Personal Data Log 20.04-25/26 (fin de campagne)

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J’ai du mal à me dire que tout est fini. En tout cas, pour ce qui est de notre périple pour faire reconnaître Bahari au Sénat Galactique.

Je me souviens même de manière un peu floue les dernières heures… En fait, je ne suis pas sûre d’avoir fait grand’chose. Mimba a bien sûr réalisé la vidéo, et Clair a fait un excellent travail de diffusion. Au point que l’émission spéciale du midi, qui devait être monopolisée par l’organe de comm ayant annoncé la mort de Kitty, a été uniquement consacrée à Mimba. Ensuite, Saun Du, Sohila et Mimba ont fait appel aux différents alliés que nous avions, quand ce ne sont pas eux qui se sont manifestés spontanément, en soutien suite à la vidéo. Des trucs politiques et diplomatiques, en somme. Et il semble que la foule, elle aussi, buvait les reportages de Clair comme nos petits du lait de simba-simba…

Parce qu’ensuite, il y a eu la question d’aller au Sénat. 200 bornes nous séparaient de ce bâtiment depuis notre vaisseau. Et c’est amusant, absolument tout le monde, sur la passerelle, était convaincu qu’on allait se faire attaquer sur le trajet ! Nous avons donc passé beaucoup de temps à tergiverser : comment allions-nous procéder ? Ensemble ? Séparément ? Les Ashlaans sont même venus nous offrir de nous emmener, et auront au final servi d’escorte. Ha, si, j’ai fait quelque chose : j’ai déposé des dizaines et des dizaines de plans de vol, pour nos deux navettes, notre dizaine de chars, mais également pour plein de véhicules imaginaires. Histoire de brouiller les pistes, même si Sauti, derrière, gère les dizaines d’appels en urgence de l’astroport pour comprendre ce bazar. Pour une fois, je joue sur notre côté « espèce pas au fait des procédures » !

Nous avons fini par nous mettre d’accord – et il était temps, vu l’exaspération de Mimba qui avait hâte qu’on soit au Sénat. Cette dernière était dans un char au sol, avec des artistes. Moi dans un autre char, avec Saun Du. De leur côté, Sohila et Olga ont pris une navette. Le reste des véhicules était plein de différents Baharis, tous très conscients du risque qu’ils prenaient.

Et du risque, il y en a eu. Heureusement, Olga avait eu la bonne idée de demander qu’on déploie également nos drones autour du vaisseau. Parce que, forcément, dès que nous avons mis une écaille dehors, nous nous sommes fait attaqués. Bravo la soit-disante super sécurité de Prima ! Sérieusement, ce ne sont plus des failles, là, ce sont des trous de gruyère ! Des aérodynes, repérés par nos espions volants, plein d’hommes armés attendaient les navettes en vol, et les ont canardés (ainsi que le vaisseau Ashlaan). Mais les armes sont interdites sur Prima, hein ! Olga a prévenu les Novas et les autorités, pendant que Sohila ripostait avec talent et précision. Bon, d’accord, nous aussi nous étions armés. Pendant ce temps, le cortège au sol continuait son avancée, pour être bientôt la cible de tirs aussi. Non, vraiment, il y a un véritable souci avec cette cité-planète censée être sans armement ! J’ai prévenu Clair pour qu’il alerte l’opinion publique et n’importe qui capable de gérer ce merdier, pendant que Mimba essayait de joindre différents consulats. Je n’aurais juste pas compris l’attitude de la police locale, qui semblait plus embêtée à l’idée que nos chars puissent renverser une poubelle que par le fait que ça canardait partout… Bizarre.

Nous avons fini par arriver, sans perte heureusement, au Sénat. Sauf que là, Olga comme moi avons été catégoriques (et colériques) : hors de question que la délégation finisse à pied le long chemin d’accès au milieu de la foule, et puis quoi encore ? Je ne comprends même pas comment on pouvait tolérer un tel peuple rassemblé, alors qu’il y avait eu des tirs contre nous même pas une heure plus tôt ! Du coup, j’ai même copieusement insulté les scorpionautes, ce qui a valu une intervention de mon fameux visiteur mental. Je pense vraiment que c’est Alpha, voir une fusion avec l’Empereur. J’ai donc présenté mes excuses, du bout des dents parce que sur les charbons ardents, tout en expliquant la situation. Nous avons donc pu accéder jusqu’à la porte dans nos véhicules, avec une haie d’honneur des scorpionautes tout du long, ce qui a grandement calmé la foule. Des drones venaient compléter le dispositif (des drones humains, pas folle la Wata, j’ai demandé si ce n’était pas du matériel méchalus avant qu’on descende de nos engins).

Enfin, nous étions au Sénat. Mimba, précédé de quelques-uns de nos artistes en pleine représentation, a immédiatement été rejointe par tous nos alliés, heureux et soulagés de nous voir là sain et sauf. Pas de trace mentale de la Matriarche conservatrice. Elle a aussi parlé de Saun Du en disant qu’il ne fallait pas le réduire à son statut de mâle, à un de ses interlocuteurs qui pensait devoir parler de lui ainsi, selon nos coutumes. Elle a vraiment changé, avec l’électrochoc que lui a causé Ngumi ! Et puis, ensuite, s’est présenté un être étrange, un scorpionaute sans grade ni armement, devant lequel tout les consuls et diplomates présents se sont inclinés. J’ai conseillé mentalement à Mimba de faire de même, car j’ai reconnu sa voix. Mon fameux contact mental, capable de monopoliser mes sens. Et capable de donner des ordres aux scorpionautes. Notre Matriarche a conseillé à toute notre délégation de faire les mêmes gestes qu’elle, ce que nous avons fait – parfois maladroitement. Ce dernier, satisfait, s’est alors retiré.

Enfin, nous avons pu entrer (pas tous les Baharis, bien sûr, mais notre petite poignée triée sur le volet : Mimba bien sûr, Olga, Sohila, Saun Du, Bada, quelques autres et moi-même) dans le dispositif lui-même. Des centaines et des centaines de plateformes se tenaient en cercle autour du centre. Mimba a fait un discours formidable. Elle a inclus de nombreux remerciements, a parlé de nos morts, a cité les articles de loi qu’il fallait pour lever le statut de réserve de chasse de notre planète, a exprimé ses souhaits pour l’avenir (avec son truc scientifique et commercial sur lequel elle est bien motivée), et a même mouché l’usurpatrice Matriarche en lui « offrant » une place de liaison sur Prima sous la responsabilité de Saun Du. Je crois que je n’avais autant ri mentalement de ma vie ! Ce qui a provoqué, chez cette traitresse hors d’elle, une réaction télépathique de menace de mort sur Mimba : parfait pour la griller définitivement auprès de tous les psy présents ! Notre plaisir ultime fut la tête des représentants du Triumvirat, déconfits, humiliés et en colère. Il faudra les tenir à l’œil…

Notre planète est donc libre. Notre peuple est reconnu. Nous avons mené a bien cette mission. Je ne sais pas ce que l’avenir nous réserve, même si Mimba, elle, a plein de plans en tête. Il y en a un qui concerne mes propres œufs, vu mon talent spécial de parler psychiquement aux machines. Elle peut, nous n’avons jamais été attachés à notre progéniture, et j’en ponds suffisamment chaque année pour avoir de quoi alimenter ses recherches. Et si cela m’évite d’être à nouveau poursuivie à travers la galaxie et menacée, je valide. Je me demande d’ailleurs si j’aurais l’opportunité de rediscuter avec Alpha, maintenant que tout s’est calmé. Il est intriguant.

Reste que je ne suis pas sûre d’avoir envie de retourner sur Bahari. J’aime être sur un vaisseau, à découvrir des planètes et des peuples. Ngumi me manque, j’aurais aimé partager tout cela avec lui. Même sans être pirate… S’il a réussit à s’échapper plutôt qu’à mourir, et qu’il revient un jour sur Bahari, je crois qu’il sera surpris : Mimba a vraiment prévu de lui consacrer un culte, pour s’appuyer dessus et hisser nos mâles à l’égalité des femelles. Elle va révolutionner le Matriarcat. C’est bien. Nous aurons découvert, pendant tout ce trajet en vaisseau, que les mâles le valent bien. Bon, à part Ulkien. On va dire que c’est l’exception – même si j’étais prête à sacrifier toute la planète à cause de lui !

Bien sûr, il manque plein d’éléments de compréhension des motivations de nos nombreux ennemis, et d’enjeux qui nous échappent. Des trucs liés à l’argent, forcément. Et à la politique, sans doute. Bref, tout ce que je n’aime pas et qui ne m’intéressent pas. Je me demande si Olga va accepter de venir passer sa retraite sur Bahari : c’est la première humaine qui a un statut de citoyen de notre planète. En plus, elle a des branchies. Saun Du, lui, a prévu de rester sur Prima, comme certains autres Baharis du vaisseau. Notre peuple peut s’ouvrir au monde. Moi, je ne veux pas rester là, j’aurais trop souffert ici…

Je me console en me disant qu’il y aura au moins le trajet retour sur le vaisseau. Je pourrais toujours entendre ronronner le moteur. C’est déjà ça de pris. Ensuite… On verra bien.

Kesho ni siku nyingine.

Fin d’enregistrement.

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