52 (partie 1)

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Elio

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Pour la énième fois, je recompte le nombre de chargeurs dans les poches intérieurs de ma veste d'intervention, tout en écoutant Lou me délivrer leurs découvertes sur le système de sécurité. Selon lui, rien ne gênera notre progression. Aucun signal quant à une ou plusieurs éventuelles bornes de détection. Le système de vidéo-surveillance, préalablement piraté par Tim et Lydia, les tiendra informés en temps réel de notre progression. Enfin, les différents micro-oreillettes que nous a déniché Andres, nous permettront de rester en contact permanent. Pas de signaux radios émis de leur part, aucun moyen de se faire repérer.

— Elio à Mia et Léo. Test des micros, vous m'entendez ?

— Cinq sur cinq, gronde la voix rauque de Léo. Prêt à débuter ?

— On entre dans la salle dans dix minutes environ. Et vous ?

— On s'échauffe.

Je souris, ravi de me dire que ce soir, je vais assister pour la première fois à une performance sportive de la part de Mia et Léo. De ce que j'ai pu entendre lors de mon bref passage à Liberty, ils étaient monstrueusement doués.

Le contact se coupe, et je me tourne vers Lou pour hausser un sourcil équivoque.

— Pas mal hein ? sourit-il avec enthousiasme.

J'acquiesce, avant de me retourner vers Andres pour m'enquérir de la situation.

— On va commencer à y aller, me dit-il simplement. Tout est ok ? Nombre de chargeurs, cagoule ?

— Tout est ok pour moi.

— Bien. Alors allons-y.

Il lève le poings, et je le suis après avoir adressé un clin d’œil à Lou. Il me sourit en retour, avant de se faire héler par Tim, qui l'entraîne bien vite avec lui.

L'équipe de sécurité est postée à l'écart de la salle. Ainsi, si jamais quelque chose tourne mal, ils auront largement le temps de fuir et d'embarquer le matériel avec eux. Nous par contre, si quelque chose tourne mal, j'espère que nous aurons le temps nécessaire pour battre en retraite. J'y ai longuement réfléchis, que ce soit dans l'avion ou même à l'hôtel tout à l'heure, lorsque Mia était en train de se teindre les cheveux.

Nous avons participé à énormément de missions de ce genre lors de notre activité en temps qu'agent, mais jamais je n'aurais pensé un jour ressentir ce genre d'appréhension pour l'une d'elles.

Ce sentiment de ne pas savoir si le fil sur lequel je suis en train de progresser, résistera jusqu'à ce que j'ai atteins ma destination. De ne pas savoir si Mia et Léo ne se feront pas remarquer. De ne pas être totalement sûr que je pourrais à nouveau la serrer contre moi. Car nos dernières missions étaient pour Reborn, celle-ci, est contre Reborn.

— Tu stresses ? me demande Juan en trottinant jusqu'à ma hauteur.

— Ouais. Pas toi ?

— Si bien sûr. Tu trouves que le plan est pas assez abouti ?

Je tourne la tête vers lui pour le jauger d'un regard lourd de sens.

— Je te demande ça parce que moi, c'est mon ressentis. Je le sens pas.

Mon cœur tressaute, en entendant le second de Andres m'avouer de but en blanc que lui aussi trouve le plan risqué. Sauf que c'est bien beau de le dire maintenant que Léo et Mia sont déjà dans la gueule du loup. Même si il s'avérait que nous prenions la décision de rebrousser chemin, comment les faire sortir de là-bas sans se faire prendre ?

Ce soir, nous n'avons rien à voir avec Reborn. Nous sommes simplement des criminels notoires. Bien sûr, au moment même où Nodem apprendra l'identité de l'homme capturé, il saura qui se cachaient sous les cagoules. Sauf qu'en attendant, pour le moment, nous sommes inconnus. C'est pourquoi, faire sortir deux membres de la Royale Family de la salle à cette heure-ci, attirerait forcément des soupçons. Et avec l'ambiance qui règne en ce moment, où tout le monde soupçonne tut le monde, mieux vaut ne pas sortir de la masse.

Dans les poches de mon pantalon, je serre les poings tout en incitant Juan à en dire plus.

— Je comprends plus trop Andres en ce moment, il fonce trop dans le tas, ça lui ressemble pas.

— C'est vrai qu'il est plutôt impulsif en ce moment. Mais, ça me paraît étrange qu'il puisse prendre le risque de jouer la tête brûlée alors que toutes nos vies sont en dangers.

— Hmhm. Tu as raison. Je dois sûrement psychoter pour rien.

— Peut-être pas, mais en attendant, il faut assurer nos arrières. Comme tu le dis, le plan contient des failles, et il va nous falloir les combler avant qu'elles ne nous engloutissent.

Il acquiesce, tout en continuant de marcher à nos côtés.

Quelques minutes passent, durant lesquelles je n'ai de cesse de jeter de furtifs coups d’œils à mon allié. Sa démarche son allure, son visage, j'analyse tout dans le simple et unique but de tenter de trouver réponse à une question qui me taraude depuis un moment déjà.

Mia ce jour-là, a conclut un pacte avec Redhead, après l'attaque de la pharmacie de Lydia. Jusqu'alors, nos deux ''groupes'' étaient ennemis, et elle n'a jamais voulu me donner les termes du deal. Sauf qu'aujourd'hui, cet arrangement tient-il toujours ? Ou bien, se battent-ils à nos côtés pour d'autres raisons ?

— Dis Juan ?

— Ouais ?

— C'était quoi les termes du contrat que Mia et Andres ont passés. Tu es son bras droit, tu...

— Il n'a jamais rien voulu me dire. Confidentiel selon lui. Officiellement, pour le reste du gang, il s'agit d'un arrangement contre la divulgation de nos gros dossiers. Tu sais Elio, on a pas toujours fait... dans le clean, si tu vois ce que je veux dire.

— Oui, je vois tout à fait.

Même Juan ne sait pas. Demain, quand nous aurons récupéré Erfinder, il faudra qu'elle m'explique. Qu'elle me donne les raisons pour lesquelles un groupe aussi puissant qu'est Redhead, s'entête à nous aider alors même qu'ils mettent à chaque fois leurs vies en jeu. Alors, que pour le moment, nus ne pouvons rien leur donner en retour.

Nous arrivons à la salle assez rapidement, et passons le plus rapidement possible les bornes de sécurité momentanément désactivés par Lou et les autres, afin qu'elles ne détectent pas nos armes. On nous demande notre identité, à quoi nous répondons que nous sommes membres d'une start-up espagnole en grande évolution. Que nous ne sommes que de simples visionnaires venus parler de tout ceci avec des hommes influents, et leur proposer un soutien financier pour la cause que défend ce gala. Mensonge bateau mais qui semble fonctionner puisque personne ne nous assaille plus de questions.

Au final, la coloration et les lentilles de couleur imposées ne me semblent plus tellement nutiles : sans elles, j'aurais été repéré à peine entré dans la salle. Avec mes cheveux plus sombres et mes yeux bleus, pas moyen de reconnaître le fils Criada. De plus, j'ai été bien moins médiatisé que Mia, ce qui rend mon visage moins reconnaissable.

Je discute un peu dans un anglais maladroit – l'allemand n'étant définitivement pas mon fort, il me faut bien trouver un moyen de me fondre dans la masse. Le temps passe, j'observe les différents invités, les riches couples allemands, les politiciens, les acteurs et actrices, les journalistes.

Et Gerulf Erfinder, en grande conversation avec une sublime mannequin suédoise qui ne doit même pas avoir la moitié de son âge. Cette soirée rassemble du beau monde, notre attaque risque donc d'être d'autant plus remarquée.

L'important, c'est qui si la sécurité venait à s'en prendre à nous, il faut impérativement que les autres Reborn et moi-même soyons les cibles des balles. Contrairement à nous, Andres et les autres ne se remettent pas d'une balle dans le ventre.

Plusieurs dizaines de minute, avant que le speaker de la soirée ne se hisse sur scène pour donner son petit spectacle avant l'arrivée du numéro principal : la Royal Family.

À ma montre, vingt-et-une heure treize.

Je l'écoute à peine, trop occupée à garder les yeux rivés sur Erfinder. Cependant, je me retient de trop le fixer : il ne faudrait pas que je sois repérer dés maintenant pour un comportement insistant.

Le speaker achève son monologue, et les premières notes d'une chanson débutent alors dans les enceintes situées ci et là de la scène. Ces notes, sont en réalité un bruitage de chambre à balle qui tourne, pour annoncer le terrible jeu qu'est celui de la roulette russe.

Le rideau s'ouvre, et mes yeux se dirigent instantanément vers la scène, où je remarque bien vite Léo et Mia, dans les rangées du fond. Puis tout s'enchaîne, des sauts aux mouvements, en passant par les changements de places, je ne retiens pas tout de leur chorégraphie, si ce n'est l'énergie et les immenses sourires de mes deux amis. On ne peut pas deviner en les voyant, qu'ils ne font pas partie de l'équipe officielle. Leurs mouvements sont fluides, énergiques et souples, comme si ils n'avaient jamais cessé de s'entraîner. De ma poche, je sors le portable que m'a confié Hector pour faire plus ‘'vrai'' au cas où l'on me demanderait mon numéro, et braque la caméra sur Mia et Léo.

Lou sera ravi de pouvoir admirer leur performance.

La première chanson prend fin, et la seconde débute presque aussitôt après leur courte pause pour le changement de costume. C'est ainsi jusqu'à la pause : danse, puis changement de costume, et retour sur scène.

Mia, est radieuse. Dans son élément, elle me semble revivre, ainsi perchée sur scène, dans es costumes et ses mouvements. Plus rien ne semble exister autour d'elle, et c'est ce qui rend sa performance, au même titre que les autres, incroyable.

La Royale Family n'a pas gagner sa réputation dans une pochette surprise.

Lorsque la pause est annoncée, je me rend au buffet prendre un verre, et ai le plaisir d'y croiser notre cible, déjà bien entamée.

— B'soir, me lance t-il dans un anglais encore pire que le mien.

— Bonsoir, je réponds poliment.

— Vous êtes entrepreneur c'est ça ? Moi aussi, c'est cool non ?

Son haleine sent mauvais, et je suis persuadé que ses dents du fond baignent déjà dans l'éthanol. La jolie mannequin est un peu plus loin, et semble se moquer de son escorte avec une autre femme un peu plus âgée.

Gerulf me fixe de ses yeux verts acides derrière ses lunettes, attendant visiblement que je rebondisse. Comment sait-il pour notre prétendu rôle ? Je ne pensais pas qu'un homme tel que lui prendrait le temps de s'informer sur chaque convives.

— Bien sûr monsieur. Vous êtes entrepreneur en... ?

Son sourire étire son visage abîmé, et je note une étincelle d'intérêt dans son regard.

— Je suis scientifique. Les Reborn, c'est ma création.

Boire trop, peut avoir des conséquences indésirables, comme par exemple commencer à déballer une vérité attractive à une personne venue t'enlever.

Si je le travaille bien, peut-être qu'il n'y aura même pas besoin de l'embarquer avec nous.

— Vraiment ?

— Oui m'sieur. Nodem se les attribue, mais ils sont de moi. Ma plus belle création. Dommage qu'il s'en serve à mauvais essaient. Ce petit con, il ne m'a jamais écouté.

— Vous avez l'air de bien el connaître.

— Un peu oui ! Cette raclure de bidet, c'est mon mioche !

Il crache presque le mot ''mioche'', tout en buvant une plus longue gorgée de son verre d'alcool. Parler de son fils, lui fait passer une ombre de colère au fond des yeux, avant que je ne reprenne.

— Et en tant que créateur, vous n'avez rien pu...

— Bien sûr que non ! J'ai le cerveau, mais Philippe a le réseau. Dés qu'il a pu, il a récupéré mes recherches, et a créé son entreprise. Force de l'ordre améliorée mon cul.

Il est saoul, mais reste plutôt clair dans ses propos.

Au loin, je vois Juan me lancer un drôle de regard, tout en me mimant un ''pas de problème'' muet en articulant bien. Je réponds d'un hochement de tête, avant de me retourner face à mon interlocuteur.

— Si vous désapprouvez ce que votre fils a fait, pourquoi honorez-vous sa soirée de récolte de fond de votre présence ?

— Avec tout ce qui se passe en ce moment, il a besoin de se refaire une image. Dédommager les familles me semblait déjà être une bonne chose. Vous savez, je ne sais pas si vous avez un enfant mais, c'est difficile de le laisser se noyer dans sa propre merde, même si on est du côté de l'avis public.

Je m'apprête à ajouter quelque chose, lorsque les rideaux se rouvrent dans une salve d'applaudissements aussi sonores qu'hystériques. Je tourne la tête pour constater que seul Mia et une fille de la troupe se trouvent sur scène pour lancer la chorégraphie, et m'excuse prestement auprès de Gérulf avant de m'éclipser en direction de Jeremy.

J'attends d'être à sa hauteur, assez loin du public, pour pouvoir contacter Léo.

— Léo, c'est Elio. On se prépare, surveillez la cible.

— Pas de soucis Sam, tout est ok de notre côté.

Je laisse un sourire étirer mon visage, et note que Jeremy a pris les devants et est en train de parler avec Tim.

— La sécu est ok, on peut y aller.

J'acquiesce tout en me dirigeant vers la sortie de la salle principale par laquelle je suis censé rentrer pour le braquage. La salle de gala est circulaire et possède plusieurs sorties, donnant soit sur les toilettes, le hall, des couloirs annexes, la régie. C'est pourquoi, à tour de rôles, nous devons sortir, pour prendre l'air, ou aller aux toilettes, et nous parer de nos cagoules. À l'instant où je franchis les portes, une boucle de vidéo surveillance est diffusée sur les écrans de la salle des agents de sécurité.

Pas moyen de savoir quia quitté la salle, et qui va y rentrer.

— Elio, c'est Lou. Préviens-moi lorsque je devrais couper les lumières.

— Tu as réussi à te connecter au système électrique à distance ?

— Oui. Le sorties électriques sont contrôlables à partir d'une application connectée. J'ai juste eu à pirater cette appli, et d'accéder au compte relatif à la salle.

— Tu gères.

— Ouais bah, à votre tour maintenant.

Je soupire de soulagement de savoir que pour une fois, tout fonctionne et enfile ma cagoule avant de me glisser dans un coin de la salle d'entretien dans laquelle je me trouve, pour attendre le signal de Léo ou Mia.

Je n'ai pas à attendre longtemps, car trente secondes plus tard, je reçois un ''go'' très clair de ma petite amie, m'informant que la seconde chanson de la seconde partie du spectacle, commence.

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