LEO - Le Grand et Magnifique Lars à la rescousse !

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Opera 2 - Dimash Qudaibergen

Je cours comme un dératé au milieu du souk, bousculant des gens. Je me prends des insultes, certains me filent même une claque, mais je m'en fiche. Faut que je me barre le plus loin possible de ce con de Jean-Luc... mais surtout de Miss France. De son regard méfiant... et dégoûté ? Comme si j'étais un monstre.

Un monstre...

Je continue mon chemin jusqu'à ce que j'arrive dans un dédale de ruelles complètement désertes. Je me laisse tomber sur le sol et pose le dos contre un mur. Je souffle comme un con pour me calmer, mais ça ne marche pas.

Je suis terrifié.

Mais qu'est-ce qui m'a pris ? J'aurais pu tuer cet idiot ! Non, la vérité c'est que j'ai vraiment eu envie de le faire. Dans cette boutique, j'ai ressenti le besoin viscéral de le voir mourir à petit feu. Je voulais l'entendre hurler, supplier, souffrir. Pas pour les infos, mais juste comme ça, pour le plaisir.

Fuck ! Je sens cette putain de noirceur qui dégouline encore abondamment dans mon être. Mon âme... putain c'est mon âme ! La bile me monte dans la gorge et je dégueule comme un abruti dans un coin.

— Non, mais regarde-toi un peu ! s'exclame une voix excédée dans mon dos. Combien de fois faudra-t-il que je te mette en garde contre cet anneau de malheur ?

— Je n'ai pas utilisé la bague ! je proteste en levant la tête vers Lars qui se plante devant moi et me regarde sévèrement.

Non, il a l'air furieux.

— Mais tu as envisagé de le faire, il réplique en me relevant sans ménagement. Et c'était amplement suffisant pour que les pouvoirs de cette saleté s'activent ! Mais bon sang Leo ! Espèce d'idiot ! Tu aurais pu les tuer tous les deux ! Et maintenant, tu empestes la magie noire à plein nez ! ajoute-t-il en grimaçant. Ishtar pourrait au moins t'apprendre à mieux utiliser les horreurs qu'elle t'offre...

Je me laisse sermonner la tête basse. Lars a raison, j'aurais dû faire attention. Si Miss France n'avait pas été là, j'aurais complètement perdu les pédales. J'aurais non seulement tué Jean-Luc, mais sûrement d'autres personnes.

— Comment est-ce que tu as su... je demande doucement à Lars alors qu'il attrape ma main qui porte la bague. La pierre est rougeoyante et des sortes de volutes noires serpentent le long de mon annulaire. Je ne ressens pourtant aucune douleur.

Sans répondre, il entoure mes doigts de ses paumes, et je le repousse vivement, les yeux écarquillés.

— Mais qu'est-ce tu fous ! Ne touche pas à cette bague Lars ! Elle pourrait te...

— Idiot, il soupire. Ne t'inquiète pas pour moi, va, je ne suis pas faible comme ce petit Passeur de Paris. Ton anneau ne me fera rien gros bêta, maintenant donne ta main.

Je cède et le laisse faire en grimaçant. Lars m'adresse un sourire rassurant puis, mes doigts enveloppés dans les siens, il commence son rituel. Les yeux clos, il murmure une litanie incompréhensible et je sens l'énergie noire présente en moi refluer vers la bague.

On reste comme ça pendant quelques minutes, puis c'est fini. Je saisis aussitôt les poignets de Lars pour voir.

— Tes mains, j'angoisse en voyant ses paumes brûlées et striées de volutes noires, mais la peau redevient rapidement blanche et lisse. Je soupire de soulagement et Lars me sourit d'un air goguenard.

— Tu sais, j'adore quand tu t'inquiètes pour moi comme ça. On se croirait en couple !

— N'importe quoi, je ronchonne en le lâchant. Ne prends pas tes rêves pour la réalité non plus !

— Et moi, je suis sûr qu'on finira par coucher ensemble un jour, prédit joyeusement mon ami. À défaut de nous marier et avoir de beaux enfants... Et maintenant, retournons à ce ridicule magasin de babouches où nous attend une vendeuse sexy !

Je ricane malgré moi en imaginant Miss France et sa petite robe en cuir vendre des babouches. Puis je revois son regard et mon sourire s'évanouit aussitôt. Qu'est-ce qu'elle va penser de moi maintenant ? Je veux dire... et si elle mettait fin à notre collaboration ? J'ai vraiment besoin de cette nana pour coincer Allistair !

— Tu es sûr que c'est juste pour ça ? se moque Lars alors qu'on revient vers le souk sous le regard mauvais de tous ceux que j'ai bousculés tout à l'heure.

— Quoi ? Arrête de lire dans mes pensées ! je proteste en lui donnant un léger coup à l'épaule et il éclate de son rire charmeur, capable d'envoûter n'importe qui.

— Mais au fait, comment as-tu réussi à retrouver tes esprits ?

J'évite son regard curieux et repense à Miss France et sa claque. Son visage à quelques centimètres du mien... Ses yeux verts qui me fixent avec sérieux... Mais putain comme cette fille est bandante !

— Je t'entends presque crier ton envie de copuler avec elle, commente Lars alors qu'on arrive à destination. Je le foudroie du regard et franchis avec appréhension le seuil du magasin. Comme un diable qui sort de sa boite, super nana bondit vers nous, ou plutôt vers moi, le regard furieux. Il y a aussi autre chose... serait-ce de l'inquiétude ?

— Mais bordel Blondie, tu foutais quoi ?

Lars se marre en entendant ce surnom ridicule qu'elle me donne.

— Fallait que je prenne l'air, je réplique en me recomposant mon masque de connard en chef. Je passe devant elle en souriant avec arrogance, mais sans oser affronter son regard.

Dans la réserve, j'ai la surprise de trouver notre vendeur de babouches, ligoté comme un saucisson avec un chausson fourré dans la bouche. Je me tourne vers Miss France, un sourcil froncé et elle lève les yeux au ciel.

— Quoi ? Il s'est réveillé, j'ai préféré le ligoter plutôt que de le cogner à nouveau !

Lars se dirige immédiatement vers Jean-Luc pour constater les dégâts. Je suis mal à l'aise en regardant mon œuvre : le visage en sang, un œil cramé... le malheureux gémit doucement, la tête rejetée en arrière et je me sens vaguement coupable.

J'ai besoin d'une clope, vite !

— T'as pu en tirer quelque chose ? je demande à Miss France pendant que Lars examine Jeannot avec une moue dégoutée.

— Connard ! Ouais j'ai pu lui soutirer des infos et ce n'est pas grâce à toi !

— Alors ? je questionne, mais elle m'ignore et pointe Lars du doigt. Lui et son look de dandy détonnent complètement dans cette pauvre réserve de chaussures.

— D'abord qu'est-ce qu'il fout là lui ? Pourquoi tu l'as fait venir ?

— Parce que vous avez besoin de moi pour soigner Jean-Claude ? suggère mon ami avec un petit sourire suffisant.

Il commence d'ailleurs le travail. Ses doigts courent sur la peau de Jeannot, ses mâchoires, son nez cassé, son œil boursouflé... puis il se met à murmurer ses formules magiques en latin ou je ne sais quoi.

Miss France se tourne vers moi, l'air inquisiteur et j'évite à nouveau son regard.

— Écoute, on ne peut pas le ramener salement amoché à la Guilde, je me justifie en faisant semblant de farfouiller dans ma veste à la recherche de mon paquet de cigarettes. Ton boss ne va pas du tout apprécier. Pense à son ultimatum !

— Et voilà ! Votre ami Jean-Pierre est presque comme neuf ! annonce joyeusement Lars en se redressant. Bon il devra désormais se contenter d'un seul œil, mais... c'est déjà pas mal, non ? Il frappe ensuite des mains d'un air réjoui. Maintenant, occupons-nous de sa mémoire !

— Sa mémoire ? Mais vous allez lui faire quoi ?!

Je suis sur le point d'allumer une clope quand Miss France me bouscule et la tige s'envole puis disparaît dans une pile de babouches posées à même le sol. Mais putain ! On ne peut vraiment pas s'en fumer une tranquille avec cette meuf !

— Qu'est-ce que vous allez lui faire encore à ce malheureux ? elle siffle en empoignant brutalement le devant de ma chemise.

— Rien du tout ! Lars va juste lui bidouiller la mémoire pour qu'il oublie ses palpitantes aventures à baboucheland ! je réplique en me dégageant rudement.

Je crois que j'ai eu ma dose de moments collé serré avec la Miss pour aujourd'hui.

— Pour son œil, disons que Jean-Jacques s'est pris un de ces parapluies de cocktail dans les yeux durant la bagarre au Sang pour Sang ? propose Lars en ricanant.

— Parfait, on va faire comme ça, j'acquiesce tandis que super nana souffle bruyamment en faisant les gros yeux.

Demi-sourire aux lèvres, Lars donne une petite tape avec son index sur le front de Jean-Luc. Ses yeux et l'extrémité de son doigt s'illuminent d'une faible lueur violette qui se propage en minces filaments brillants sur la peau de l'autre avant de s'estomper lentement.

— Vos yeux... lance soudain Miss France. Ils sont pareils que ceux de ce type...

— Ah non ! proteste Lars d'un air exagérément outré. Mes yeux sont magnifiques ! Rien à voir avec les globes oculaires de cet affreux Jean-Marc !

— Je parlais de leur couleur, précise l'autre agacée.

— Non non non et non ! Les miens sont d'un beau parme avec une nuance de...

— C'est bon on a compris, vos yeux sont les plus beaux POINT, coupe super nana avec impatience, et je souris devant l'air faussement offensé de Lars. Mais pourquoi ils sont violets comme ceux de Jeannot ?

— C'est un truc commun chez les passeurs, j'explique.

— Mais Lars n'est pas seulement un passeur ! Je le sens !

— Tutututu, chantonne l'intéressé, assez parlé de moi ! Il est temps de rentrer au manoir de la Guilde ! Jean-Paul a besoin de repos avant de se faire à nouveau interroger... par des gens plus gentils que vous deux j'espère.

Avec Miss France, on échange machinalement un regard gêné. Je ne vois aucune trace d'horreur ni dégoût dans ses yeux verts. C'est étrange, mais ça me réchauffe un peu le cœur... sans m'en rendre compte, je souris comme un con au moment de traverser le portail qui nous ramène à la Guilde.

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