Chapitre 17

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Je restais immobile devant les portes de la grande salle pendant cinq longues minutes avant de me décider enfin à entrer. Je pris une grande respiration avant d’ouvrir les portes. Celui qui disait être mon père discutait avec Emma tout en regardant par la fenêtre. Quand ils m’entendirent entrer, ils tournèrent tous les deux la tête vers moi et Emma me sourit. Elle s’approcha de moi et posa sa main sur mon épaule.


— Tu peux lui faire confiance, Elena. Comme je te l’es dit, il est bien qui il prétend. Ta mère l’avait exilé aux limites du royaume. Le temps que la nouvelle de ton couronnement lui parvienne et le temps de venir ici, c’était long.

— Merci d’avoir vérifié son identité, Emma. Je te fais confiance donc si tu me dis qu’il n’y a pas de danger, je te crois.

— Je vais vous laisser discuter tous les deux. Tu veux que je vous amène de quoi boire et manger ?

— Pour moi non, je n’ai pas très faim mais pour lui, oui, je veux bien.

— C’est noté.


Quand les portes se refermèrent derrière elle, je me tournais vers mon père et l’étudiais de la tête au pied. Même en sachant qui il était, je n’arrivais toujours pas à savoir d’où j’avais bien pu le voir.


— Bonjour Elena. Je ne me suis pas présenté officiellement à toi. Je suis…

— Je sais qui vous êtes.

— Vivre avec ta mère ne devait pas être simple, j’en conviens.

— Pourquoi vous ne l’avez pas fait soigner ? Ce n’était pas simple de vivre avec elle, c’était l’enfer.

— J’aurais dû, tu as raison mais son avis comptait trop pour moi. À plusieurs reprises elle m’a fait comprendre qu’elle n’était pas malade et une fois sur deux je la croyais, malgré les expertises des médecins.

— Vous auriez dû écouter les médecins. J’étais sa prisonnière ici, pas sa fille.

— J’en suis navré, Elena, sincèrement. Je ferais tout pour rattraper tout le mal qu’elle a pu te faire. Même si ça doit prendre des années.

— Je n’accorde pas ma confiance facilement.

— Ce qui est une bonne qualité pour une Impératrice digne de se nom. Avant de venir ici, je suis passé à Glenharm. Ce que tu as fait depuis ton accession au trône est remarquable. Tu as l’étoffe d’une grande Impératrice, Elena.

— Et pourtant, j’échoue dans pratiquement tout ce que je fais. Tout ce qui ne touche pas à l’Empire en tout cas.

— Est-ce que je pourrais t’aider ?


Emma arriva à ce moment-là et déposa sur la table tout ce qu’elle venait d’apporter. Je me tournais vers les fenêtres pour regarder l’horizon et demandais à Emma de rester.


— Le problème c’est que…

— Est-ce à propos de cette fille, Océane, je crois.

— Oui c’est elle.

— C’est compliquer l’amour Elena, en particulier dans ta situation.

— Vous êtes contre, c’est ça ?

— Pas du tout. Avant que je ne rencontre ta mère et qu’elles mettent en place cette fameuse loi, tout le monde était libre d’aimer qui ils voulaient.

— Vraiment ? Mais pourquoi elle…

— Je ne sais pas, Elena. Je ne sais pas vraiment ce qu’il se passait dans sa tête.

— Parfois je crois savoir. Mais je me rappelle qu’elle était malade et moi pas. Pas encore du moins, terminais-je en chuchotant.

— Elena, ne sois pas si pessimiste, rétorqua Emma qui m’avait entendu.

— À propos de quoi ? reprit mon père.

— Rien d’important. En tout cas, merci de m’avoir répondu. Souhaitez-vous retrouver votre chambre ?

— Ce n’est plus vraiment ma chambre. Je prendrais celle qui arrange le plus tes domestiques.

— Je vous laisse voir avec Emma dans ce cas. Accepteriez-vous de dîner avec moi ce soir ?

— Avec plaisir.

— Au fait, tête de mule, reprit Emma en rigolant, c’est toi qui dois trouver un remplaçant à Océane.

— Et je trouve ça où ? C’est Océane qui avait trouvé les autres.

— Tu vas trouver toute seule, j’en suis sûr.

— Sympa, merci.

— Je t’ai aussi ramené ton téléphone dans ta chambre, il n’est pas cassé.

— Merci Emma.


Je sortis rapidement de la Grande Salle pour retourner m’enfermer dans ma chambre. Je récupérai mon téléphone qui était en effet sur mon bureau. En l’allumant, je retomber sur le message d’Océane. Prise d’une impulsion, j’effaçais tous les messages avec elle, comme son numéro de téléphone. Si elle voulait me sortir de sa vie, j’allais faire de même et ne plus reprendre contact avec elle. J’allais lui montrer que je n’avais pas besoin d’elle pour être celle que je voulais être et surtout que je pouvais me débrouiller seule.

Décidant de reprendre ma vie en main, sans personne derrière moi pour valider ou non mes choix, je commençais par trier tous mes documents. J’envoyais un message à Emma pour savoir si une pièce était disponible pour en faire mon bureau. Si je voulais être productive, je me devais différencier ma vie personnelle et mon rôle d’Impératrice, soit ma chambre et un bureau, deux pièces différentes. En moins d’une heure, tous mes documents étaient triés et mon bureau avait été déplacé dans cette nouvelle pièce.


— C’était une bonne idée de trouver une nouvelle utiliser à cette pièce, commenta Emma en installant les derniers éléments de décoration.

— J’avais surtout envie de changer. Je ne voulais plus travailler dans ma chambre.

— Et ça se comprend. C’est quoi ce gros dossier ?

— Je l’ai trouvé dans mes documents. Il contient de potentiels candidats pour une place au conseil. Je pense que c’est Océane qui là mis là.

— Tu comptes quand même garder ses documents ?

— Oui. Sinon je ne sais pas où je pourrais lui trouver un remplaçant.

— Et ton père ?

— Un jour peut-être. Je ne lui fais pas encore assez confiance.

— Tu te contredis Elena mais bon je vais te laisser y réfléchir seule.

— Emma !

— Oh non Elena. Tu veux faire la dure, me faire croire que tu n’as besoin de personne alors prouve le moi.

— Mais…


Comme à chaque fois qu’elle voulait me faire comprendre quelque chose, Emma partait toujours avant de s’expliquer. N’ayant pas le temps d’y réfléchir, je me concentrais sur ma pile de dossiers. Pourtant même après les avoir tous étudiés pendant deux heures, aucune ne correspondait à ce que j’attendais. Aucun n’arrivait à la cheville d’Océane mais je devais faire un choix. Quand la question d’Emma me revint en tête, celle pour que mon père prenne la place d’Océane, ce dernier frappa à la porte et entra.


— Je te dérange ?

— Non c’est bon, entrez.

— Emma m’a dit sur quoi tu travaillais. Besoin d’aide ?

— Il me manque un conseiller et parmi toute cette pile, aucun ne convient.

— Pourquoi ?

— Ceux qui pourrais convenir sont soi trop jeunes, soit trop âgés. Ils… aucun n’est…

— Aucun n’est comme elle c’est ça ?

— Je n’ai pas envie d’en parler.

— Je sais à quel point l’amour ça peut-être compliquer, Elena mais…

— a quel âge êtes-vous devenu Empereur ?

— À seize ans, quand tes grands-parents sont morts dans un incendie. Et je le suis toujours officiellement.

— Comment ça ?

— Quand ta mère m’a évincée, elle n’a pas pensé à me retirer mon titre. Ne souhaitant que ta protection, j’ai préféré ne pas interférer directement dans ses affaires. J’ai toujours su ce qu’il se passait ici et même de là où j’étais, j’avais encore une influence sur elle sur tout ce qui te concernait.

— Vous voulez dire que…

— Si tu es toujours en vie, si tu avais tout ce qu’il te fallait pour vivre et même Emma, c’est en partie grâce à moi et…

— Et qui ? Dites-moi, je vous en supplie.

— Promets-moi d’abord de ne jamais supplier qui que ce soit. Tu es au-dessus de tout le monde, c’est ton peuple qui devrait te supplier pas l’inverse.

— Je vous le promets, répondis-je en baissant la tête.


Il s’approcha de moi, éloigna ma chaise du bureau et me pris dans ses bras. Emma faisait la même chose quand j’en avais besoin. Était-ce aussi le rôle d’un père ? Mon nez dans son cou, je pouvais sentir son doux parfum de pin et d’épice.


— Ta grand-mère m’a beaucoup aidé à assurer ta protection, me chuchota-t-il. Même si ta mère l’avait bannie de l’Empire, elle a réussi à rester en contact avec elle. C’est ta grand-mère qui a réussi à convaincre ta mère de te prendre une domestique. Elle se doutait que sa fille ne jouait pas un vrai rôle de mère et voulait s’assurer que tu avais quelqu’un de confiance auprès de toi.

— Maria ? C’est elle ?

— Oui c’est elle. Et Emma n’a pas été choisie par hasard mais tu sauras pourquoi en tant voulu. Tout ce que tu as besoin de savoir pour le moment, c’est que j’ai bien connu son père et que ce n’est pas un homme aussi méchant qu’elle peut le penser.

— Je ne poserais aucune question alors. Mais, dites-moi, si vous êtes toujours Empereur, est-ce que mon titre est toujours valable ?

— Bien sûr, ne t’inquiète pas pour ça. Et si tu ne veux pas que j’interfère dans tes affaires, je ne le ferais pas.

— Vous ne voudriez pas prendre la place vacante au conseil ? Se serait un moyen pour vous de retrouver une partie de vos pouvoirs.

— J’accepte avec plaisir. Et si tu as la moindre question, n’hésite surtout pas.

— Merci.


Finalement Emma avait encore eu raison. Ce n’était pas parce que je connaissais mon père que depuis quelques heures qu’il était un parfait inconnu. Même de loin, il avait toujours était présent pour moi. Il venait de me parler de lui et de ma grand-mère, c’était maintenant à moi de faire le prochain pain vers lui, à commencer par la place de conseiller. La prochaine étape pour lui accorder ma confiance serait peut-être de travailler ensemble pour retrouver ma grand-mère maternelle, Maria.

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