4. Until your heart caves in

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Jin

On se regarde en chien de faïence pendant quelques minutes, puis je détourne les yeux pour me servir un café.

Des pleurs de bébés se font entendre, et Line soupire.

  • Polly est réveillée.

Elle s'éclipse dans la chambre, avant de revenir avec la petite.

  • T'as des enfants Frankenstein, demande Baram.

La grimace qu'elle tire m'arrache un ricanement.

  • Houla non.
  • C'est pas si terrible que ça, dit notre première dame, d'un air bienveillant.
  • Les gosses ça fait du bruit, ça bouge sans arrêt, ça pleure, ça crie et ça pue. C'est totalement inutile.
  • C'est pas assez mort pour toi quoi, ri Arnaud.

Haut gradé du club. Il participe aux décisions importantes.

La doc se renfrogne.

  • Autant ça aurait pu être drôle, que la ça l'est pas vraiment.

C'est clair.

  • J'ai malheureusement eu l'occasion de voir des gosses morts dans mon travail. Et vu la brigade dans laquelle je suis, c'était soit une mort louche, soit un meurtre.

J'en ai des sueurs froides.

  • J'ai vu des choses horribles. Autant d'habitude je bronche pas, la vraiment, ça m'a traumatisée. Si c'est pour les traiter comme ça, autant ne pas faire d'enfants. Ou avorter.

Je suis bien d'accord.

  • J'ai vu des bébés d'à peine quelques mois, morts parce qu'ils n'étaient rien de plus que des dommages collatéraux aux disputes des parents. C'est dur à autopsier, vraiment.
  • C'est pour ça que la police avait fait appel à toi cette fois-là, commente Derek.

Elle hoche la tête.

  • J'ai été la seule à avoir accepté de faire le boulot. Les autres n'arrivaient pas à supporter la situation. Si je l'avais pas fait, personne ne l'aurait fait.

Arnaud se sent super mal du coup.

  • D'ailleurs, tu devrais un peu lever le pied la dessus, la réprimande Derek. Psychologiquement, c'est très dur.
  • Dans ma culture, on punit ceux qui font du mal aux enfants et aux animaux. Personne n'est mieux placé que moi pour faire ce boulot. Et je préfère le faire moi même. Ce sera grâce à moi si les coupables seront jugés.

Ça a du sens.

  • Écoutez. Il va falloir que vous puissiez refroidir la pièce le plus possible en bas.
  • C'est-à-dire, questionne Baram.
  • Zéro degrés maximum. Ça va stopper la phase de décomposition, le temps que je puisse autopsier correctement. Je vais examiner les organes de plus près, et tenter de trouver n'importe qui quoi puisse vous aider.
  • Donc le coup du congélateur, c'était pas une blague ?
  • Non, c'en n'était pas une.

On en apprend tous les jours...

  • T'as bientôt fini je crois, avec l'affaire en cours, dit Derek.
  • Ouais, encore quelques petits détails à vérifier, le tout à remettre en place, et ce sera bon.

Il hoche la tête.

  • C'est bientôt l'heure, tu veux que je t'amène, proposais-je.
  • T'es déjà amoureux de moi toi, ou quoi ? Pourtant on n'a même pas encore couché ensemble, alors je vois pas comment ça pourrait être le cas.

Je me renfrogne.

  • J'ai ma voiture dehors, c'est bon. Merci quand même.
  • Merci à toi Frankenstein.

Elle aime bien mon surnom je crois.

Elle attrape son sac et ses clés, puis se barre rapidement.

  • Quelle merde, dit mon président.
  • T'inquiète pas. T'as l'ange de la mort de ton côté. Elle va gérer.
  • L'ange de la mort ?
  • Ouais. Il sait tout sur la mort de tout le monde. Comme elle. Elle trouve toujours tout sur le décès des victimes qui passent entre ses mains.

Une vraie pro.

  • Puis, l'ange de la mort peut tuer de n'importe quelle manière que ce soit. Et je suis à peu près certain que cette nana connais toutes les techniques d'assassinat possibles et imaginables.
  • Si elle devait tuer quelqu'un, elle s'en occuperait sans même se soucier de quoi que ce soit. Ça lui retomberait jamais dessus, enchérit Tello. J'ai vu comment elle procédait. Elle est minutieuse et sûre d'elle. Rien n'est laissé au hasard.
  • C'est pour ça que je l'ai appelée. C'est la meilleure, malgré son jeune âge.
  • Quel âge elle a, m'enquis-je.
  • T'inquiète pas, elle est majeure, Jin. Je vais pas te coffrer pour détournement de mineure.

Gnegnegne.

Ça m'est arrivé qu'une fois. Et c'est elle qui m'avait chauffé en plus cette salope.

Puis elle m'a dit qu'elle avait vingt-et-un ans, j'y peux rien moi, si elle en avait que dix-sept !

Elle faisait beaucoup plus.

  • Tu réponds pas à ma question.
  • Trente ans. Elle a eu trente ans il y a quelques semaines.

Parfait. Pile ma tranche d'âge.

  • C'est pas genre dix-huit ans d'études pour être légiste ?
  • Elle est maligne. Elle a été passer son diplôme en France. Dix ans d'études, et elle l'a eu en poche. Pour qu'ils soit reconnu ici, il a fallu se mettre d'accord avec l'employeur pour qu'elle fasse un nombre minimal d'heures de stage.
  • L'employeur ?
  • Le département de police criminelle du coup. Ça fait deux ans qu'elle travaille pour nous, ça a rempli son quota d'heures, et elle a économisé huit ans de sa vie.
  • Ça m'a l'air d'être une vicieuse celle-là.
  • T'as pas idée ! Le pire, c'est qu'elle est discrète, on l'entend pas, elle essaie de se faire la plus invisible possible... Mais on arrive encore à parler d'elle pendant des heures alors qu'elle est partie.
  • C'est l'effet Frankenstein.

Ils me regardent tous d'un air dépité.

Quoi ?

  • Jin, laisse la tranquille.
  • C'est elle qui m'a roulé une pelle il y a quelques heures.

Il grimace.

  • Ouais, bon... Allez dormir, vous faites peur à voir. Moi j'ai une enquête à mener. Enfin, deux, mais une est officielle et l'autre non.

Quelle bonne idée.

Je monte à l'étage des chambres, et me jette dans mon lit.

Faut que j'aille me doucher, j'ai un peu approché un mort de près. C'est glauque.

Je rentre dans ma salle de bain, et l'odeur de mon gel douche flotte encore légèrement dans l'air... Mélangé à du parfum.

Un parfum féminin. Fleuri, sucré et légèrement épicé...

C'est exactement cette odeur qui m'a empli les narines, quand j'avais ma langue dans la bouche de la nana la plus bizarre que j'ai jamais vu.

Et me dire qu'elle va se trimballer avec mon odeur sur elle toute la journée, me ferait presque de nouveau bander tiens.

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