Inconscient, Vyrian ne perçut de son environnement que la dureté du sol lorsque les Régisseurs le jetèrent dans une cellule et que sa tête heurta l’armature du vaisseau. Suite à ce choc, son esprit divagua et partit rejoindre Mère.

Lorsqu’il la retrouva, son cœur se serra. Les données de l’intelligence artificielle avaient pris forme humaine. Sur son enveloppe virtuelle, circulaient ses données cryptées. Suspendue pieds et poings liés, l’IA lui paraissait faible. Son corps disparaissait par intermittences dans des grésillements et réapparaissait l’instant d’après. Aux endroits où les liens l’enserraient, son code clignotait. Il semblait défaillant. Le scientifique fixa quelques instants le phénomène avant qu'il ne disparaisse, tout comme la lueur bleutée qui l’accompagnait.

L'espace vacant fut comblé par de nouvelles instructions. La lueur sanglante de leur affichage fit paniquer le biologiste. Que lui faisaient-ils ? En quoi transformaient-ils Mère ? Elle seule pouvait lui faire réintégrer son monde, comment ferait-il sans elle ?

Elle perçut sa panique. Des yeux noirs sans fond s’ouvrirent et son visage s’anima. Elle tenta d’émettre des pensées rassurantes au chercheur, mais une plainte informe fut émise lorsque le code inconnu attaqua ses données saines.

Le corps du scientifique eut un mouvement de recul et son dos percuta la structure métallique du vaisseau. La douleur commença à lui faire reprendre conscience. Des bruits de pas alentour lui parvinrent. Il tenta d’ouvrir les yeux, mais Mère le retint.

— Non ! Ne partez pas ! J’ai un dernier cadeau à vous offrir.

Vyrian sentit sa gorge se nouer à cet aveu. Il sentait les adieux arriver. Il ne pouvait laisser une telle chose arriver.

— Je vous offre l’omniscience. Dans cette guerre, ce sera votre plus précieux atout. Il vous permettra de prendre le contrôle de la situation. Sauvez-les.

L'angoisse de la situation dissipa la brume autour des pensées du scientifique. Il se souvint de la promesse faîte à Rayec, il ne pouvait laisser passer une telle occasion, surtout lorsqu'il pouvait s'agir de sa dernière opportunité.

— Moi aussi, j’ai quelque chose pour vous.

— Je ne veux rien savoir ! Partez !

Mère chassa le scientifique. Il s’en voulut. Elle l’avait rejeté car il avait fauté. Qu’il avait été bête d’avouer qu’il avait quelque chose en sa possession pour elle quand elle se faisait pirater. A présent, les hommes du Capitaine ne manqueraient pas de le fouiller si cela n’avait pas déjà été fait.

Vyrian se mordit la lèvre, le goût du sang emplit sa bouche. Dans un autre monde, quelqu’un d’autre percevait cette sensation. Vyrian y fut transporté.

Le scientifique se retrouva face à Declan. Lorsqu’il l’avait quitté, le jeune homme tentait d’ouvrir un portail afin de retrouver Keenan et sauver Pitchi. A présent, le jeune homme se tenait prostré dans l’herbe, du sang ruisselait de son nez et serpentait le long de sa bouche. Wikee se tenait assis dans l’herbe face à son partenaire.

— Je t’avais bien dit que tout ceci ne pouvait que mal se terminer.

Le jeune sage vagabond ne prit pas la peine de répondre et se tourna vers Pitchi, prostrée au sol. S’il ne faisait rien, la créature n’en avait plus pour très longtemps. Il tenta de parler, mais ne fit que cracher du sang. Autour du mage se tenaient trois autres personnes vêtues de noir de pied en cap. L’une d’elle prit la parole. Vyrian reconnu la tenue caractéristique de la Milice, organisation officieuse chargée d’éradiquer toute anomalie.

— Un décret a été voté Téléporteur. Certains sorts sont désormais interdits. Tu nous accompagneras à Alteryx, il parait que l’une des nôtres risque un Exorcisme.