Chapitre 21

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Comme prévu, dès mon retour au château, les conseillers m’attendaient de pied ferme. Je me dépêchais d’aller dans ma chambre pour me changer. Pour revêtir mon masque et ma tenue d’Impératrice. Emma m’aida à changer de coiffure. Suite à ma semaine de vacances auprès de la famille d’Emma, ils avaient la ferme intention de faire entendre leur voix et surtout pour que je reprenne le rôle qui était le mien. Dès que je fus prête, je rejoignis tout ce groupe d’hommes d’affaires dans la grande salle. Juste avant d’entrer, je respirais un grand coup et me redressais.


— Bonjour Messieurs. Bonjour Mesdames. Asseyez-vous, nous allons pouvoir commencer.

— Ce n’est pas trop tôt.


Je fis rapidement abstraction de leur mauvaise humeur et mon regard resta bloquer sur la chaise d’Océane. Enfin l’ancienne place d’Océane, aujourd’hui reprise par mon père.


— Bonjour, père, commençais-je poliment et discrètement.

— Bonjour Elena.


Je n’avais pas reparlé à mon père de toute la semaine. Discuter avec lui était toujours difficile. J’arrivais à lui faire confiance en tant qu’homme d’affaires, ayant été Empereur avant moi, mais en tant que père, je n’y parvenais pas. Ce n’était pas de sa faute, j’avais juste du mal à accorder ma confiance, en particulier à un parent à cause de ma mère puis à cause d’Océane depuis peu. À l’affût de mes moindres faits et gestes, les Conseillers n’attendirent même pas que je sois complètement assise pour poser leurs questions.


— Votre Majesté, je me doute que vous aviez besoin de prendre cette semaine de vacances, mais nous avons beaucoup de travail à rattraper !

— Vous croyiez que je ne le sais pas ? Pourquoi vous entêtez-vous à penser que je suis si ignorante que ça ?

— Mais parce que vous l’êtes ! Seule une inculte telle que vous peut accepter que les couples de mêmes sexes…

— Vous savez quoi ? SI c’est encore pour dire des propos injurieux tels que ça, vous pouvez sortir. J’ai toute une liste de personnes digne de confiance prête à vous remplacer, mentis-je.

— Je… vous ferais vraiment ça ?

— Cessez de faire l’inculte, enchaînais-je avec la même insulte.

— Est-ce comme ça que vous avez viré Océane pour la remplacer par votre misérable père ?

— Ça suffit ! intervint mon père. SI vous ne servez qu’à critiquer ma fille, vous n’avez pas votre place ici. Le but de ce Conseil n’est pas de critiquer la personne qui dirige, mais de travailler ensemble pour satisfaire le plus de besoins possible des habitants, assurer leur sécurité et leur bien-être.


Finalement, j’avais bien fait de choisir mon père comme remplaçant. Il connaissait la difficulté du rôle d’Empereur. Il savait que chaque action avait des conséquences sur plusieurs milliers de personnes.


— Excusez-moi. Je crois que je suis allé un peu trop loin.

— En effet. Tu peux reprendre Elena.

— Merci. Est-ce qu’un l’un d’entre-vous à l’ordre du jour ?

— Je l’ai préparé pour toi, reprit mon père.


Finalement, que se soit Océane ou mon père, c’était toujours la personne assise à ce siège qui préparer les sujets à aborder lors des séances. Océane m’avait toujours secondé, depuis mon tout premier Conseil et aujourd’hui c’était mon père, pour mon premier Conseil avec lui. Ayant été absente de mes fonctions pendant une semaine, il y avait beaucoup de sujet à traiter. À la simple lecture de ce document, je savais que j’en aurais pour toute la journée. J’allais devoir suspendre la séance pour la pause de midi, pendant deux heures et nous allions tous devoir nous retrouver à nouveau pour le reste de l’après-midi.


Même si elles étaient obligatoires et importantes pour le bien de l’Empire, ses réunions du Conseil à rallonge m’épuisaient. À la pause de midi, j’en avais déjà assez. La moitié de mes Conseillers étaient toujours contre la moindre de mes idées de lois, d’aide aux ressources pour les Eryenniens. Ils avaient toujours étaient contre moi de toute façon. Mais depuis qu’Océane n’était plus là, c’était différent. Quand mon attention déclinait, il me suffisait de la regarder, de recevoir un sourire amoureux de sa part pour reprendre des forces et du courage. Avec elle as mes côtés, je voulais que les réunions se terminent le plus vite possible pour qu’on se retrouve ensuite seule.


Mais aujourd’hui, c’était mon père qui était à sa place. Un homme que je ne connaissais que depuis un peu plus d’une semaine. Un homme qui avait été à ma place, mais qui n’avait jamais fait partie de ma vie. Un homme qui avait laissé sa femme manipuler sa fille, l’utiliser comme bon lui semble et surtout l’isoler du monde extérieur.


Épuisée par toutes les remarques, les insistances des Conseillers sur tel ou telles lois que je trouvais injustes, mon attention déviait rapidement. Ne pouvais pas regarder Océane, je n’avais plus que le ciel à observait. J’imaginais le chant des oiseaux à la place des aboiements des Conseillers. J’imaginais le soleil chauffer ma peau et le vent hérisser mes poils. J’imaginais à nouveau, tout ce dont j’avais pu rêver pendant dix-neuf ans. La liberté.


C’est mon père qui me sortit de mes pensées. Il avait compris que j’avais besoin d’une pause et me faisait signe de la prendre. De congédier les Conseillers pendant un certain temps. Ce que je fis aussitôt. Dès qu’on fut seul tous les deux, je pus enfin respirer.


— C’est tout le temps comme ça ? m’interrogea-t-il.

— Malheureusement oui.

— Quand j’étais Empereur, mes Conseillers n’étaient pas aussi conservateurs. Ils ne cherchaient pas désespérément à contrer toutes mes actions. J’ai l’impression qu’ils sont plus là pour te mettre des bâtons dans les roues que pour t’aider à avancer.

— C’est le cas, père. La moitié d’entre eux ont été choisies par Camille Hautane, la cheffe de la résistance. C’est elle qui a exécuté ma mère. Elle a accepté de me laisser sur le trône pendant un an, à la seule condition que je parviens à redresser l’Empire en un avec des conseillers choisis par elle. Les autres, c’est Océane qui les avait choisies, ceux qui sont de mon côté. Mais Camille n’a pas été juste. Elle a essayé de me détrôner par un coup d’état avant l’heure pendant qu’Océane… Peu importe, ce qu’il s’est passé avec cette fille n’a pas d’importance. Elle n’existe plus pour moi.

— Si tu ne souhaites pas m’en parler, je comprends. Mais sache que je peux être là pour toi si tu as besoin.

— Emma joue déjà ce rôle. Dites aux Conseillers que nous pouvons reprendre.

— Tu es sûr ?

— Oui, plus vite se sera fini, plus vite je serais débarrassé d’eux.

— Très bien.


Mon père avait raison. J’avais réussi à me faire une place dans ce monde politique, à affirmer ma position, mais les Conseillers de Camille, pourtant révolutionnaire, ne cessaient de contrer toutes mes actions en faveur du peuple. À les entendre parler, on pouvait croire qu’ils souhaitent le retour de ma mère au pouvoir alors qu’ils avaient lutté contre elle.

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