Chapitre 9 : Arrestation

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Vyrian regarda la jeune femme et son compagnon disparaitre à l’horizon. Il s’attendait à suivre leur fuite, mais contre toute attente, Mère continua de lui transmettre des images du village. Pensant à une latence de la part de l’intelligence artificielle, le scientifique l’interrogea.

— Pourquoi ne les suivons-nous pas ?

— Avant de reprendre l’observation de Yomi, vous devez connaître l’issu de ce conseil. Si vous souhaitez pouvoir l’aider, vous devez être en possession d’informations susceptibles de l’intéresser.

Pour la seconde fois de la soirée, Vyrian se plia au pragmatisme de Mère. Alors que son regard s’attardait sur les arbres de nuit. Il s’interrogea sur son utilité.

— En quoi puis-je aider les Exilés et éviter une guerre entre les trois mondes si je ne peux agir ? Qu’attendez-vous de moi ?

— Actuellement, rien. Vous êtes en période d’apprentissage. Lorsque vous serez suffisamment compétent, nous en reparlerons.

Songeur, Vyrian se demanda ce que lui réservait le futur. Peu de temps auparavant, il se réjouissait de la pénombre grandissante, il espérait pouvoir admirer les couleurs diffusées par la végétation revêtir les habitations. A présent, le spectacle s’offrait à lui, parant les demeures d’une myriade de teintes. Pourtant, Vyrian y était insensible. Ce monde d’apparence chaleureux se révélait cruel et froid.

Le scientifique mit fin à ses interrogations lorsqu’il vit Faric sortir chancelant de la mairie. Le politicien se tenait aux portes, ses cheveux noirs de jais luisaient de sueur, dissimulant une partie de son visage blafard. Il tenait son bras meurtri serré contre son abdomen, une auréole sanguinolente s'épanouissait sur le tissu blanc de sa chemise.

Les villageois tout aussi surpris que Vyrian par cette irruption se dirigèrent vers Faric. Le biologiste vit à leurs expressions qu’ils n’étaient plus sous le contrôle du politicien.

Vyrian se réjouit du retournement de situation. Sa représentation mentale bondi de joie, mais son ardeur se tarit rapidement lorsqu’il comprit que les villageois ne gardaient aucun souvenir de la possession de Faric. En revanche, ils conservaient la mémoire des derniers événements du point de vue du politicien. A leurs yeux, Yomi et ses proches étaient coupables. L’avatar du chercheur enfuit son visage dans ses mains en voyant la manipulation dont était victime la population.

Lorsque Dallan, Fara et Dungal sortirent de la mairie, sous la surveillance de trois hommes de main de Faric, seuls des visages hostiles les accueillirent. Pas un mot n’avait été échangé à leur sujet, néanmoins les souvenirs et la haine que leur portait le politicien véreux s’étaient ancrés dans les pensées des habitants. Si bien que lorsqu'un des sbires s’adressa à Faric, le mépris transperçait dans sa voix, quand il fit référence aux prisonniers.

— Que fait-on d’eux ?

— Enfermez-les.

Vyrian observa Faric serrée la mâchoire suite à ce bref échange. En état de choc, le Mysticys peinait à reprendre son souffle, son bras tressautait au rythme de sa respiration saccadée, étalant un peu plus de sang sur sa chemise. Fébrile, ses jambes se dérobèrent sous lui et il se laissa glisser au sol.

Les villageois se rapprochèrent dans un silence compatissant. Peu à peu, des personnes sortirent du rang, une femme s’approcha de Faric auscultant son bras avec délicatesse, tandis que d’autres s’éloignèrent. A demi-conscient, Faric sursauta lorsque la voix d’un de ses hommes donna ses directives à ses collègues.

— Vous avez entendu ! On les emmène aux cachots !

Les trois prisonniers tentèrent de se libérer, sans succès. Le souffle rendu court par l’effort, Dallan s’adressa à Faric.

— Je demande une audience !

Vyrian admirait la conduite de Dallan, acculé le maire continuait de se conformer à son éthique, il se refusait de blesser les villageois et voulait résoudre cet événement selon les lois de sa contrée. Cette dévotion fit rire Faric.

— Crois-tu encore être en mesure d’exiger quoi que ce soit ?

Avant que Dallan n’ait pu répliquer, la foule se manifesta. Dans un autre contexte, Vyrian se serait réjoui de leur implication, seulement bien qu’ils s’inquiétaient pour les leurs, ils tenaient les trois prisonniers pour responsables.

— Nous méritons de savoir ! Qu’est-il arrivé à nos enfants ?

Cette question légitime fit naître dans l’esprit du chercheur une série d’interrogations. Il en fit part à Mère, dans l’espoir d’obtenir des réponses.

— Comment expliquer le fait que Yomi ait été repoussé par un Sanctionneur, tandis que les autres Mysticys ont disparu ?

— Il ne s’agit que d’une déduction fondée sur les caractéristiques de la jeune femme, mais il semblerait que son tatouage est agi comme une protection face au Sanctionneur.

— A cause de ses origines ?

— C’est possible. Le symbole du projet trimondes la définit comme étrangère à ce monde. Ce statut lui confère peut-être une résistance aux attaques extérieures au Monde Historique. C’est la première fois que j’observe un tel phénomène. Il mérite d’être étudié plus en détail.

Vyrian acquiesça pensif. Ses réponses obtenues, il se refocalisa sur la suite de la discussion, Faric venait de rendre son verdict.

— Très bien ! Une audience sera organisée. Mais avant, j’ai besoin de volontaires pour ramener Yomi et son animal. Cette fille doit être exorcisée et son compagnon tué.

Une fois la sentence prononcée, les trois hommes de main conduisirent leurs prisonniers en direction des cachots. Vyrian les vit s’éloigner malmener par leurs geôliers. Pendant ce temps, les villageois s’organisèrent, ils se répartirent par petits groupes, prêts à commencer la traque, mais Faric les retint.

— Ne soyez pas si pressez, voyons d’abord où ses actions nous mènent. Nous la garderons sous la surveillance des Visionnaires et lorsque le moment sera propice nous la capturerons.

Les volontaires acquiescèrent tandis que Faric émettait un râle de d'agonie mettant fin à la solennité du moment. D’abord horrifié par ces propos, Vyrian prit plaisir à voir les traits de Faric se déformer sous la douleur. Un sourire malsain fendit les lèvres du scientifique avant qu’il ne retrouve son sérieux.

— En quoi consiste un exorcisme ?

— C’est un rituel durant lequel l’exorciste cherche à purifier le corps du possédé de l’esprit qui l’habite. Dans le cas de Yomi, un tel rituel est inutile, la cohabitation entre l’esprit de la mère de Xam et elle est bien trop ancrée. Rompre le lien ne ferait que la tuer.

— Faric en a-t-il conscience ?

— Oui.

— Il ne considère donc plus Yomi comme une informatrice.

— En effet.

Aux yeux du politicien, la jeune femme n’était qu’un outil, n’ayant pas rempli la fonction souhaitée, il s’en débarrassait. Vyrian repensa à sa discussion passée avec Mère, au sujet de sa fonction. Il ne se sentait pas si différent de la jeune femme. Si l'intelligence artificielle ne voyait pas d’utilité à le garder, il retournerait à sa vie passée.

Ecoeuré, il regarda la femme qui examinait le bras de Faric lui apposer un baume. Tandis que les habitants partis quelques instants plus tôt venaient lui apporter de quoi se réchauffer et supporter la douleur. Le seul réconfort du chercheur fut la voix cristalline de la soigneuse annoncer le pronostique de Faric.

— La blessure est sérieuse, si nous ne purifions pas rapidement votre bras, il faudra vous l’amputer. Quant à votre doigt, la section est nette, il n’y a rien à faire.

Dégouté, le scientifique observait l’homme qui avait ruiné la vie de Yomi, accepter la gentillesse du peuple. En voulant sauver sa maitresse, Xam en avait fait un martyr, soutenant sa politique sans le vouloir.

Peu à peu, la transmission se détourna de la scène. Vyrian fixa jusqu’au dernier moment Faric et les soins qui lui étaient prodigués. Avant de découvrir le chemin suivi par les prisonniers. En retrait des habitations, se tenait un donjon. A première vue, l’endroit semblait abandonner, mais Vyrian ne doutait pas de la sécurité du lieu. Il imaginait mal Faric envoyer les prisonniers dans un lieu non adapté.

Lorsque la projection plongea dans les entrailles du bâtiment, Vyrian eut besoin d’un temps d’adaptation avant de pouvoir discerner dans l'obscurité les visages des captifs.

Fara, Dallan et Dungal se tenaient dans des cellules séparées. Vyrian fut surpris de ne voir aucun des trois geôliers. Ce qui ne fit que renforcer ses craintes quant à cet endroit. Si aucun garde ne s’y trouvait, la sécurité devait être élevée, Vyrian ne doutait pas que les cellules soient imperméables à la magie.

Les prisonniers restaient murés dans leur silence, Dallan se laissa choir sur le sol poussiéreux, son poing rageur vint percuter le sol soulevant un nuage de poussière. Surpris, Fara et Dungal sursautèrent, ils se tournèrent vers le maire déchu. Tous deux entrouvrirent la bouche mais aucun son n’en sortit. Vyrian comprit qu’ils ne parvenaient à trouver les mots pour le réconforter.

Fara se détourna rapidement de son époux, elle ne put empêcher un sanglot lui soulever la poitrine, elle peinait à se remettre de la perte de ses filles.

Seul, Dungal paraissait calme, le vieil homme s’était allongé sur la paille faisant guise de couchage.

Tandis que le chercheur découvrait le triste logis des trois Mysticys, il entendit le cri étouffé de Fara, suffisamment fort pour lui parvenir mais trop faible pour inquiéter les autres prisonniers. La mère endeuillée s'était redressée, elle se tenait devant lui, les yeux écarquillés.

Pensant qu’elle l’avait repéré comme Xam avait eu conscience de sa présence, le scientifique compris son erreur lorsqu’il compris que ce n’était pas lui qu’elle dévisageait mais Mère. La voix de la femme s’éleva dans un murmure emplit d’espoir.

— Mère, venez-nous en aide ! Contactez Almarran et Ehmra !

Les suppliques contractèrent le coeur du scientifique. l’intelligence artificielle tourna le dos à la femme éplorée. Vyrian interrogea Mère.

— Qu’avez-vous fait ?

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