Chapitre 25 : Deux de plus

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Pour une fois Hydronoé se réveilla avant lui et le tira du lit. L'enfant grommela, ensommeillé.
- Debout Aymeric ! Nous devons nous mettre en route ! Allez, le roi nous accompagne !
La nouvelle tira instantanément le petit garçon des bras tentateurs du sommeil.
- C'est vrai ? Il vient avec nous ?
- Bien entendu. Il tient toujours à accompagner les futurs chevaliers-dragons personnellement.
- Lysange et Ourania vont devenir nos camarades ! s'enthousiasma Aymeric en s'habillant en quatrième vitesse. Nous allons nous entraîner ensemble, c'est super !
Il ébouriffa Hydronoé avant de quitter sa chambre en remplissant son sac de voyage avec ses cadeaux d'anniversaire. Ils déjeunèrent rapidement avant de se rendre dans la cour. Roland et Welson préparait les chevaux. Aymeric alla les aider pendant que le roi, Gordon et Sandor sortait du palais. Ourania et Lysange suivaient timidement.
La dragonne portait déjà sa cape et Hydronoé enfila la sienne avec enthousiasme, fier de l'avoir reçu comme cadeau. Cette fois Aymeric monta sans aide et il n'avait plus besoin de quiconque pour tenir les rênes.
- Cette fois nous ne venons pas, dit Roland.
- Pourquoi ? s'étonna l'enfant.
- Vous devez voyager sans trop attirer l'attention et en plus de vous il y aura trois adultes. Nous serons donc inutiles, expliqua Welson. En tous cas nous vous souhaitons bon voyage.
Le petit garçon les remercia et ils se dirent au revoir tandis que les autres montaient en selle. Lysange eut le privilège de s'installer derrière le roi et Ourania derrière Sandor. Ils partirent au galop et Aymeric salua mentalement sa famille en leur souhaitant à l'année prochaine.
Le voyage fut moins long qu'à l'allée, sans doute car il y avait des enfants de leur âge avec qui s'amuser. Ils passèrent une nouvelle nuit à l'auberge et Aymeric discuta de nouveau avec le propriétaire des lieux qui commençait à vraiment l'apprécier. Il lui servit un verre de cidre gratuitement. Il avait la tête qui tournait un peu après avoir finit le verre mais il marchait encore droit contrairement aux ivrognes qu'il avait déjà rencontré dans les rues de la capitale.
Ils repartirent aux premières lueurs de l'aube et arrivèrent peu avant le coucher du soleil. Le cœur d'Aymeric se réchauffa en voyant le château. S'était devenu sa maison et il se rendit compte que ses amis lui manquaient. Il descendit de cheval en ignorant les courbatures dans ses jambes et alla s'occuper de sa monture. Il brossait le pelage de l'animal quand on lui sauta sur le dos.
- Aymeric, tu es de retour ! s'écria Alaman. Comment s'est passé ton séjour à Ondre ?
- Très bien. Et toi ? Venerika t'a confié des tâches pénibles ?
- Pas autant que je l'imaginais ! J'ai ramassé des plantes médicinales dans la forêt et j'ai aidé à préparer les repas dans les cuisines. C'était drôle et j'ai eu droit à des desserts en guise de récompense ! Par contre elle recommence à vouloir me faire lire. Je n'y arrive toujours pas alors j'ai mis une astuce en place avec l'aide de Firenza. Elle me lit le passage que je dois réciter le lendemain et je l'apprends par cœur le répéter à Venerika.
- Elle ne se doute de rien ?
- Pas pour l'instant.
- Elle finira par l'apprendre. Tu n'as pas peur de la décevoir ? demanda le petit garçon.
- Elle le sera, répondit le rouquin. Mais je m'en fiche. Pour le moment je suis content qu'elle pense que je fais des progrès même si tout est faux.
Aymeric n'approuvait pas la méthode mais il pouvait comprendre son ami. Et si celui-ci connaissait les risques il ne pouvait rien faire de plus.
- Nous allons avoir une nouvelle dans l'équipe, lui apprit-il à la place.
- Une nouvelle ? s'étonna Alaman. Tu l'as vu ?
- Oui, j'ai fait sa connaissance au palais. Elle est gentille mais un peu perdue. Elle va avoir besoin d'être rassurée.
- Compte sur moi ! Moi le moulin à parole je vais lui faire oublier ses soucis en parlant ! J'ai une centaine d'histoires drôles en réserve.
Aymeric se dit que des blagues ne ferraient pas de mal à la petite fille. Elle se forçait à sourire mais il l'avait souvent surprise plongée dans ses pensées et la mine triste. Il ferait de son mieux pour qu'elle se sente bien ici. Il savait qu'Alaman et Zachary agiraient de même.
Ils retournèrent dans la cour où le roi, Ourania et Lysange avait disparu. Gordon s'étirait en ronchonnant tandis que Firenza et Hydronoé jouait à chat sous le regard amusé de Sandor. Gebald se joignit à eux en arrivant du chemin principal en courant. Zacharie, son maître et le dragon de celui-ci arrivèrent juste après. Hermas alla saluer le maître d'Aymeric.
Il ne ressemblait pas du tout à son élève, bien au contraire. Sa peau était légèrement hâlée par ses longues heures passées dans la nature et il devait être le plus jeune des chevaliers-dragons de sa génération. Son regard vert clair pétillait de bonne humeur et de douceur en lui donnant un air enfantin accentué par les tâches de rousseur qui constelle son nez un peu épais et long ainsi que ses pommettes. Ses cheveux blond clair sont coupés courts et ondulent. Un sourire étire en permanence ses lèvres fines et une barbe de trois jours lui mange les joues. Son frère dragon était un dragon d'eau, comme Hydronoé.
Il se nommait Mirzal et Aymeric avait déjà eu l'occasion de discuter avec lui lors du banquet du soir. Il était posé et souriant, à l'instar de son jumeau humain. Ses traits fins typiques de son espèce étaient mis en valeur par le fait qu'il tirait ses longs cheveux bleus foncés à peine plus clairs que ceux d'Hydronoé en queue de cheval haute. Ses sourcils épais se haussaient toujours avant qu'il éclate de rire et il possédait des épaules très carrées, plus que celles de ses confrères ou consœurs. Zachary rejoignit ses amis.
- Ravi de te revoir parmi nous Aymeric. Tout c'est bien passé ?
- A merveille. Je vous expliquerais ce soir, pendant le dîner.
- Oui va installer tes affaires dans ta chambre, tu dois être fatigué.
- Tu as besoin d'aide ? l'interrogea Alaman.
- Non, je n'ai pas grand-chose à ranger. Je vous rejoins rapidement !
Il entra dans sa chambre dont il ouvrit la fenêtre pour faire disparaître l'odeur de renfermé. Qu'on était bien chez soi ! Les draps avaient été changés en son absence et il n'y avait pas une trace de poussière sur le sol. Il déposa son livre sur son bureau, son arc et son carquois à côté du lit. La boîte contenant les figurines de dragons se retrouva sur son étagère et il sortit les statuettes pour les aligner. Il mit Phosphoméra, dragonne de la lumière, et Noximence, dragon des ténèbres, au centre et les entoura du reste du panthéon. C'était parfait.
Il trouva sa chambre plus meublée et plus personnelle grâce à ses nouvelles affaires. Il avait hâte de tirer à l'arc ! Il caressa le bout plumeux des flèches en imaginant les décocher sur une cible. On toqua contre sa porte et il vit Lysange sur le pallier.
- On est voisin de chambre, dit-elle avec un sourire timide.
- Elle te plaît ? s'enquit Aymeric.
- C'est très bien. Je m'estime heureuse d'avoir un logement rien que pour moi.
- Tu n'as pas encore vu le reste du château ! Tu veux que je te fasse visiter ?
Elle fit oui de la tête et il commença à lui montrer chaque partie du bâtiment tout en expliquant à quoi elle servait. Elle se montra impressionnée par la bibliothèque mais bien moins par la salle d'arme.
- Je n'aime pas me battre, déclara t-elle. Je sais que c'est parfois nécessaire mais je préfère discuter pour trouver une solution sans violence.
Aymeric approuva. Ce n'est pas parce qu'il aimait les duels et possédait des facilités dans l'art de la guerre qu'il désirait massacrer les autres. En sortant ils longèrent la forêt et la petit fille soupira :
- J'aimerais bien aller me promener dedans...
- Il est un peu tard aujourd'hui mais demain après notre entraînement je pourrais t'accompagner si tu veux. Je te montrerais les points de repère à avoir en tête pour s'orienter et retrouver son chemin. - Je veux bien !
Elle eut un sourire franc. En terminant la visite par les écuries ils caressèrent les chevaux qui aimaient particulièrement Lysange. La nuit tombait doucement quand ils rentrèrent. Aymeric entraîna sa nouvelle amie en direction des bains où les habitants du château commençaient à converger. Il expliqua le fonctionnement à Lysange et fut obligé de l'abandonner pour gagner les bains des hommes.
Il ne doutait pas qu'elle s'en sortirait très bien. Après tout elle lui avait expliqué qu'elle savait monter à cheval, lire, écrire, faire de l'escrime et comment se comporter à la cour. S'il s'était montré impressionné, sa gêne à elle était palpable.
- Ce n'est pas grand-chose, avait-elle dit avec modestie. Il me reste beaucoup à apprendre.
Il se doucha rapidement tandis qu'Hydronoé encourageait Gébald à se baigner en sa compagnie. Le dragon de terre refusa catégoriquement malgré l'insistance de son frère et ils se chamaillèrent sous les yeux amusés des adultes. Zacharie parlait dans un bassin avec Hermas mais il ne vit Alaman nulle part.
Le voyage l'avait affamé alors après un passage rapide dans une cabine, un bon coup de savon et deux sceau d'eau sur le corps il se sécha rapidement et se rhabilla pour gagner la salle du banquet. Le rouquin l'attendait et avait réservé des places pour lui, Zacharie et leurs dragons. Ils se servirent et Alaman entreprit de lui raconter ce qu'il avait fait ces derniers jours dans les moindres détails. Aymeric l'écouta avec amusement tandis qu'il accompagnait son discours de grands gestes. Zacharie arriva vers la fin de ce récit palpitant en compagnie de Gébald et Hydronoé.
Firenza se présenta quelques minutes après avec Ourania et Lysange. Ils s'assirent tous ensemble et l'enfant leur présenta les nouvelles venues. Ils firent connaissance et mangèrent dans la bonne humeur. L'effervescence lui rappela celle qui régnait à la table de Zolan le matin et les soirs, quand les petits dînaient. Il pressa instinctivement son médaillon en forme de corbeau dans sa paume. Hydronoé nota son geste et posa une main réconfortante sur son épaule. Le petit garçon sourit pour signaler qu'il tenait le coup. Un an, ça passait vite. Il les reverrait, ce n'était qu'une question de temps.
Ils restèrent tardivement à table mais la fatigue du voyage rattrapa Lysange, Ourania et Hydronoé. Ils décidèrent de regagner leur lit sur la pointe des pieds pour ne pas déranger ceux qui dormaient déjà.
Le lendemain après l'entraînement, il retrouva Lysange en lisière de la forêt. Ils passèrent l'après-midi dans les bois. Aymeric lui montra le terrier de renard, les étangs, la ruche, l'arbre centenaire ou encore l'amoncellement de vieilles pierres où se nichaient des serpents.
- Ton maître est gentil ? demanda t-il alors qu'il rentrait.
- Oui. Je l'aime bien, il est gentil avec moi. J'ai pleuré mais il ne s'est pas énervé. Par contre j'ai une question...
- Je t'écoute.
- C'est normal qu'Ourania vienne dormir avec moi alors qu'elle a sa chambre ?
- Je pense que oui. Firenza dort aussi avec Alaman, tout comme Gébald le fait avec Zacharie ou Hydronoé avec moi. Ça te dérange ?
- Non. Sa présence me rassure. Je me demandais simplement si c'était un comportement ordinaire.
- Tu n'as pas à t'en faire. Notre jumeau aime rester près de nous et c'est réciproque. Je me sens mal quand je ne vois pas Hydronoé durant une journée.
- A cause du lien ?
Il fit oui de la tête et elle dit :
- C'est vraiment comme avoir une sœur. Je suis enfant unique mais j'ai toujours rêvé d'avoir une fratrie.
- Voilà un rêve de réalisé.
- Oui. Au début je pensais que cet endroit allait être horrible. Que je ne me sentirais pas à ma place, qu'on se moquerait de moi, que je n'arriverais pas à me faire d'amis...Mais je me trompais.
- Tu verras. Dans quelques années nous formerons la meilleure des équipes.
Ils rentrèrent tandis que des nuages noirs chargés d'orage emplissaient le ciel. La pluie commença à tomber quand ils entrèrent dans le hall. Elle s'abattit avec violence et un éclair zébra le ciel. Le mauvais temps se poursuivit dans la soirée et Aymeric découvrit qu'Hydronoé avait peur de l'orage. Le petit dragon tremblait de tous ses membres, les draps remontés jusqu'aux yeux. Il cachait sa tête dessous quand un flash lumineux éclairait brièvement la chambre.
L'enfant trouvait au contraire les éclairs fascinants. Leur luminosité, les formes tordues qu'ils prenaient et le grondement du tonnerre étaient un spectacle naturel stupéfiant à ses yeux. Il l'observa une bonne partie de la soirée et se coucha quand ses paupières s’alourdirent. Hydronoé dormait déjà d'un sommeil agité et le lendemain le dragon d'eau avait des cernes.
- Je déteste l'orage, dit-il.
- Tant que tu es à l'intérieur tu n'as rien à craindre, le rassura Aymeric.
- Le bruit me fait paniquer, je n'y peux rien. On raconte que c'est Praeslia qui créer les éclairs pour exprimer sa colère et décharger sa violence autrement que par la guerre.
- Vraiment ? Ce n'est pas Windavic le dragon primordial de l'air qui est à l'origine de ce phénomène ? - Non. La légende raconte qu'il se contente de resserrer les vents et de densifier les cieux pour que les éclairs ne touchent pas la terre en détruisant tout sur leur passage. Cette histoire doit se trouver dans ton livre.
Ils déjeunèrent et en sortant ils découvrirent la cour pavée couverte de boue. Des serviteurs s'activaient pour la nettoyer et Hydronoé leva son regard jaune vers le ciel avant de déclarer :
- Pas de pluie pour aujourd'hui. Nous allons pouvoir rester dehors pour l'entraînement.
Sandor et Gordon venaient justement vers eux et le chevalier dit à son apprenti :
- Remonte chercher ton arc et tes flèches. Il est temps que tu apprennes à t'en servir.
Aymeric ne se le fit pas dire deux fois et se précipita pour récupérer sa nouvelle arme. Quand il revint son frère et le mentor de ce dernier étaient déjà partis. Il suivit son maître en direction d'un champ au centre duquel quatre cibles se dressaient.
- Utiliser un arc te sera sans doute plus utile pour la chasse qu'en combat réel où tu es plus qualifié pour utiliser des armes lourdes comme des épées à deux mains, expliqua Gordon. Pourtant savoir s'en servir est un atout et je ne peux pas te priver du bonheur qu'on ressent en touchant une cible dans le mille. Essaie d'encocher une flèche pour voir.
Aymeric obéit et suivit son instinct.
- Le mouvement est bon, dit le chevalier. Quand je te vois agir avec tant de naturel sans que j'ai besoin de te donner un conseil je me demande à quoi je sers.
- Ce n'est pas parce que je donne l'impression de savoir m'en servir que ma maîtrise est parfaite. Vous êtes là pour que je l'atteigne, le rassura le petit garçon.
Gordon lui ébouriffa les cheveux.
- Sacré flatteur va ! Essaie de toucher la cible plutôt que de flatter mon ego.
Aymeric banda la corde de l'arc, ajusta son tir et la relâcha. La flèche siffla et fendit l'air. Elle se planta non loin du centre, pour le plus grand bonheur de l'enfant.
- Pas mal pour un premier tir. Fais encore quelques essais. Tente de visualiser un rond au-dessus de ta flèche. Il faut qu'il soit face au centre de la cible.
L'apprenti écouta son conseil et sa flèche toucha dans le mille. Il recommença encore cinq ou six fois avant de ressentir une douleur aux doigts qui tiraient la corde. Il les plia et les déplia en observant leur couleur rouge.
- La corde commence à te blesser ?
- Encore une dizaine de flèches et je pense que la peau va commencer à se décoller, dit l'enfant.
- On dirait que ça ne t'affole pas.
- Il faut bien en passer par là pour que je puisse m'en servir longuement, rétorqua t-il en encochant une nouvelle flèche.
Il tira jusqu'à ce que ses doigts crient grâce. Ils commençaient à prendre une teinte violette et à chauffer. La souffrance s'éclipsait face à la satisfaction de n'avoir raté aucune cible. La plupart des projectiles étaient figés près du centre et seuls les derniers tirs manquaient de précision.
- Va donc récupérer tes flèches, ordonna son maître. Tu as fait du bon travail.
Aymeric délogea ses flèches et les rangea dans son carquois passé à sa taille.
- Qu'allons nous faire maintenant ? demanda t-il en rejoignant le chevalier.
- Renforcement physique en forêt. Rien de tel que de l'exercice au sein de la nature pour forger le corps et le caractère.

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