Le même jour que Belmondo

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Prune, Prunelle, Petite Prune des Bois,

C’est comme ça que je t’ai appelé depuis ta naissance jusqu’à longtemps, longtemps plus tard. Tu as oublié une partie de ton enfance, donc tu as du oublier cela aussi.

Marraine disait tout le temps que je n’aurais pas du t’appeler Laetitia mais Prune ou Prunelle.

Tu es la prunelle de mes yeux et seul ce mot pouvait te qualifier et t’appeler en même temps.

Ton accouchement a été le plus bel accouchement qu’une mère puisse avoir. Et pourtant j’ai eu 5 enfants.

Tu es voulue, avant de t’avoir faite je t’aimais déjà et j’étais sûre que tu serais une fille.

J’avais plusieurs prénoms en vue, mais à part Laetitia, aucun ne convenait à papa et à moi.
Alors tu t’es appelée Laetitia.

C’est en allant à la poste que j’ai eu un flash en regardant le calendrier « Lundi 9 avril » et je me suis dit « Elle naîtra aujourd’hui ». Je suis sortie et j’ai eu des contractions légères. Très légères par rapport à mon accouchement précédent, qui lorsqu’elles étaient à ce stade, ton frère n’est né que deux jours plus tard. Et pourtant, j’étais sûre que tu arriverais ce jour-là.

Je suis passée devant chez marraine où j’ai trouvé ton futur parrain et John. J’ai dit que je sentais que j’allais accoucher et je leur ai demandé de garder vite Xavier.

Papa m’a conduite à l’hôpital. Il faisait beau. On était le matin. On m’a examiné et dit qu’effectivement il y avait des chances pour que tu naisses dans la nuit ou demain. Pour eux tu arriverais le 10.

On m’a placée dans une chambre de travail où une adorable élève infirmière a veillé sur moi et sur le monitoring qui montrait tes pulsations cardiaques. Elle m’a rafraîchie, rassurée, demandé si je voulais une péridurale. Je voulais refuser. Cela ne s’était pas bien passé avec ton frère. Ni pour lui, ni pour moi. Je ne voulais pas que tu souffres. J’avais peur de souffrir au point de préférer d’abord refuser la péridurale. Mais la gentille élève infirmière m’a dit qu’en trois ans, la médecine avait fait des progrès. Elle a amené un anesthésiste patient, pas comme celui qui m’avait endormie lors de la naissance de Xavier. Lui aussi m’a expliqué que la médecine avait évolué, qu’il serait très doux, très respectueux et que si je faisais exactement ce qu’il me demandait de faire, je ne souffrirais pas. Juste le temps d’entrer l’aiguille.

J’ai finalement choisi de leur faire confiance et j’ai bien fait.

Je n’ai même pas senti l’aiguille pénétrer dans la colonne.

La douleur des contractions s’est directement arrêtée.
Et la gentille élève infirmière restait à mon chevet, sauf quand la famille venait, jusqu’à ce que l’accouchement soit imminent.

A ce moment-là, un médecin stagiaire m’a demandé s’il pouvait m’accoucher lui, car pour obtenir son diplôme, il lui fallait un certain nombre d’accouchements. J’étais réticente à ce qu’un inconnu qui devait avoir mon âge, me touche, mais je me suis dit « Et si toi tu voulais devenir médecin, tu n’aurais pas envie que les gens te fassent confiance et te permettent de pratiquer les actes qui te vaudront ton diplôme ? »

La réponse était oui, bien entendu.

Alors j’ai accepté.
L’élève infirmière est restée toujours pour me rassurer, me tenant la main, me rafraîchissant, me disant quand pousser parce que si l’effet de la péridurale se dissipait, je ne me rendais pas forcément compte du moment où je devais pousser ou non.

Jamais je n’aurais imaginé que cela aurait été si vite et aussi indolore.

En moins d’un quart d’heure, j’avais dans mes bras la plus adorable petite fille que j’avais jamais vue. (Et oui, tu n’avais pas encore de sœur).

Je t’ai directement embrassée en disant « Oh ma Prunelle, mon amour, ma petite fille, comme tu es belle, comme je t’aime ».

J’ai pu te garder assez longtemps par rapport à ton frère trois ans plus tôt, mais il a fallu t’enlever à moi pour couper le cordon, te laver, vérifier si tout allait bien, toutes ces choses que l’on fait lorsqu’un bébé naît.

Tu n’étais qu’à un mètre de moi, mais c’était déjà une déchirure de te laisser, même si je savais que c’était pour ton bien, même si je savais que d’ici quelques instants on te remettrais près de moi et qu’on ne se quitterait plus.

Finalement, tu étais bien née le 9 avril à 23h35.

Le même jour que Jean-Paul Belmondo qui deviendrait ton acteur préféré.

Cinq jours après la majorité de ton parrain.

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