Pablo 3

2 minutes de lecture

Je prends mon élan, prêt pour un sprint de 400 m jusqu'à la porte d’entrée.

La danseuse m’interpelle :

– S’il te plaît....

– Pas maintenant !

Je la coupe et lui fais comprendre par signe que je suis dans l’urgence et dois me rendre à la porte d’entrée. Je me mets à courir, la femme m'emboîte le pas. Elle court vite, aussi vite que moi, elle reste à ma hauteur. Elle veut me dire quelque chose.

Elle en fait une tête ! Tu parles, son gars est à l’intérieur de la salle et elle ne l’a pas vu sortir.

Je suis trop concentré pour lui parler. Je vois l’enseigne à l’entrée de «l’Usine», la salle de concert s’appelle comme cela car c’est justement une ancienne usine. Il n’y a personne devant.

Où est passé mon collègue ? Il ne m’a pas rappelé.

J’arrive essoufflé près de l’entrée de la salle de concert, la danseuse sur mes talons.

J’appuie sur la poignée de la porte.

Fermée. La porte ne s’ouvre pas. J’attrape mon trousseau de clés dans ma poche. Mes mains tremblent. Je m’y reprends à plusieurs fois pour faire rentrer la clé dans la serrure. Je tourne et pousse la poignée.

J’ouvre la porte à son maximum, un gigantesque nuage noir sort de la salle. Je me recule, en apnée pour ne pas respirer la fumée.

Dans la salle, je ne vois rien, il fait trop noir. Je m’attends à voir sortir des gens mais personne ne vient.

La danseuse me jette un regard désespéré. J’hésite à pénétrer à l’intérieur mais je n’ai pas de lampe, pas de masque à oxygène, rien pour me protéger de la fumée.

Celle-ci me pique les yeux.

La femme hésite aussi à rentrer, elle m’interroge du regard, misérable. Je secoue négativement la tête. Trop de fumée, aucune visibilité, non vraiment, ce serait du suicide d’y aller.

Elle me demande :

– Tu sais ce qui a mis le feu ?

J’hausse les épaules :

– Je n’en sais rien. Je n’ai rien vu de particulier avant de... , avant d’aller danser avec toi. Le feu s’est déclenché très rapidement. Je ne sais pas si c’est accidentel ou criminel. Il n’y avait personne dans la cour quand nous y étions. Mais une simple allumette pourrait suffire.

Elle se mord la lèvre, la tête complétement pitoyable :

– Ou bien une cigarette.

– Oui, une cigarette aussi. Saletés de fumeurs! Un mégot mal éteint et le feu peut partir.

Son visage se tord, elle se met à rire nerveusement, ça y est, elle pète un cable.

Je lui dis :

– Désolé pour ton gars, mais ne t’en fais pas, les secours vont arriver et aider ceux qui sont encore à l’intérieur à sortir. Il ne faut pas que tu t’inquiètes pour lui.

J’essaye d’être sûr de moi, mais je n’en mène pas large. Personne n’est sorti de la salle depuis que j’ai ouvert la porte.

Je l’entends murmurer :

– C’est moi.

Je la regarde, étonné, elle pleure maintenant :

– C’est moi qui ai mis le feu dans la cour.

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