TIRE

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Pour les inconnus, c’était un type bizarre qui se baladait un ordinateur sous le bras, les mains dans les poches et la capuche rabattue sur la tête.
Pour les autres lycéens, c’était le gars qui n’avait pas beaucoup d’amis et qui passait son temps au CDI.
Pour ses rares amis du lycée, c’était Tim, un génie en informatique.
Pour les membres de sa bande, TIRE, le meilleur hacker que la terre n’ait jamais porté.
TIRE, pour Tim, Ima, Rain et Em ; des surnoms, évidemment. Rares étaient les fois où ils se voyaient ; le plus souvent, ils chattaient sur le site qu’ils avaient créé: \N.C.TIRE\.
Au départ, ils se sont rencontrés sur un autre site \ALLIANCE\. Au fil des missions, qui consistaient en général à faire planer des menaces sur des personnes malhonnêtes, ils ont sympathisé. Ils avaient beaucoup de points communs et voulaient aller plus loin, bricage, voire destruction de sites et mêmes de réseaux entiers. La frontière entre commettre des petits délits pour le bien de tous et devenir un cybercriminel était mince, et là, ils la longeaient dangereusement.
Ce jour-là, ils avaient réussi à mettre au point un virus plus puissant que tous les autres auparavant. Ils l’avaient baptisé « tetris » car quand on était infecté, une partie du jeu se lançait. Pendant ce temps, un mail piégé était envoyé à tous ordinateurs connectés au réseau, puis ouvrait tous les programmes afin de provoquer une surchauffe. Une fois la partie terminée, rien ne pouvait empêcher le virus de détruire l’ordinateur.
Pour l’instant, ils n’avaient fait que des tests, tous concluants. Seuls problèmes, il fallait une clé pour transmettre le virus originel. Deux solutions : se connecter au réseau puis infecter l’ordi, ou réussir à mettre une clé dans un ordinateur déjà connecté.
La bande opta pour la seconde option : ils leur suffirait d’obtenir un stage chez Netprise Incorporated : la cible de « tetris »
Seul Tim obtint le stage tant convoité. Le premier jour consistait en une simple mission d’observation. Netprise possédait de minuscules locaux, mais son influence sur la toile était incroyable. Elle vendait des films ou des séries, rien de bien méchant. Mais ce que quasi-personne ne savait, c’était qu’une partie des revenues servait à financer un gang puissant dans la ville : Les headsblow.
Deuxième jour, place à l’action. En tant que stagiaire Tim ne faisait pas grand-chose, il observait juste. Profitant de la pause d’un employé, il prit sa place et mit la clé dans l’ordinateur. Il essaya d’effectuer quelques réglages pour être sûr de l’effet du virus, mais rien ne marchait. Le réseau était protégé par plusieurs sécurités. Tim avait besoin de temps, mais là il n’en avait pas. Le jeune garçon mit en œuvre tout ce qu’il savait et en moins de deux minutes, parvînt à craquer tous les dispositifs, sauf un. Le propriétaire du bureau arrivait : il fallait aller vite !
C’est bon, réussi !
-Que fais-tu, jeune homme ? demanda l’homme rond, d’une quarantaine d’années, cheveux bruns, à qui appartenait ce PC.
-Rien, je regardais juste, hasarda Tim.
-Ben, va regarder ailleurs alors.
Tim s’en alla un rictus aux lèvres, d’autant plus satisfait que le premier ordinateur infecté appartienne à ce type débile.
Le lendemain, Tim constata avec joie que le virus avait parfaitement fonctionné. Tous les ordinateurs étaient hors-service. Tout le monde cherchait un coupable, quand le type brun prit la parole :
-C’est lui, là, le stagiaire ! Je l’ai vu traîner près de mon ordi hier.
Toute l’entreprise se retourna vers Tim qui se sentit oppressé, mais il ne se laissa pas pour autant impressionner :
-Non, j’ai rien fait, je regardais juste et puis comment j’aurais fait d’ailleurs ?
-Je… je ne sais pas, répondit l’homme stupéfait par l’aplomb du jeune homme qu’il avait devant lui.
-Je ne vois qu’une seule explication, reprit un de ses collègues, en désignant la quarantenaire. C’est lui qui a fait ça.
Sur ces mots, plusieurs personnes l’attrapèrent en attendant l’arrivée de la police. Quand il passa devant Tim, celui-ci lui décocha son plus beau sourire avant qu’il fonde pour se transformer en rictus narquois.

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