36 : Vieille connivence

3 minutes de lecture

Bureau de Police

DDPU 95

26, rue Général Leclerc

Saint-Ouen l'Aumône (95)

Fin janvier 2011

Le deuxième jour

08:54


Daniel Revon était commissaire divisionnaire à la Criminelle depuis de nombreuses années. Il avait cette ambition suprême de devenir Préfet de Police au sein de la capitale. Et de fait, il n'aimait guère les ressacs qui remuaient périodiquement son service et qui entravaient toujours un peu plus sa carrière. Cependant, en cette heure matinale, il avait un ami de longue date à visiter. Quelqu'un qui se trouvait dans les murs de sa propre administration.

— Brigadier, quel est votre nom déjà ? héla-t-il.

— Tréjean, Monsieur le Divisionnaire.

— Bien, vous vous plaisez parmi nous ?

— Oui, mais ça fait déjà plusieurs mois que j'exerce au sein de votre service... C'est un grand honneur d'ailleurs !

— Et comment se tient notre prisonnier ?

— Lequel, Monsieur le Divisionnaire ?

— Joseph Cash.

— Rien à signaler...

— Ouvrez-moi sa cellule, j'ai à m'entretenir avec lui.

— C'est-à-dire, Monsieur le Divisionnaire, que je ne sais pas si je peux...

— C'est un ordre, Régent !

— Euh, moi c'est Tréjean.

— Ouvrez-moi cette grille, bon sang ! aboya Revon avec humeur.

— Très bien, Monsieur le Divisionnaire...

Le brigadier s'exécuta et son supérieur pénétra dans la geôle. Il s'assit sur le banc faisant face au prisonnier.

— Qu'attendez-vous pour refermer cette cellule et nous laisser seuls, Tréjean ?

— C'est qu'il est dangereux, Monsieur le Divisionnaire, il pourrait s'en prendre à vous...

— J'en fais mon affaire. Déguerpissez sur-le-champ !

— A vos ordres, Monsieur.

Revon attendit que son subordonné se soit éloigné pour entamer la conversation.

— Jo, qu'est-ce que t'as foutu, bon Dieu !

Cash l'observa, l'air mauvais, sans rien répondre.

— Pourquoi ne t'es-tu pas tiré à l'étranger, comme tout fugitif en cavale ?

— J'avais un vieux compte à régler...

— Moi aussi je déteste Oettinger, mais il y a d’autres méthodes que les tiennes pour l’atteindre… Tu es allé beaucoup trop loin ! Profaner la tombe d'une gamine que t’as violée et étranglée naguère, c'est vraiment le genre de chose que je ne peux pas cautionner...

— Écoute, Dany, tes leçons de morale de comptoir pour avinés, tu peux te les carrer où je pense. T'es aussi pourri que moi, sauf que tu fais tes coups en douce, et que tu t'arranges pour ne jamais être éclaboussé.

— J'ai les mains propres, moi ! J'ai jamais tué personne !

— Tu n'es pas aussi clean que tu le laisses entendre, tu sais. Si je balançais tout...

— C’est une menace ?

— Fiche-moi la paix, Dan', c’est tout ce que je demande !

— On a été amis par le passé, non ? Alors si t’as besoin de quelque chose et que c’est dans mes cordes…

— Un ami, toi ? T’es même pas venu me voir une seule fois en cabane !

— Comprends ma position, je ne pouvais pas…

— C’est ça, reste avec tes petites combines et ta tranquillité bien bourgeoise. Faut surtout pas que bobonne s’aperçoive de quoi que ce soit ; et puis il y a tes gosses, leurs études universitaires…

— C’est toi qui t’es mis dedans tout seul, Jo ! Je ne t’ai pas attendu pour construire ma vie.

— Et j’assume. Je sais que ma cible est à terre et qu’elle n’est pas loin de flancher définitivement.

— Ce n’est quand même pas toi qui as buté Katia Sdresvic ?

— Ça y est, on y vient ! C’est pour ça en fait que t’es en face de moi, c’est pas par charité chrétienne. C’est juste pour faire ton sale boulot de flic…

— Non, Joseph, je t'assure que c’est vraiment par amitié.

— Va te faire mettre ! Je ne te dirai rien.

— Marquance saura bien te faire parler, va ! siffla Revon entre ses dents. Brigadier, j’ai terminé ! Brigadier !

Le divisionnaire frappa le métal des barreaux pour se faire entendre. Tréjean vint lui ouvrir la grille. Le visiteur se retourna une dernière fois sur celui qui fut l’un de ses meilleurs camarades. Leurs existences antagonistes semblaient les avoir définitivement rangés dans des camps opposés.

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