42 : Interrogatoire (2)

3 minutes de lecture

Salle des interrogatoires

Bureau de Police

DDPU 95

26, rue Général Leclerc

Saint-Ouen l'Aumône (95)

Fin janvier 2011

Le deuxième jour

09:27

— Marquance, allez prendre un peu de repos, suggéra Daniel Revon. Je vous donne votre journée.

— C’est juste un coup de mou, je vais très bien, je vous assure, rétorqua la commissaire. Une nuit trop courte, un petit-déj’ aux abonnés absents... Rien de bien méchant, Monsieur le Divisionnaire !

— Marina, seriez-vous enceinte par hasard ?

— Pour être enceinte, il faudrait que j’aie le loisir d’avoir une vie sexuelle décente. En réalité, elle est moins que ça, elle est inexistante, capice ? Inexistante…

— Veuillez pardonner ma familiarité et ma désinvolture à votre encontre, Marina, c’est simplement que votre état de fatigue m’interpelle. Voulez-vous que j’allège votre emploi du temps ? Durieux peut poursuivre les interrogatoires…

— Non, il est hors de question que je lâche l’affaire. Ce sont mes enquêtes, et j’ai l’intime conviction qu’elles sont étroitement liées. Monsieur le Divisionnaire, j’ai fermement l’intention de coincer l’assassin de mon frère et de rendre justice à Katia. Laissez-moi cuisiner Cash, je veux faire parler cet enfoiré, lui mettre les tripes à l’air. Pour Marco, il faut que j’écrive le mot fin de leur histoire.

— Très bien Marquance, vous avez carte blanche. Le Floch, apportez-nous de quoi redonner des couleurs à notre commissaire.

— Merci de me faire confiance.

— Dénouez cet imbroglio au plus vite, Marina. Parce que ça ne sent pas la rose tout ça…

***

[Alex, ça va ?]

[Ouais, m’man, pourquoi tu me demandes ça ?]

[Comme ça, pour rien. A ce soir. Bisous.]

[Idem.]

Marina rangea son portable, rassérénée. Prête à en découdre avec l’Ennemi Public Numéro 1.

***

— Joseph Cash… Comme on se retrouve !

— Madame la Commissaire…

— J’aimerais comprendre. Tu te tires de Fleury, normal, et après ? Pourquoi être revenu ici, profaner la tombe de ta victime ?

— Je vous aime bien, Marquance. Vous êtes un bon flic. Sérieuse, appliquée, un peu trop parfois. C’est votre trop grande soumission à la hiérarchie qui a tué la petite Jenny.

— Ne renverse pas les rôles, Cash, c’est toi qui l’as assassinée !

— C’est ce qu’a conclu la justice, oui. Vous savez, je hais Oettinger. Au fond, je crois que je l’ai toujours détesté, lui, le petit provincial engoncé dans ses costards-cravate plus chicos que les miens. Évidemment, quand il m’a balancé aux bœufs-carottes, toute cette aversion s’est amplifiée. En cabane, un seul objectif me faisait tenir : le voir crever à petit feu, d’une mort lente, atrocement cruelle, de celle qui vous bouffe de l’intérieur. Il y a cinq ans, vous avez interrompu ma vengeance en m’arrêtant dans ce pavillon de chasse de la forêt de Rambouillet, mais qu’importe. J’ai tout mon temps pour faire de son existence un champ de ruines sur lequel plus rien ne pourra plus jamais être édifié. Sa souffrance ne sera jamais assez grande à mes yeux, et pourtant, je m’en contente, m’en délecte même parce qu’aujourd’hui, il est comme moi : il n’a plus rien.

La jeune femme l’avait écouté, religieusement, sans l’interrompre. Il avait craché sa haine, presque comme un aveu. Elle s’enfonça alors dans la brèche.

— C’est pour ça que t'as commandité l’assassinat de Mathilda Triviani et Katia Sdresvic ?

— Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, Madame la Commissaire. Même si je mentirais en niant le fait que ces événements me réjouissent davantage qu’ils ne m’attristent.

— Mais tu as signé le meurtre de Katia !

— Vous savez très bien qu’une analyse graphologique me disculpera d’emblée. Et puis, de vous à moi, je ne suis pas vraiment du genre à utiliser du matos de gonzesse pour revendiquer mes actes…

— Comment as-tu deviné que le message avait été écrit au gloss sur un panneau publicitaire ?

— Parce que vous me l’avez dit… répliqua sans ciller l’évadé.

— Négatif, Cash ! Alors n’essaie pas de m’endormir avec ton baratin, ça ne prend pas. Je sais mener un interrogatoire. Et contrairement à toi, mes réflexes de keufs sont encore bien vivaces. Tu connais l’ustensile et le support parce que ces mots ont été écrits selon tes propres directives.

— Vous ne pouvez rien prouver…

— Tu vas retourner à l'ombre pour le restant de tes jours, espèce d’enculé ! Fais-moi confiance, je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour te mettre hors-circuit et t’empêcher de couler Marco.

— Seriez-vous toujours amoureuse de lui, Madame la Commissaire ?

Piquée au vif, Marina dégaina son revolver et le braqua sur les parties intimes du prévenu.

— Je sais qu’Eagle était ton compagnon de cellule, que vous vous entendiez comme des larrons en foire. Alors, tu vas cracher le morceau, Cash, sinon je t’émascule.

— Oettinger a déjà eu l’occasion de me supprimer, mais il n’en a pas eu les couilles. Et vous, Marquance, vous croyez-vous vraiment capable d’une telle chose ?

La jeune femme arma le chien.

— A ton avis ?

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 4 versions.

Vous aimez lire Aventador ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0