–Arf ! Et une autre !

Ils disent tous en même temps :

–BOTTOMS UP !

–Elle égalise avec Aziz ! Indique Taïba.

David m'affirme :

–Tu t’es bien intégrée au groupe !

–Un vrai poisson !

Ajoute Cynthia :

–Oh putain, j'ai chaud !

–Déshabille-toi, tu verras, c'est super, me dit Max.

Je fais ce qu'il dit :

–Ah ouais y a pas à dire c'est mieux.

Je vois Shu qui s'est habillé et est prêt à partir, Cynthia lui donne un tupperware :

–J'ai essayé de les reproduire, ce n'est pas forcément réussi, mais ce sera bon.

–Merci Cynthia, à demain !

–Passe-lui le bonjour de ma part.

Shu lui fait signe, Aziz attire mon attention et me provoque en me donnant une chope :

–Allez, voyons qui tient le plus longtemps Rose !

Je le provoque à mon tour :

–Je ne fais que commencer !

Nous buvons tous les deux en même temps et nous finissons nos chopes simultanément, je hurle avec eux :

–BOTTOMS UP !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 10 versions.

Vous aimez lire Oneworld ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0