Chapitre 23 : Du sang sur les mains (1)

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Vyrian voulut répondre, mais il fut pris de court par une secousse. Les vibrations déstabilisèrent Nick qui perdit l’équilibre. Leurs fronts se heurtèrent. Synchrones, les deux hommes jurèrent, les mains posées sur leur visage endolori.

Le biologiste n’eut pas le temps de récupérer, qu’un nouveau choc, plus puissant, ébranla le vaisseau. Il fut éjecté contre le mur et Nick vint l’y rejoindre. Lorsque le tremblement prit fin, la gravité reprit ses droits. Ballotés, les deux prisonniers s’échouèrent lourdement sur le sol.

Le corps douloureux, le scientifique remarqua tardivement l’odeur de fumée qui emplissait l’air. Que se passait-il ? Que signifiaient ces tremblements ? La vue brouillée, Vyrian mit du temps à s’apercevoir de la présence d’une troisième personne. Lorsqu’il la reconnut, un hoquet de surprise lui échappa. Il s’agissait de Dinaïn, un Exilé et un Régisseur. Son crâne rasé et sa tenue ne trompaient pas. Le soldat se leva lentement et dégourdit ses membres. Son sourire moqueur ne quittait pas le scientifique.

— Ça y est ? Vous avez fini de vous amuser ?

Nick et Vyrian émirent un grognement de protestation.

— Bien, dans ce cas que diriez-vous de vous évader ?

Vyrian observa pour la première fois l’environnement qui l’entourait. Il se trouvait bel et bien dans une cellule. Il n’aperçut aucun moyen de surveillance. Il en fut surpris dans un premier temps puis cela lui parut logique. Dans un monde où la technologie était synonyme de pouvoir, bloquer son influence rendait les prisonniers impuissants.

A cette pensée, Vyrian se rappela la disquette qu’il avait en sa possession. Inquiet à l’idée d’avoir été fouillé, il tâtonna sa poche et ses doigts rencontrèrent la surface de l’objet. Il en fut soulagé. De la même manière son équipement ne lui avait pas été confisqué. Les Régisseurs devaient avoir une confiance absolue envers leurs technologies. Quoique, le scientifique devinait une autre raison derrière cette vantardise. Il se rappelait son incapacité à analyser le matériel des Ombres. Les Régisseurs devaient avoir le même problème. Laisser à leurs prisonniers leur équipement devait être pour eux un moyen de connaitre son fonctionnement et ainsi de perfectionner leur brouillage.

Des bruits de pas se firent entendre. Une silhouette se découpa dans la fumée. Dinaïn les remit sur pieds.

— Tenez-vous prêts !

Avant que Vyrian n’ait eu le temps de l’interroger sur son plan, un homme apparu. Il cogna sa matraque contre les barreaux de leur cellule, provoquant une onde de déflagration. Les prisonniers furent éjectés par le choc. Le soldat profita de l’espace dégagé et ouvrit la porte. A peine était-il entré que Nick se précipita sur lui. Vyrian admira sa réactivité. Blessé, le jeune homme n’en était pas moins rapide. Mais cela ne suffit pas. Le garde l’attrapa et le projeta sans difficulté. L’Historian percuta le mur du couloir dans un bruit sourd.

Dinaïn ne put s’empêcher de commenter.

— Trop pressé. C’est pourtant pas faute d’avoir essayé de lui enseigner la patience.

Vyrian comprenait mieux pourquoi le jeune homme était dans un si piteux état. Le geôlier se dirigea vers lui, sa matraque télescopique brandie. Le chercheur esquiva sans mal les premiers assauts. Les suivants lui furent plus difficiles. La technologie lui vint en renfort. Ce qu’il prenait pour des lunettes de vision nocturne, lui permettaient de visualiser l’activité électrique du cerveau et de voir les influx nerveux se propager dans le corps. Il était désormais capable de voir l’activation des aires cérébrales de son adversaire quelques secondes avant que l’attaque ne soit portée. Ce laps de temps suffisait pour lui sauver la vie, le scientifique analysait les mouvements et les évitaient. Vyrian enchaina les esquives.

Le visage de son opposant se fit rubicond, sa respiration devint difficile, de la sueur coulait le long de ses tempes. Vyrian apprécia la vue. Son corps grâce à l’exosquelette, lui semblait léger, bien plus réactif qu’il n’avait pu l’être par le passé.

Il se laissa griser par cette sensation et tenta sa chance. Il activa la disquette intégrée à son exosquelette via une commande présente sur son poignet et observa la fonctionnalité « Combo » charger. Des enchainements furent projetés dans sa rétine, aussitôt intégrés par son exosquelette.

Surpris, il sentit sa posture se modifier et ses muscles se tendre. Son poing vif fendit l’air et percuta le nez du geôlier. Le chercheur sentit les os se briser sous ses doigts et du sang gicla, maculant ses phalanges.

Il se rapprocha, avide de victoires. Cette fois son corps pivota, sa jambe décrivit un arc de cercle, son tibia percuta l’avant-bras de son opposant. Il sentit le choc se répercuter le long de son périoste. La douleur le déconcentra et il se figea.

L’exosquelette appliqua un cataplasme sur son tibia endolori. Le scientifique se reprit. Trop tard, il avait perdu son effet de surprise. L’homme réalisa une projection. Vyrian tenta de lui résister, mais il était trop faible. L’exosquelette n’avait pas eu le temps de charger les données lui permettant d’échapper à cette étreinte. Impuissant, Vyrian percuta le mur de plein fouet. Sans son exosquelette, le choc l’aurait probablement assommé.

La voix enjouée de Dinaïn le nargua.

— Pas mal pour un débutant ! Il semblerait que je sois le dernier qui puisse sauver notre échappée. Prenez-en de la graine les bleus !

Le garde l’entendit mais ne parvint à le localiser. Il l’invectiva.

— Sors de là, alchimiste !

— J’arrive, j’arrive.

Affaibli, le scientifique observa la silhouette de Dinaïn se détacher du mur. Il pouvait voir les structures électroniques s’adapter, les conformations entre les atomes se modifier et les éléments s’échanger.

Pour la première fois, le scientifique réalisa la particularité des Exilés. Issus d’un autre monde, ils développaient des capacités hors normes. Yomi percevait les auras, Keenan voyait la magie même de chaque chose, Dezaël pouvait comprendre n’importe quelle technologie et s’en approprier le fonctionnement, Djima percevait les informations issues de la magie et interagissait avec via ses inventions, Dinaïn manipulait la structure même des choses. Il ne lui manquait plus qu’un Exilé à rencontrer et il les aurait tous vus.

Sonné, Vyrian observa le jeune soldat s’agripper au cou de son adversaire, il lui comprima la trachée. L’homme suffoqua. Prit par surprise, il tenta de faire basculer le prisonnier, mais n’y parvint pas. Solidement attaché, Dinaïn continuait d’imprimer une pression constante sur la gorge de son adversaire tout en basculant son poids vers l’arrière pour l’obliger à courber le dos. Le geôlier frappait mollement Dinaïn. Ses armes étaient inefficaces contre l'alliage du vaisseau dont le corps du jeune homme était recouvert. Le matériau avait été conçu pour résister aux attaques ennemis. Peu à peu le garde s’évanouit. Vyrian vit l’activité de ses aires cérébrales diminuer. Alors que le soldat était au sol, Dinaïn, lui attrapa la nuque et exerça une vive torsion, tuant le garde sur le coup. Vyrian observa les signaux électriques s’interrompre. Le combat avait été bref. Il regarda le Régisseur changer la configuration des molécules. Son épiderme retrouva sa constitution normale.

Il enjamba prestement le corps du garde.

— Et un de moins !

Nick se dirigea clopin-clopant vers Dinaïn. Son bras pendait mollement le long de son corps. Alors que le soldat s’en empara, l’Historian parut comprendre ce qu’il s’apprêtait à faire.

— Attends ! Douce…

Dinaïn ne tint pas compte des recommandations et d’un vif mouvement remit en place l’épaule de l’Historian.

— Aïe ! Putain ! Tu fais chier !

Pour toute réponse, Dinaïn donna une tape sur le corps endolori du prisonnier. Il s’éloigna laissant Nick à sa douleur. Il se rapprocha de Vyrian lui tendit la main, le scientifique la saisit avec circonspection. Le jeune homme le releva sans ménagement ne tenant pas compte du choc qu’il imposait aux cervicales du chercheur qui sentit sa tête basculer en arrière.

Courbaturé de partout, le scientifique se massa la nuque. Grommelant, il regarda le soldat pointer une issue de secours.

— La sortie est par là.

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